Pineau, J.C., Bocquet, M., Crescenzo, E., 2004, Technique ultrasonore appliquée à la mesure de la composition corporelle. Antropo, 8, 73-81. www.didac.ehu.es/antropo


Technique ultrasonore appliquée à la mesure de la composition corporelle

Ultrasonic technique applied for body composition measurement

J.C. Pineau1*, M. Bocquet2, E. Crescenzo3

 

1UPR 2147, CNRS, Paris. Laboratoire de Physiologie et de Biomécanique de l’Exercice musculaire UPRES EA 1274 UFR APS Université de Rennes 2. Avenue Charles Tillon. CS 24 414. 35 044 Rennes Cedex.

2 LM3, CNRS, UMR 8006, ENSAM, 151 Bd de l’Hôpital 75 013 Paris

3 Société IXTREM, 9 rue Edouard-Denis Baldus , 71 100 Chalon-sur-Saône.

 

Mots clés: Composition corporelle, masse grasse, ultrasons, DEXA.

 

Key words: Body composition, fat mass, ultrasound, DEXA.

 

Résumé

Déterminer la mesure de la composition corporelle: masse maigre, masse grasse, eau corporelle totale à partir d’une technique transportable non invasive, non traumatisante, précise et reproductible par rapport à la techniques de référence DEXA.

Cette étude a été réalisée dans un Centre Hospitalier Universitaire (CHU) après accord du Comité éthique. Une population de 44 sujets féminins et de 56 sujets masculins de 18 à 60 ans a été recrutée soit à la consultation soit dans les unités d’hospitalisation d’un service de médecine interne. Les patients ont été sélectionnés sur la base d’une grande variabilité de l’Indice de Masse Corporelle, IMC = Poids(kg)/stature2(m), ce qui nous a permis d’obtenir une grande variabilité de masse grasse. Pour chacun des sujets examinés, un examen corps entier a été effectué par absorptiométrie à rayons X (DEXA), sur un matériel Hologic QDR/4500W. La détermination de la masse grasse totale du corps entier peut également être obtenue à l’aide des ultrasons en mesurant les épaisseurs de couches de graisse situées entre la peau et le muscle, au niveau ombilical dans la région dorsale et à mi-cuisse. Le recueil des données a porté sur les variables anthropométriques ainsi que sur des épaisseurs de graisse sous-cutanées mesurées par ultrasons. La mesure de référence était la masse grasse totale corporelle DEXA.

Nous avons établi par une technique ultrasonore de très fortes corrélations (r = 0,995) chez les femmes et (r = 0,993) chez les hommes entre la mesure de la masse grasse totale (DEXA) et celle obtenue à partir des épaisseurs de graisse sous-cutanées en tenant compte de certaines variables anthropométriques. La précision des estimations de la masse grasse comme de la masse maigre reste inférieure en moyenne à 8 %.

La technique ultrasonore est suffisamment précise et reproductible pour être utilisée en routine dans de nombreuses applications médicales, paramédicales et sportives. Elle constitue une innovation en anthropologie et devrait être utilisée avec succès en épidémiologie.

 

Abstract

To determine the body composition measurement: lean body mass, fat mass, total body water starting from a non-invasive transportable technique, not traumatizing, of lower cost with a good accuracy and reproducibility compared to the reference technique DEXA. This study was carried out in an university hospital (CHU) after agreement of the ethical Committee. A population of 44 female subjects and 56 male subjects were recruited either with the consultation or in the units of hospitalisation. The patients were selected on the basis of a great variability of Body Mass Index (BMI), what us allowed to obtain a great variability of fat mass. For each examined subject, an examination whole body was carried out by absorptiometry with X-rays on Hologic QDR/4500W. The determination of the total fat mass of the whole body can also be obtained using the ultrasounds by measuring the thickness of layers of fat located between the skin and the muscle at the umbilical level in the dorsal area and at mid-thigh. The data collection related to the anthropometric variables and also on subcutaneous thickness of fat measured by ultrasound. The measurement of reference was the total body fat mass DEXA. Using an ultrasonic technique, we established a very strong correlation (r = 0,995) among women and (r = 0,993) men between the measurement of total body fat mass (DEXA) and subcutaneous thickness of fat by taking account anthropometric variables. The standard error estimate of the body fat mass as the lean body mass remains lower on average than 8 %.

Ultrasound technique is sufficiently accuracy and reproducible to be used in routine in many medical, paramedical and sporting applications. It constitutes a real innovation in anthropology and should be used in epidemiology.

