Susanne, C., 2004, L'enseignement de la biologie et de l’évolution (humaine) en péril? Antropo, 8, 1-31. www.didac.ehu.es/antropo


Document pour le débat

L'enseignement de la biologie et de l’évolution (humaine) en péril?

The teaching of biology and (human) evolution in danger?

Charles Susanne

 

Free University Brussels. Pleinlaan, 2 , 1050 Bruxelles, Belgique. Email : scharles@vub.ac.be

 

Mots clefs : évolution, humanisme, fondamentalisme, créationnisme

 

Key words : evolution, humanism, fundamentalism, creationism

 

Préalable

Dans l’enseignement secondaire belge, mais aussi dans mon propre enseignement universitaire (d’une université libre-exaministe!), certains étudiants réagissent à l’enseignement de l’évolution, en particulier de l’évolution humaine. Dans certaines écoles bruxelloises, des élèves refusent de suivre le cours de biologie.  Il me semblait donc utile d’examiner ces réactions. Naturellement, il s’agit d’un problème de société plus large,d’un regain de fondamentalisme présent dans différentes religions et loin d’être limité à l’exemple classiquement choisi des états-Unis.Il me semble utile d’analyser les positions religieuses actuelles vis-à-vis de l’Évolution en général, et de l’évolution humaine en particulier.

Cet article a pour but d’examiner les liens entre religions et enseignement  de l'évolution, il se veut avant tout informatif, objectif, non polémique, mais en même temps il s'agit de la défense d'une éducation à caractère séculaire, nécessaire au maintien ou au développement de nos démocraties.

Je souhaite  que vous considérerez cet article comme un document de travail et comme un article ouvert au débat; vos commentaires, vos exemples nationaux, vos suggestions, vos critiques seront les bienvenus. ANTROPO sera heureux de les publier. 

 

 Résumé 

Dans les débats concernant  l’évolution, il est important d’observer que ces débats sont d’origine religieuse ou politique, mais qu’ils ne sont pas scientifiques. La majorité des religions présentent des histoires sur l’origine de l’Homme et des animaux . L’évolution s’oppose à cette lecture littérale de ces histoires et pour cette raison les responsables religieux s’opposent aux principes de l’évolution

Les sciences sont une condition nécessaire à l’humanisme.  Nous y incorporons la nature sans la rendre sacrée, reconnaissant que nous sommes libres et responsables de donner un sens à notre existance. Nos étudiants eux aussi doivent être encouragés à raisonner de manière non-dogmatique.

Cependant, tous les intégristes (chrétiens, juifs, musulmans) considèrent cette liberté comme dangereuse et même comme un instrument du diable: sécularisation et démocratie doivent être combattues. Nous pensons, au contraire que dans sociétés (de plus en plus) multiculturelles l’humanisme séculaire doit être notre but culturel et moral, une philosophie basée non plus sur des vérités révélées mais des règles morales élaborées universellement.

Nous aborderons les points de vue actuels des religions catholiques, protestantes, orthodoxes, juives et musulmanes sur les concepts d’évolution, en replaçant ces points de vue dans une perspective plus globale de l’anthropologie des religions et en se concentrant sur la situation européenne où des tentatives existent de supprimer l’enseignement de l’évolution. Les écoles publiques doivent continuer à enseigner les sciences ; les sciences paléontologiques ne sont ni bonnes ni mauvaises, elles sont ce qu'elles sont et ont été rigoureusement testées par la communauté scientifique.  Ce n'est pas aux religions de dire et d'imposer ce qui peut ou ne peut pas être enseigné.  Ne laissons pas imposer l'ignorance.

 

Summary 

In debates around evolution, it is important to see that these debates are of religious or political origin, not scientific.  The majority of religions present histories on the origin of men and animals.  Evolution is opposed to a literal lecture of those histories and for this reason religious leaders are opposed to evolution.

This paper has been written to study the actual links between different religions and education of evolution.  It does not intend to be polemic, but only to be informative.  However, at the same time it is a defence of secular education, necessary for the development of democracies.

Science is a necessary condition for humanism.  We incorporate nature without making it sacred, recognising that we are free and responsible to give meaning to our existence.  Students must be encouraged to give shape to their lives in a non-dogmatic way.

However, all integrists (Christian, Jewish and Muslim) consider freedom as dangerous and even as an instrument of the devil.  Secularisation and democracy are concepts to be fought.  We, on the contrary, think that in our (more and more) multicultural societies secular humanism is the actual cultural and moral challenge, a philosophy based not on revealed truths but on universally elaborated moral rules.

 

"C'est la destinée de l'homme que de se faire des dieux toujours plus croyables auxquels il croira de moins en moins"

Jean Rostand  (1894-1977)

"Douter de tout ou croire en tout sont deux solutions faciles, qui dispensent de la nécessité de la réflexion"

Henri Poincaré (1860-1934)

 

Religion et société

Rappelons en premier ce qu’est l’Évolution : l'évolution biologique (dans le sens macro-évolutif) peut être définie de manière générale comme un processus continu de modifications des êtres vivants, celles-ci sont progressives et ont produit au cours des ères géologiques l'énorme variabilité de formes et d'espèces, actuelles et éteintes.

Bien que le concept d'évolution apparaisse comme universellement accepté, son application stricte à notre espèce s'accompagne de polémiques et fait souvent l'objet de débats. Une idée simpliste et très répandue est qu'il existe une force qui mène nécessairement à l'apparition de l'Homme. Cependant, les restes fossiles humains découverts jusqu'à présent indiquent que notre histoire biologique n'a pas été une simple progression linéaire. Notre processus évolutif, comme celui des autres êtres vivants, a été complexe et ressemble plus à un arbre touffu qu'à une simple échelle ascendante (Tattersall, 1998).

Dans les débats concernant l'évolution, il est important de noter qu’ils sont actuellement d'ordre religieux ou politique plutôt que scientifique. La majorité des religions présentent des mythes  sur l'origine de l'Homme et des animaux.  Le concept de l'évolution s'oppose à la lecture littérale de ces mythes et c'est donc pour cette raison que de nombreux dirigeants de ces religions s'opposent à ce concept

La mort a toujours torturé la psyché des Hommes, et certainement des premiers Hommes: l'incompréhension face à ce phénomène naturel était totale et les Hommes ont créé des solutions imaginaires afin d'apaiser leur esprit et de se donner un certain réconfort.  Des divinités furent donc créées ainsi que des cultes funéraires et des rites initiatiques.  Les premiers Hommes ont vénéré de manière chamaniste, c’est-à-dire en relation avec des esprits surnaturels, les forces de la nature, le feu ou le tonnerre, pour apaiser la colère des dieux.  La religiosité, en fait une forme de sentimentalisme religieux de la vie, donnait aux pratiquants l'espoir d’un avenir meilleur.  Si un dieu existe, il existe pour nous consoler de la douleur qu’il y a parfois à vivre. Il faut donc croire en un dieu et une vie après la mort pour ne pas désespérer de la vie humaine. À quel moment se sont développées les pratiques symboliques ?

"La pensée religieuse représente un rapport à l'au-delà : à l'origine, elle correspond globalement au polythéisme où l'animal occupait souvent un statut divin.  Dans les balbutiements de religiosité, l'animal que l'on chasse (ou qui chasse l'homme), prend place dans les croyances et dans les symboles.  Depuis le Paléolithique, le culte de l'animal s'organise autour de l'activité de la chasse.  La nature peut aussi bien être amie qu'ennemie, elle donne la vie et peut la reprendre.  Au Néolithique, lorsque l'Homme domestiqua les animaux et cultiva la terre, une bonne production dépendra de différentes conditions, notamment météorologiques.  Il envisagera des forces supranaturelles et des divinités responsables de la bonne marche de son agriculture.  Le chasseur-cueilleur se sédentarise, l'animal perd de son essence sacrée, les forces naturelles deviendront prééminentes, l'Homme crée des divinités à son image" (Susanne, 2003).

Les cultes relativement désorganisés évoluent donc vers des divinités plus anthropomorphes.  Les chamans, sortes de sorciers qui sacralisent la Nature, évoluèrent en prêtres, ou ministres d’une religion.  Les religions organisées sur un concept de divinités anthropomorphiques ayant des sentiments humains et ayant créé l'Homme à leur image, développent un aspect identificateur et ont souvent des intérêts économiques qui vont engendrer des conflits dévastateurs. Les monothéismes poussèrent à l'extrême la notion d'identité et  ont souvent permis l’opposition des peuples par un  même mécanisme psychologique, la peur, et donc un besoin de sécurité, symbolisé par un dieu. 

L'art, comme aspect de rituel et de croyance surnaturelle, remonte à au moins 40.000 ans.  Les peintures rupestres effectuées par l’Homo sapiens du Paléolithique supérieur ont probablement joué un rôle magique et religieux dans le contrôle et la vulnérabilité de la (méga)faune pléistocène.  Les Vénus, représentations féminines dessinées ou sculptées, pourraient également avoir un symbole religieux.  Il est probable que ces mêmes groupes humains  aient utilisé musique, danse et peintures corporelles.  Il s'agit de moyens d'exprimer des sentiments et des émotions, ainsi que des communions avec les esprits supérieurs.  La présence de l'art se retrouve dans les cultes plus récents également.

Déjà en 1871, sir Edward Tylor, un anthropologue anglais, démontrait que la croyance en l'âme est présente sous l'une ou l'autre forme dans toutes les sociétés, il lui donne le nom d'animisme.  L'animisme est la croyance que, dans des corps visibles, il existe un être invisible, l'âme.  Le principe de l’existence de l'âme conduit en une série d'êtres surnaturels incluant des âmes d'animaux, de plantes et d'objets matériels ainsi que des dieux, démons, esprits, diables, fantômes, saints, gnomes, anges, fées, etc.

Dans chaque société, la religion et la doctrine des âmes donnent une signification à la vie et à la mort, mais ont aussi une multitude de fonctions économiques, politiques et psychologiques.  Toutes les sociétés ont des traits culturels que les anthropologues identifient souvent comme une religion.  Les sociétés différencient souvent les phénomènes naturels et supranaturels, même si la distinction peut être source de discussion : ce qui est considéré comme supranaturel par la plupart d'entre nous, pourrait être considéré comme naturel par des religieux dévots ou par d’autres cultures.