 

Introduction

La nette amélioration des conditions de vie et les progrès de la médecine ont fait apparaître deux nouveaux problèmes de santé publique: la recrudescence de l’obésité d’une part et le vieillissement de la population d’autre part. Ainsi, les chercheurs étudiant ces nouveaux phénomènes de société se trouvent donc tous confrontés au même besoin: la connaissance impérative de la composition corporelle de l’individu. Cette composition corporelle fait appel à la mesure de l'eau corporelle totale, de la masse maigre, du contenu minéral osseux, de la masse grasse segmentaire et totale. Elle permet ou peut permettre une meilleure gestion du poids. De plus, la valeur et la répartition entre eux des différents éléments constitutifs présentent une incidence directe sur le mode de vie des personnes. Un suivi, en routine, de ces éléments, dans le cadre de régimes médicaux, diététiques et/ou physiques, devrait permettre une réduction non négligeable des coûts de santé publique.

Le passage en revue de l’ensemble des techniques actuelles susceptibles d’accéder ou de contribuer à la détermination de la composition corporelle montre qu’aucune de celles-ci n’est optimale. Il est donc nécessaire pour obtenir des mesures fiables et précises des masses et de leurs répartitions d’améliorer ces techniques voire de les associer.

L’étude de la composition corporelle consiste à déterminer la masse et la proportion respective de chacun des constituants de l’organisme. Au niveau tissulaire, le corps humain est classiquement divisé en deux compartiments : la masse maigre et la masse grasse (Brozek et al.,1963). La masse maigre est physiologiquement primordiale. Elle est constituée d’un ensemble complexe comprenant eau, protéines et minéraux. Sa densité est en moyenne de 1,1. La masse grasse possède une densité moindre : 0,91. Il s’agit ici de graisse dite "amorphe" qui n’est pas à confondre avec le tissu adipeux qui, quant à lui, contient triglycérides, eau et masse maigre sèche. Il existe trois grands types de techniques permettant d’évaluer la composition corporelle (Lukeski et al., 1987; Jebb et al., 1993).

Le premier type consiste à quantifier, de façon indirecte, la masse grasse. Soit par l’emploi de pinces à plis cutanés (Durnin et Womersley, 1974), soit par calcul de la densité corporelle (Katch et al. 1967), soit enfin par quantification de la masse maigre au potassium 40 (Forbes et Hursch, 1963). Le second type tente de quantifier le volume d’eau corporelle. Nous pouvons citer dans cette catégorie les méthodes de dilution (Thomasset et al., 1973 ; Vaché et al., 1995) ou encore l’impédancemétrie (Segal et al., 1991; Baumgartner et al., 1989). Le dernier type de techniques permet d’évaluer de façon directe la répartition du tissu adipeux. C’est dans cette catégorie que nous retrouvons le scanner à rayons X (Seidell et al., 1990 ; Kvist et al., 1986), l'absorptiométrie biphotonique DEXA (Fuller et al., 1999 ; Jebb et al., 1995 ; Wang et al., 1999 ; Svendsen et al., 1993), l’Imagerie par Résonance Magnétique ou IRM (Abate et al., 1994 ; Barnard et al., 1996 ; Han et al., 1997). L’absorptiométrie à rayons X constitue une technique de référence pour les mesures du contenu minéral, de la masse maigre et de la masse grasse. Dans cette perspective, l’objectif de notre étude est de déterminer la composition corporelle à travers la masse grasse totale et l’eau corporelle totale. Pour apprécier la masse grasse totale, nous avons utilisé une technique ultrasonore fournissant les épaisseurs de graisse sous-cutanée. Notons que jusqu’à présent, cette technique n’est employée, que pour des mesures locales réservées à la quantification de la graisse sous-cutanée intra abdominale en vue d’étudier, « in fine », l’obésité androïde (Stolk et al., 2001 ; Wirth et al., 1998 ; Armellini et al., 1993 ).

 

Matériels et méthodes

Cette étude a été menée dans un Centre Hospitalo-universitaire (CHU), après accord du Comité Consultatif de Protection des Personnes dans la Recherche Biomédicale (CCPPRB) et de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (AFSSAPS). Une cohorte de 44 femmes et de 56 hommes a été recrutée soit à la consultation, soit dans les unités d’hospitalisation. Les patients ont été sélectionnés sur la base d’une grande variabilité de l’indice de masse corporelle, ce qui nous a permis d’obtenir une grande étendue des valeurs de masse grasse. Les patients présentant des pathologies susceptibles d’entraîner des troubles de l’hydratation ont été exclus (insuffisance cardiaque, insuffisance rénale, insuffisance hépato-cellulaire, grossesse, prise de diurétique, corticoïdes, anorexigènes ou de neuroleptiques ou d’antidépresseurs). Pour chacun des sujets examinés, un examen corps entier a été effectué par absorptiométrie biphotonique à rayons X avec un matériel Hologic QDR/4500W (version 11.2.5).