Selon Durkheim, sociologue français (1858-1917), l'Homme né et nourri par une société et une culture, dans son respect du sacré, exprime de manière symbolique sa dépendance à cette société.  Chaque société a donc ses croyances sacrées, ses symboles et rituels, opposés aux événements profanes.  Lorsque des personnes se sentent en communion avec des forces occultes et mystérieuses et des êtres surnaturels, elles communient avec la vie sociale.

Naturellement, les systèmes de croyances, et les rites qui y sont liés, sont hautement variables.  A. Wallace, naturaliste anglais (1966) a proposé de classer cette variabilité en 4 catégories: (1) cultes individualisés : chaque personne est en relation avec des forces animistes et/ou des forces surnaturelles.  Peu de sociétés, si ce n'est quelques chasseurs-cueilleurs du Paléolithique Supérieur, y correspondent; (2) cultes chamanistes: le terme chaman désigne un homme de culte qui sacralise la Nature et qui est consulté en temps de stress et d'anxiété, le terme se réfère à des individus agissant comme devins, magiciens, médiums, etc.; (3) cultes communs: les pratiques rituelles y deviennent plus complexes et élaborées, des groupes organisent ces rites pour leur propre bien-être et pour la survie de la société; (4) cultes ecclésiastiques: il s'agit de cultes communs mais qui impliquent dans ce cas un clergé professionnel lié à une religion, qui forme une bureaucratie souvent associée au système politique au pouvoir.

L'importance de l'économie politique, comme déterminant de rituels et de croyances religieuses, est particulièrement évidente dans les religions ecclésiastiques : les prêtres permanents, les temples monumentaux, les processions-cortèges, les rites élaborés, sont incompatibles avec les économies de chasseurs-cueilleurs. C'est dans ces religions, et particulièrement dans les sociétés où les différences sociales sont élevées, que les dieux sont supposés être intéressés aux pensées morales individuelles et imposent des comportements estimés éthiques.

Chaque religion conçoit détenir la vérité absolue : les revendications contradictoires de la vérité engendre des oppositions fondamentales entre ces religions. Les religions ecclésiastiques deviennent universelles et aptes au prosélytisme,  puisqu'elles tendent à s'appliquer à l'ensemble du monde. C'est le cas des religions chrétiennes, islamiques, bouddhistes et hindouistes, qui ont aussi en commun amour et charité.  La charité ne signifie d'ailleurs pas que l'on blâme les riches de la misère des pauvres.

Les récits de création des différentes religions veulent expliquer certains phénomènes naturels et les mettent en relation avec une volonté divine, y donnant donc un caractère sacré. Les religions sémitiques (chrétiennes et islamiques) donnent une image linéaire de la création, dieu créant le monde à partir du néant. Les religions hindoues (hindouisme, bouddhisme) donnent une image plus cyclique. Même si les croyances sont extrêmement variables de par le monde, y compris sur la vie elle-même considérée soit comme unique par la tradition judéo-chrétienne et islamique soit multiple par la tradition hindoue et bouddhiste, toutes les religions favorisent un certain ordre dans la société et y donnent un sens.  Cela a été le cas tout au long de notre histoire particulièrement dans des sociétés socialement stratifiées, où l'élite pouvait invoquer l'autorité religieuse pour contrôler les couches sociales moins élevées et maintenir des inégalités économiques et politiques.

Ainsi, par exemple, dans l’Afrique du Sud de l’apartheid, l’église réformée (Dutch Reformed Churches) imposait ses vues et utilisait le darwinisme social pour justifier la politique de discrimination raciale. Elle était créationniste, avec un dieu créateur de toutes choses, et imposait ses idées dans l’enseignement. Après l’abolition de l’apartheid , ces églises se sont tournées vers un christianisme plus moderne, où les théories de l’évolution n’étaient plus taboues.

Malgré leur variabilité, les religions conçoivent toutes le monde peuplé de dieux, d’esprits, de diables.  Elles ont des rituels autour desquels les croyants se rassemblent, des traditions et des rituels contrôlés par des prêtres.  Les fidèles expriment leurs religions par des croyances, des symboles et la lecture de textes sacrés, considérés comme des mythes lorsque l'on n’adhère pas à cette religion. Certains pensent que leur propre religion possède des textes sacrés, et que les autres ont des mythes!  Des rites de passage et des rites d’identification existent aussi contribuant à la solidarité sociale, à l’intégration et à la santé psychique.

Les phénomènes religieux sont donc universels et remontent à l'origine de notre espèce.  Bien entendu, aucune de ces religions n'est supérieure ou plus évoluée qu'une autre.  Les anthropologues s'intéressent en fait à leurs fonctions et à la manière dont elles donnent un sens à la vie humaine, réduisent l'anxiété sociale, contrôlent les destinées humaines et expliquent l'environnement physique.  Les religions fournissent donc une cosmologie, qui est un ensemble de principes et de croyances sur la nature de la vie et de la mort, la création de l'univers, l'origine de la société, la relation entre l'Homme et la nature.

En définissant la place de l'individu dans la société et en établissant des codes moraux, les religions aident à la définition d'une identité personnelle et surtout aident des personnes en difficulté à stabiliser leur personnalité.  Elles contribuent donc à la survie de la société.  Au niveau des activités humaines, les religions sont supposées en assurer le succès : prières, sacrifices, rites ou magies auraient l'intention d'aider une personne particulière ou une communauté.  Naturellement, ces prières et ces rites ne fonctionnent pas, dans le sens scientifique des résultats, mais peuvent de manière indirecte aider à réduire l'anxiété des personnes.  Ces prières peuvent être un besoin de spiritualité, une échappée de la réalité, un espoir de futur glorieux, une recherche de vie meilleure, une échappatoire aux frustrations et aux ressentiments: elles peuvent donc contribuer indirectement au maintien de l'ordre social.

 

Science: une condition nécessaire a l'humanisme

Si les gènes sont les unités de l'information et de transmission de caractères biologiques, un autre ordre d'unités d'information et de transmission culturelles est appelé les mèmes.  Ils peuvent se répliquer par des vecteurs culturels, l'évolution culturelle étant basée sur une sélection culturelle, des migrations, de la diffusion, de la dérive culturelle.  "Theistic memes, in general, are memes that regulate individual or collective behaviour, including sexual practices and life style rules (ethic rules) beneficial to the group's successful survival under the challenging external environments (both natural and cultural)".  "Providing easy explanations to existential questions, softening the fear of death, and keeping social webs compact through the provision of various sets of rules and practices, religions crucially contributed to the survival success of populations" (Simitopoulou et Xirotiris, 2004).

La foi est donc le lot de toutes les sociétés, elle est souvent accompagnée de croyances superstitieuses dont le but est de donner un sens à la vie et à la mort.  Malgré le succès de certains mèmes religieux, les religions ont commencé à donner des signes d’affaiblissement  lorsque les découvertes scientifiques se sont développées.  Toutes les religions ont dû subir de profondes adaptations, les éloignant de leurs principes fondateurs.  Seuls les orthodoxies, conformes à la doctrine d’une religion  et les fondamentalismes, attachés à des doctrines qui refusent toute Évolution et conservent leurs traditions,   voyant le monde les dépasser, veulent rester proches des fondements de leur religion et réagissent  de manière violente.

Dans nos sociétés occidentales, le pluralisme religieux est de règle. Ce pluralisme peut aboutir à différentes réactions, celles du fondamentalisme (L. Kaplan, 1992), qui trouve son origine dans les années 1920 dans une défense des fondements des religions chrétiennes (accompagnée d’un sentiment de crainte vis-à-vis de la modernité, de la sécularisation, du pluralisme)[i], celles du « New Age » (Hanegraaf, 1996) qui reprend des croyances de différentes religions ce qui en fait une sorte de « bricolage » spirituel (la recherche du bien-être spirituel par la macrobiotique, des thérapies de danse, des amulettes, des méditations, du sjamanisme, …) et celles de l’athéisme qui analyse de manière critique les sentiments religieux et prône une sécularisation radicale.

Les méthodes appliquées au développement de la connaissance scientifique se basent sur des explications matérielles, sans implications transcendantales, c’est-à-dire sans faire appel à un principe extérieur et supérieur. Les scientifiques, quelles que soient leurs croyances métaphysiques ou religieuses, rejettent toute explication supranaturelle.  La connaissance scientifique fait partie de l'héritage commun de l'humanité.

Du point de vue scientifique, un dialogue avec les religions ne s'impose pas, car science et religion doivent être totalement séparées,comme l'Etat et les religions. Ne devons-nous pas nous alarmer cependant quand l’islam, ou certaines tendances islamistes, refuse actuellement l’enseignement de la biologie, quand le fondamentalisme se manifeste des états-Unis à la Russie, quand le pape actuel, Jean-Paul II,  exhorte les scientifiques catholiques à élaborer des projets scientifiques qui permettent toujours "la présence divine" ?

Il faut réaffirmer la liberté de transmission des connaissances et celle de se développer à l'abri de toutes autorités religieuses.  Religions et sectes ne doivent pas interférer avec l'enseignement des sciences.

Il nous faut rappeler aussi que la laïcisation du pouvoir politique, les valeurs modernes revendiquées par les Lumières ( le siècle des Lumières,1715-1778), la Rationalité, la Tolérance  (ou le respect des libertés par Voltaire), la liberté d'expression, les droits de l'Homme, la démocratie sont des conquêtes arrachées petit à petit au pouvoir des églises (Joly, 2003). Naturellement, si la science a apporté le progrès et si les religions ont été amoindries  il est vrai que la réflexion philosophique reste nécessaire. Dans nos sociétés, il y a probablement un manque de réflexions sur le futur et les valeurs de nos sociétés, le devenir de l’Homme, manque qui peut aboutir à l’irrationnel. Prôner les droits de l’Homme et le droit à la différence ne nous libère pas des discussions philosophiques.

Je crois que l'on peut dire comme Voltaire (1684-1778) "je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites mais je me battrai pour que vous puissiez l'exprimer".  Mais, je crois qu'il faudrait pouvoir dire en même temps "tout individu a la liberté d'exprimer ses idées et d'avoir des convictions, mais si je suis persuadé que ces idées mettent en cause les droits de l'Homme, je me sens obligé à combattre ces idées".