La détermination de la masse grasse totale du corps entier peut également être obtenue à l’aide des ultrasons. En effet, les ultrasons permettent, notamment, la mesure de l’épaisseur de couches de graisse qui se trouvent entre la peau et le muscle. Une sonde émettrice réceptrice, émet, au travers de la peau, une onde ultrasonore dont une partie se réfléchit à l’interface graisse / muscle. Connaissant la vitesse de propagation des ondes dans la graisse et en mesurant le temps de parcours de l’onde (encore appelé temps de vol), il est alors aisé, par une relation affine, de calculer l’épaisseur de graisse. Nous avons sélectionné deux régions anatomiques préférentielles : la région abdominale qui reste liée aux facteurs de risques métaboliques (Von Eyben et al., 2003 ; Goran, 1999 ; Roemmich et Rogol, 1999) et à mi-cuisse au niveau des membres inférieurs (cf. figure 1). Les mesures ultrasons ont été menées avec un échographe de type A. L’absorption des ultrasons dépend de la profondeur de sondage mais aussi du carré de la fréquence des ondes transmises. En conséquence la graisse sous cutanée au niveau intra-abdominal et à mi-cuisse fut mesuré en choisissant une fréquence de 2.25 MHz avec un sonde linéaire. Le diamètre de la sonde de 0.75 pouces est le plus approprié en termes de positionnement, localisation, orientation, pression de contact. La répétitivité inter observateur des mesures d’épaisseurs de graisse par technique ultrasonore est bonne, la corrélation intra classe étant supérieure à 0,98.

            Les sujets on été mesurés selon la technique anthropométrique standard par le même opérateur. La stature, le poids, l’indice de corpulence (BMI), le périmètre de tour de taille passant par l’ombilic (cm), les périmètres à mi-cuisse droit et gauche (cm) ont été relevés. Les épaisseurs de graisse (mm) au niveau ombilical et à mi-cuisse des deux côtés furent relevés par une technique ultrasonore.

Pour les hommes comme pour les femmes séparément, le modèle mathématique utilisé pour estimer la masse grasse totale est une équation de régression linéaire par segments avec un point de rupture. L’appartenance des sujets à l’une ou l’autre équation linéaire est obtenue par une équation de régression multiple. L’analyse statistique des résultats a été réalisée au moyen du logiciel Statistica version 6.

 

Figure 1. Épaisseur de graisse sous-cutanée mesurée à mi-cuisse (flèche)

et au niveau ombilical dans la partie dorsale (flèche).

Figure 1. Thickness of subcutaneous fat to mid-thigh (arrow) and to umbilical level (arrow).

Résultats

Il convient de différencier les hommes des femmes, pour des raisons évidentes de morphologie et de répartition de la masse grasse totale. Les paramètres statistiques de la masse grasse totale DEXA, des épaisseurs de graisse sous-cutanée mesurées par ultrasons côtés droit et gauche au niveau dorsal et à mi-cuisse et des mesures anthropométriques sont indiquées ci-après (cf. table 1). Pour les hommes comme pour les femmes, le BMI et la masse grasse présentent une grande variabilité.

 

Variables

Femmes (44)

m ±s

Femmes

(min-max)

Hommes (56)

s

Hommes

(min-max)

Poids (kg)

73,5 ± 23,5

44,0 – 126,0

79,2 ± 17,3

44,2 – 131,0

Stature (cm)

160,8 ± 5,6

148,0 – 172,0

175,9 ± 7,4

160,0 – 193,0

BMI (kg/m2)

28,5 ± 9,0

17,4 – 50,5

25,5 ± 5,2

17,1 – 42,3

Masse grasse

DEXA (kg)

 

27,7 ± 15,1

 

7,5 – 65,1

 

16,4 ± 9,3

 

5,0 – 45,0

Epaisseur de graisse ombilicale (mm)

 

57,2 ± 23,9

 

9,0 – 99,6

 

50,2 ± 20,0

 

8,0 – 91,0

Epaisseur de graisse à mi-cuisse (mm)

 

24,3 ± 13,9

 

5,6 – 92,0

 

19,5 ± 6,7

 

8,0 – 45,0

Périmètre ombilical (mm)

 

93,6 ± 24,1

 

57,0 – 143,0

 

92,4 ± 15,7

 

65,5 – 137,0

Périmètre à mi-cuisse (mm)

 

53,4 ± 11,9

 

41,0 – 99,5

 

48,8 ± 6,6

 

36,5 ± 66,0

Table 1. Paramètres statistiques des mesures anthropométriques et des épaisseurs de graisse mesurées par ultrasons.

Table 1. Statistical parameters of the anthropometric measures and thickness of fat obtained by ultrasound.

 

Le modèle utilisé pour estimer la masse grasse totale est un modèle linéaire par segments avec un point de rupture estimé par convergence à 42 kg chez les femmes et à 22 kg chez les hommes. Nous obtenons ainsi deux équations distinctes selon que la masse grasse d’approche est inférieure ou supérieure ou égale au point de rupture (cf. table 2). La masse grasse d’approche est obtenue par une équation de régression multiple qui nous donne un classement correct des hommes et des femmes supérieur à 98 % de l’effectif total.

La technique ultrasonore associé au dimensions anthropométriques donne une prédiction de la masse grasse avec le modèle dont le R2 est de 0.990 et de 0.986 chez les femmes et chez les hommes respectivement avec une précision respectivement de 5% et de 7 % (cf. figure 2).

            A partir de la mesure de la masse grasse totale, nous avons effectué une estimation de la masse maigre selon un modèle à deux compartiments dans lequel le poids du sujet est la somme de la masse maigre et de la masse grasse. Sur l’effectif total (n=100), nous avons obtenu une forte corrélation entre l’eau corporelle totale (en litre) et la masse maigre (r = 0,963). Nous avons de plus vérifié la pertinence de cette mesure par dilution isotopique sur un nombre restreint de 12 témoins pour des raisons de coût et de disponibilité des sujets. En conséquence, l’eau corporelle totale peut être obtenue par l’équation de régression suivante :

Eau (en litre) = 0,692 masse maigre + 1,572 avec une précision inférieure à 7 %.

 

 

Femmes (n=44)

Hommes (n=56)

 

R2 = 0,990

R2 = 0,992

Point de rupture (kg)

42 kg

22kg

 

 

 

Constante

- 20,58

- 21,20

IMC (kg/m2)

0,947

0,221

Epaisseur de graisse ombilicale (mm) (côté gauche)

 

0,079

 

0 ,032

Epaisseur ombilicale (mm)

(côté droit)

 

0,0067

 

0,06

Périmètre ombilical (cm)

0,103

0,253

Epaisseur de graisse à mi-cuisse (mm)

(côté gauche)

 

-0,303

 

0,078

Epaisseur de graisse à mi-cuisse (mm)

(côté droit)

 

0,379

 

- 0,0128

Périmètre à mi-cuisse (cm)

0,072

0,073

 

 

 

Constante

242,53

- 10,88

IMC (kg/m2)

- 0,743

1,31

Epaisseur de graisse ombilicale (mm) (côté gauche)

 

- 1,73

 

- 2,69

Epaisseur ombilicale (mm)

(côté droit)

 

1,10

 

- 1,76

Périmètre ombilical (cm)

1,68

- 0,175

Epaisseur de graisse à mi-cuisse (mm)

(côté gauche)

 

- 3,35

 

10,33

Epaisseur de graisse à mi-cuisse (mm)

(côté droit)

 

2,62

 

8,91

Périmètre à mi-cuisse (cm)

- 4,95

- 0,123

Table 2. Résultats du modèle de double régression linéaire avec point de rupture en utilisant la masse grasse DEXA comme une variable dépendante.

Table 2. Results from piecewise linear regression with breakpoint using fat mass DEXA as dependent variable.

 

Figure 2. Estimation de la masse grasse totale (kg) mesurée par ultrasons et les dimensions anthropométriques à partir de la masse grasse DEXA chez les femmes et les hommes.

Figure 2. Body fat mass estimated by ultrasound and anthropometric dimensions versus body fat mass (DEXA) for women and men.


Discussion

Il est connu de tous que le poids d’un individu ne peut, à lui seul, suffire à traduire l’état général d’un individu. Par contre, la connaissance de la composition corporelle à travers l'eau corporelle totale, la masse maigre et la masse grasse totale permet une meilleure surveillance médicale du mode de vie, le dépistage de certaines maladies et le suivi rationnel de patients suivant des régimes diététiques. Cette connaissance ne peut donc qu’induire une réduction des coûts de santé publique.