L'humanisme séculaire, doctrine qui a pour objet le développement des qualités de l’Homme, est central dans le challenge culturel et moral actuel, et correspond à une philosophie qui peut être partagée au-delà de nos barrières et au-delà des religions.  Les règles morales doivent se baser non plus sur des vérités révélées, mais sur des règles universelles élaborées démocratiquement.  C'est particulièrement le cas en termes d'évolution humaine où des règles doivent s'élaborer en dehors des différentes formes d'intégrisme. Pour tous les intégrismes, l'Homme est condamné à faire un mauvais usage de sa liberté: il faut donc l'enfermer dans des contraintes et des lois restrictives. Ceci s’applique particulièrement à la femme, puisque, suivant l'option intégriste de femme au foyer, elle doit être soumise à l’autorité masculine et elle est garante de l'éducation des enfants.  Dans ces conditions, laïcité et même démocratie sont des concepts à combattre.  L'humanisme est vu comme l'instrument de Satan par tous les fondamentalistes chrétiens, juifs et musulmans.

 

L'évolution (humaine) dérangeante?

Les découvertes scientifiques s’accompagnent parfois de messages inquiétants pour l’ordre social et souvent pour les religions. Depuis la Renaissance au xvème et xvIème siècles  ou pendant  le siècle des Lumières au XVIII ème siècle, l’Europe n’est plus le centre du monde, la terre n’est plus le centre de l’univers, l’homme a évolué comme le reste du monde vivant, tous les organismes vivants possèdent le même code génétique, notre « si spécifique » génome humain est pour plus de 99 % similaire à celui du chimpanzé, pour plus de 90 % à celui de la souris et pour 50 % avec celui des bananes ; de plus,  les recherches neurologiques actuelles analysent, même partiellement, ce que nous croyons être la conscience et la personnalité.

Des résistances, des réactions défensives, conservatrices ou réactionnaires continuent à exister contre l’évolutionnisme, et surtout contres ses conséquences, à savoir  l’appartenance de l’homme à la nature, et  le fait que l’homme est le produit aléatoire d’une évolution très longue. 

L'évolution n'est, bien entendu, aujourd'hui plus une théorie parmi d'autres.  Il est tout à fait déraisonnable de la comparer et de la mettre sur pied d'égalité avec des textes, considérés par certains comme "sacrés".  Dans l'esprit de ces personnes, ces textes sont considérés littéralement et donc les espèces vivantes sont considérées comme immuables depuis leur création.  Pour ces personnes donc, il est plus facile de garder les anciens mythes et de considérer que l'homme continue à être au sommet du règne vivant et au centre géographique de l'univers.

Plus difficile est d'accepter que l'homme ne soit qu'une espèce animale parmi tant d'autres, qu'il n'est pas de nature fondamentalement différente des autres espèces animales, mais qu’il est  une espèce qui, de plus, ne représente qu'une infime partie de l'ensemble de l'histoire de l'univers (quelques millions d'années par rapport à des milliards d'années).  Difficile, en effet, de transformer l'image que nous avons de nous-mêmes tout au long de notre histoire. Difficile aussi de garder une réelle ouverture d’esprit et de ne pas avoir de préjugés lorsque les études biologiques de la nature humaine peuvent être considérées comme une menace pour nos croyances.

Avant Darwin (1809-1882), il y avait peu de raison de douter des écrits bibliques sur l’origine de l’Homme.  La bible était considérée comme l'ouvrage historique de référence d'une "philosophie sublime" (Bossuet, 1681).

Ne revenons pas jusqu'à Darwin et "l'Origine des espèces" (1859)[ii], cet ouvrage a été publié à une période où la plupart des personnes étaient opposées de manière véhémente à la théorie de l'évolution, considérée par beaucoup de chrétiens comme offensante et en conflit direct avec la Création décrite dans la Genèse, premier livre comprenant le récit de la Création.  Les chrétiens considéraient que si les hommes étaient apparentés aux animaux ou qu'ils avaient un ancêtre commun avec les grands singes, cela défiait l'existence même de dieu.

à Oxford, à la réunion annuelle de la British Association en 1860, un débat oppose Thomas Henry Huxley, défenseur du transformisme, à l'évêque d'Oxford Samuel Wilberforce, vice-président de l’association.  Après avoir corrigé les erreurs scientifiques de Wilberforce, Huxley ajouta qu'il préférait être apparenté à un singe qu'à un humain à l'intelligence éprouvée mais faisant usage de son cerveau pour dénaturer la vérité.  Dès lors la "bataille" était engagée, les évolutionnistes ne tolérant plus une église mal informée.  Huxley, dénommé le "bouledogue de Darwin", fit beaucoup pour promouvoir le concept d'évolution dans le grand public mais aussi pour obtenir qu'un enseignement scientifique soit instauré en Angleterre en soulignant son importance à tous les niveaux d'enseignement.

Il existe aujourd'hui encore une sorte de refus de connaissance de nos origines chez les anti-évolutionnistes, qui place les créationnistes parmi les opposants à la science les plus fréquemment rencontrés dans nos sociétés.

Il s'agit d'un problème réel d'éthique de société, lorsque des enquêtes d’opinion montrent par exemple que 50% des Américains refusent actuellement de considérer l'évolution humaine et l'origine de l'espèce humaine à partir d'autres primates et mammifères.

Les créationnistes refusent donc tous les acquis de la biologie post-darwinienne.  On pourrait considérer que cette attitude appartient au passé. mais cependant, dès 1972 le "Institute for Creation Research" était créé utilisant la bible comme livre de référence à leur "science" [iii]. Internet semble être un de leurs modes de diffusion favoris (X11), un moyen pour atteindre un large public non formé aux sciences.

Le débat est donc encore d’actualité, même si les biologistes considèrent l'évolution comme un fait définitivement acquis et que la majorité des chrétiens ne croient pas que les descriptions bibliques doivent être prises de manière littérale.  Malgré tout, des enquêtes montrent que beaucoup de citoyens croient encore aujourd’hui que l'évolution n'a pas eu lieu, et que seul le Créateur est à l’origine de l’Univers et de  l’humanité.

Il y a de nombeuses raisons pour cela, éducationnelles et religieuses.  Au niveau éducationnel, pour comprendre les mécanismes de l'évolution, cela exige d’appréhender des notions de génétique et de biologie, que la plupart des individus ne possèdent pas.  De plus, les sciences ne donnent pas de réponses définitives. Au niveau religieux, la plupart des personnes, quelle que soit leur culture, sont éduquées dans des systèmes de croyance qui n'offrent pas d'explications sur les changements biologiques avec le temps.  La relation entre science et religion n'a jamais été simple, les sciences étant basées sur des analyses de données et leurs interprétations, les religions sur un système de croyances impossibles à tester et basées sur la foi.

Si l'on essaie d'évaluer les concepts dans l'approche de l'évolution, et spécialement de l'évolution humaine, par des individus rationnels n'ayant pas une illumination de grâce divine, on peut trouver une vue globale et mondiale d'arguments séculaires, mais pas antireligieux.  Une société séculaire doit se baser sur des arguments scientifiques rationnels sans se lancer dans une quête inquisitrice visant à imposer des points de vue de nature religieuse.  Le système séculaire public ne peut que respecter ces pensés rationnelles et ne peut imposer l'orthodoxie de communautés religieuses particulières.  Dans une société multiculturelle, la paix impose d'utiliser les argumentations rationnelles.  Au contraire, les argumentations religieuses se distinguent en se fondant sur la certitude de vérités morales transcendantales, et pour cette raison elles sont souvent difficiles à comprendre en termes rationnels généraux.  L'opposition des témoins de Jéhovah, secte apocalyptique, à la transfusion sanguine en donne un bon exemple ; elle est basée sur des passages bibliques interdisant de manger du sang ou de la viande pleine de sang, et elle est aussi la base de la tradition juive du kasher.

En termes de paléontologie humaine, on peut considérer que "la science n'a pas de valeur morale", si ce n'est celle de la recherche de la rationalité.  Ce n'est plus le cas pour la plupart des autres sciences biologiques qui se trouvent engagées dans de nombreux aspects de sciences appliquées et où des intérêts économiques sont de plus en plus déterminants.  Mais en terme d'évolution humaine, seule la connaissance doit être considérée comme ayant une valeur, et les seules oppositions viennent de certains religieux qui considèrent cette connaissance comme dangereuse.  Des conséquences négatives, comme le mysticisme et les comportements racistes proviennent de la méconnaissance de la biologie humaine.  La qualité de nos démocraties dépend donc de cette meilleure connaissance des sciences en général, de la biologie et de l'évolution humaine en particulier.

Dans les livres scolaires, européens en tous les cas, la préhistoire est décrite de manière uniforme. On parle, en effet, des hommes paléolithiques comme de nos premiers ancêtres vivant dans une nature hostile et très froide, ils sont entourés de prédateurs féroces, lions, ours, hyènes, ...  Les descriptions sont caricaturales, et permettent de ne pas se poser trop de questions philosophiques. Peu de textes abordent l'ensemble de l'évolution des primates, la séparation des Pongidés vers 7 millions d'années et l'apparition des premières populations d'australopithèques vers 5 millions d'années.  On préfère parler des populations d'Homo sapiens sapiens  vers 40.000 ans , en se limitant à l'Europe et en ne citant pas les Homo sapiens africains de 150.000 ans.

Récemment en Europe, des tentatives d’interdire l'enseignement de l'évolution se font jour.  Ainsi, début 2004, le gouvernement italien (de Berlusconi) a déposé une proposition d'abolition de l'enseignement de l'évolution des programmes des écoles secondaires [iv].  L'attitude anti-scientifique est flagrante, il s'agit donc d'une censure culturelle teintée de contraintes philosophiques[v].

Cependant, d'une façon générale en Europe, l'opposition croyants chrétiens / incroyants semble révolue.  Les croyances religieuses étant en déclin, nous sommes actuellement souvent confrontés à une nébuleuse mystico-ésotérique qui est une porte ouverte à toutes les crédulités.

 

Croyances religieuses en declin en europe?

La réalité de l'Évolution ne représente plus un sujet de discussion dans la biologie moderne, le problème est considéré comme acquis.  Seuls les créationnistes continuent à considérer que les espèces ont été créées séparément par Dieu et sont restées immuables, l'adaptation des êtres vivants étant due à la divine providence.  On ne se trouve donc plus dans le domaine scientifique mais dans un cadre religieux. Cependant, beaucoup de chrétiens non fondamentalistes considèrent par ailleurs qu'il n'y aurait pas conflit entre la théorie de l'Évolution et la foi religieuse (S.J. Gould, 1997). Mais, comme le signale R. Dawkins (2004), ces religions n’admettent pas une critique scientifique à leurs analyses de l’existence, domaine scientifique par excellence.