Pour accéder à cette connaissance, nous proposons un appareillage basé sur une technique par ultrasons. Celui-ci répond à un cahier des charges prédéfini en collaboration avec différents spécialistes. Méthode transportable non invasive, non traumatisante et inoffensive pour le sujet comme pour l’utilisateur, et bien évidemment dont les informations sont fiables et reproductibles.

Quelle que soit la technique de mesure utilisée, la précision de la mesure de la masse grasse dépend de la variabilité de la mesure observée, sur un effectif hétérogène de témoins sédentaires (hommes et femmes séparément) dont on connaît la moyenne et l’écart type. Le pourcentage d’erreur est obtenu par la formule suivante : % d’erreur = 100 SEE / m où SEE représente l’erreur standard d’estimation ou encore l’écart type lié, soit s (1-r2)1/2 et m, la moyenne de la masse grasse de l’échantillon expérimental. La précision dépend donc à la fois du degré de liaison r et de l’écart type ou encore de la dispersion de la mesure.

À titre indicatif, nous avons représenté graphiquement les variations du % d’erreur en fonction du degré de liaison r obtenu entre la technique ultrasons utilisée dans notre étude et la technique de référence DEXA (cf. figure 3). Nous constatons que si nous souhaitons obtenir une précision de la masse grasse totale inférieure à 10 %, la valeur de r doit être supérieure à 0,982 et que pour une précision inférieure à 8 %, la valeur de r doit se situer au voisinage de 0,99.

 

Figure 3. Précision (en %) de la mesure de la masse grasse totale en fonction de la corrélation entre la technique utilisée et la technique DEXA.

Figure 3. Standard error estimate (% SEE) of the body fat mass according to the correlation between the used technique and the DEXA.

 

            La mesure indirecte de l’eau corporelle totale obtenue par bio-impédance est très bien corrélée à la mesure par dilution isotopique qui constitue une technique de référence. Cependant, avec un coefficient de corrélation compris entre 0,96 et 0,97, la masse grasse totale ne peut être déduite qu’avec une erreur comprise entre 13 et 15 %, voire parfois supérieure à 15 %. Cette technique de mesure par bio-impédance s’avère donc trop imprécise pour les études épidémiologiques par exemple.

La mesure de la composition corporelle permet d’établir de façon précise le degré d’obésité des sujets en fonction de leur sexe et de leur âge. L’obésité peut être définie comme un excès de masse grasse susceptible d’avoir des effets néfastes sur la santé. Elle est une maladie complexe qui augmente dans les pays développés et dont les prévisions au-delà de l’an 2000 sont inquiétantes. La prévalence de l’obésité a augmenté de 10 à 40 % dans la majorité des pays européens au cours de ces 15 dernières années. L’excès et la répartition du tissu adipeux, la prise de poids à l’âge adulte et la durée de l’obésité sont les quatre principaux facteurs prédictifs de la morbimortalité. Chez les adolescents, l’incidence du diabète insulinodépendant est environ 3 fois plus élevée chez les sujets obèses que les sujets non obèses. Cinquante à 80 % des sujets atteints de diabète de type 2 sont obèses. L’obésité est un facteur de risque de diabète insulinodépendant car elle est une des causes de la diminution de la sensibilité à l’insuline.

 

Conclusion

La réalisation d’un nouvel appareillage portable pour la mesure de la composition corporelle par une technique ultrasonore nous a permis de déterminer, avec l’introduction de données anthropométriques, la masse grasse totale, puis la masse maigre chez des sujets sédentaires et, ceci, avec une excellente liaison (r > 0,992) par rapport à la technique de référence DEXA reconnue au plan international. Nous disposons désormais d’un dispositif portable, non traumatisante, inoffensif et à coût réduit donnant une mesure fiable et reproductible de la masse grasse corporelle totale ainsi que de l’eau corporelle totale. Cet appareil ne présente absolument aucun risque tant pour le témoin que pour l’utilisateur.

L’ensemble des données relatives à la composition corporelle, combinées avec le profil clinique et psychologique des patients, contribuera à l’amélioration de leur santé et aussi de leur qualité de vie. Sur le plan épidémiologique, nous souhaitons intégrer la masse grasse, indicateur beaucoup plus précis et significatif que l’indice de masse corporelle comme paramètre accessible et prendre en considération les interactions de celle-ci avec les paramètres biologiques classiques en vue d’une meilleure évaluation du risque et d’un suivi médical préventif.

 

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