D’autre part,  en Europe occidentale, les croyances, les rites et les institutions religieuses sont affaiblies.  Si le christianisme reste la principale religion, le nombre de personnes se proclamant catholiques a diminué d'un tiers pendant les quinze dernières années.  Parmi les étudiants actuels de l'université catholique de Louvain, seuls 14% assistent encore à la messe et 83% ont par ailleurs une image négative de l'Eglise ; les dogmes ont disparu et une grande majorité ne croit ni à la sésurrection, ni à la virginité de la Vierge, ni surtout à l'infaillibilité du pape.  La mainmise de la hiérarchie religieuse est de plus en plus mal acceptée.  Aux état-Unis, 57 % des personnes en 2000 estiment que la bible représente littéralement la vérité, alors que ce chiffre est beaucoup moins élevé en Europe, 11 % aux Pays-Bas par exemple en 1994. La croyance religieuse continue à reculer en Europe : ainsi en France une enquête d’opinion de 2003 révèle que 47% des individus estiment que, plus la science progresse, plus il est difficile de croire en Dieu, et 39% pensent qu'il n'y a absolument rien après la mort.. Nous vivons dans une période d’abondance de moyens matériels, la vie est donc matériellement plus facile et nous nous attachons beaucoup plus à profiter de la vie, la destinée terrestre devient donc plus importante que celle du paradis.

En Europe, surtout à l’Ouest, mais peut-être seulement en Europe, les analyses portant sur les grandes églises dominantes, catholiques, luthérianistes, calvinistes, montrent le recul de la pratique religieuse.  En Espagne par exemple, une analyse de 2002 (CIS,centro investigationes Scientificas) révèle que 80 % des espagnols se déclarent catholiques, du moins socialement ou culturellement : en effet 60 % de ceux-ci n’ont jamais participé à une activité religieuse. Plus généralement, 56 % des espagnols se déclarent non religieux (75 % si l’on considère les moins de 35 ans). En Belgique, en 2000, 36.8% des Belges se déclaraient non religieux, la pratique hebdomadaire du culte diminue de 0.8% par an nous amenant à moins de 10% en 2002 (4% pour les moins de 29 ans), 63% répondent que l'Eglise n'est pas légitime pour les problèmes familiaux et 60% pour les problèmes moraux (Dartevelle, 2001). 

Le catholicisme belge en particulier , et ouest-européen en général, se distancie de plus en plus de l'église - institution, d'une autorité "extérieure" perçue comme éloignée des réalités humaines.  Les catholiques ne sont plus dogmatiques, ils sont soucieux de tolérance et prônent les droits de l'Homme.

Notre société européenne, surtout à l’Ouest,  est donc de plus en plus déchristianisée, elle n'est pas athée ou irréligieuse, car beaucoup recherchent un sens à la vie.  Et donc, une spiritualité de substitution apparaît, une "orientalisation" mêlée d'ésotérisme, d'astrologie, de spiritisme, d’écologisme, de techniques psycho-corporelles, c’est-à-dire un « bricolage » spirituel, y compris dans des dérives sectaires, sans théisme (doctrine qui affirme l’existence de Dieu et son action providentielle sur le monde) et sans déisme.  Mais, une absence de rationalisme aussi !  Dans une enquête d’opinion de 1993, 59% des Français croyaient en la transmission de pensées, 46% aux signes astrologiques, 18% à la sorcellerie.  La croyance en un au-delà de la mort s'accompagne d'un taux élevé de croyance aux parasciences (25% imagine une réincarnation ou 47% une autre vie dans l'au-delà).  La pratique de l'occultisme ou des "sciences parallèles", comme l’alchimie, la cartomancie, l’astrologie,  conduisent  à des asservissements mentaux et des nuisances perverses. Cette absence de rationalisme conduit  aux fausses sciences et à la para-science, et il est donc prioritaire que notre enseignement persiste dans l'apprentissage du rationalisme.

Le constat de l'augmentation du savoir, en qualité comme en précision et en efficacité, reste de rigueur, même si on n’adopte pas la doctrine du Progrès, et donc de l’évolution de l’humanité vers une terme idéal. La conviction gnostique se distingue donc de la foi religieuse : "le croyant gnostique croit qu'il sait, alors que le croyant religieux sait qu'il croit" (Taguieff, 2001).  "L'humanisme, selon l'esprit des Lumières, consiste à exalter dans l'homme, le pouvoir de produire du neuf, d'inventer, de créer, de commencer, de rompre, de s'arracher, donc d'engendrer lui-même le proprement humain".  Le progrès voudrait que les obstacles (préjugés, erreurs ...) soient voués à disparaître avec le temps.  "Les mésusages politico-militaires du savoir scientifique ne constituent pas un argument contre la science.  La liberté de la recherche scientifique est inséparable de la liberté de pensée : elles doivent être défendues, préservées et illustrées l'une avec l'autre" (Taguieff, 2001).  En paléontologie humaine, le retour global aux ténèbres nous est interdit, la connaissance scientifique constitue l'un des biens communs de l'humanité qu'il importe de défendre.  Dans nos pays, pour l'immense majorité de la population, les convictions religieuses ont changé en partie parce que le discours scientifique et le discours philosophique, inspirés par les sciences anthropologiques et paléontologiques, les ont remises en question.

 

Conceptions cosmologiques

Passons sous silence les anciennes conceptions cosmologiques ou "sciences des lois qui gouvernent l’Univers ", telles qu'une terre plate couverte par le firmament ou que le géocentrisme (ou la terre est considérée comme le centre de l’Univers), acceptant une terre sphérique mais n'admettant pas que le soleil soit le centre du système solaire. Très peu considèrent encore cette interprétation littérale de la bible.

Analysons plutôt le créationnisme, qui peut se présenter sous différentes formes :

- créationnisme où la terre est très récente : elle a été créée par Dieu il y a  6000 à 10000 ans, toutes les formes de vie ont été créées en 6 jours, et la géologie peut être interprétée en termes du déluge (en anglais les YEC: young-earth creationists).

- créationnisme où on accepte l'ancienneté géologique de la terre mais où la vie est créée par dieu suivant les textes bibliques: il s'agit de "old-earth creationism" ou aussi de "Gap Creationism": dans ce dernier cas une longue période existerait entre la genèse 1:1 et la genèse 1:2, dieu créant la vie en 6 jours après cet intervalle.

- créationnisme où chaque jour de la création représente des milliers voire des millions d'années.

- créationnisme progressif où la terre est très ancienne: le "big bang" serait une évidence de la force créatrice de dieu, la biologie moderne et l'Évolution sont rejetées, dieu créant les organismes de manière séquentielle selon ce qui est observé dans les couches géologiques.

- créationnisme évolutionniste: la nature n'a pas d'existence en dehors de la volonté divine, des événements de création existent et Adam ne fut pas le premier homme mais le premier qui fut conscient d'être humain.

- évolution théiste: dieu crée la vie par l'intermédiaire de l'Évolution , ce point de vue accepte les données biologiques modernes sauf lorsqu'il s'agit de la création de l'âme humaine ; cette position est celle du pape actuel jean-paul II et de nombreux congrégations protestantes.

D'autres formes de théories créationnistes existent et sont difficilement classifiables et justifiables:

- créationnisme védique ou forme primitive de la religion brahmanique: l'hindouisme parle d'une terre très ancienne et certains considèrent l'homme anatomiquement moderne comme ayant existé depuis des milliards d'années.

- créationnisme amérindien : des centaines de populations des Indiens d’Amérique  avec autant d'histoires de la création : ainsi, une histoire assez fréquente considère qu'il n'y a pas de différences entre hommes et animaux, qu'il y eut un temps où des géants et une faune géante  coexistaient, et que leur taille diminua lorsque l'âge d'or disparut, avec une terre ravagée par le feu provoqué par le volcanisme.

Comme on le voit les positions créationnistes peuvent être largement opposées. En dehors de ces différentes formes de créationnisme, on peut parler de deux formes de concept évolutionniste:

- Evolutionnisme méthodologique : dieu n'intervient pas activement dans le phénomène d'évolution, le matérialisme décrit le monde naturel et son évolution, il n'est pas nécessairement athée;

- Evolutionnisme philosophique: aucune force supranaturelle n'existe.

 

L'Eglise catholique et les catholiques

Ce qui paraît caractériser souvent l'église catholique aujourd'hui et dans le passé, ce sont les prises de position souvent tranchées et catégoriques de l'autorité vaticane, notamment en termes (bio)éthiques.  Le Vatican a tendance à imposer des réponses considérées comme définitives mais souvent les chrétiens d'appartenance catholique ne se sentent pas à l'aise devant de telles positions.

Ce qui semble déterminer aussi les interventions du vatican en (bio)éthique, c'est la conviction qu'une "finalité est inscrite dans la nature humaine comme expression du vouloir de Dieu à notre sujet" (de Locht, 2000).  Un destin, fixé par ailleurs, s'imposerait donc à nous.  Ces règles sont les mêmes que celles qui opposaient l'église aux notions mêmes d'évolution.

Galilée (1564-1642), physicien et astronome italien, fondateur de la méthode expérimentale reliée au système du monde de Copernic, est certainement l'un des symboles laïques par excellence du savant, victime de l'obscurantisme de l'église catholique ; il dût  renier ses théories devant la cour romaine et abjurer devant l’Inquisition en 1633. Il s'agit là d'un symbole sur lequel Jean- Paul II a tenu à présenter les excuses de l'église.  Dans une analyse minutieuse du "cas" Galilée, G. Minois (2000) démontre que Galilée ne fut pas tellement opposé à une forme d'intolérance de l'église, il était la célébrité des salons romains, soutenu par les Médicis, familles de florence, protectrice des Arts et des lettres  qui régna depuis 1434 à 1670, il fût reçu par les cardinaux et les jésuites, le problème était sa demande à l'Eglise  d'abandonner la nature divine des corps célestes. L'opposition et le jugement viennent donc de la visée de l'église à tout régenter de la politique à la culture, de la morale à la science, en fonction de l'interprétation arbitraire de textes hébreux vieux de plus de deux mille ans. 

Les différents textes de la bible ont été écrits par plusieurs auteurs d’époques successives, et à l’intérieur d’un même texte l’on peut constater la présence de différents rédacteurs. La foi suppose préalablement  que dans ces textes bibliques se trouve la parole de dieu transmise à l’homme, mais par des paroles humaines. La théologie entreprend à partir de ces présupposés d’interpréter les textes pour trouver la part divine parmi ce discours humain.

Au niveau des récits de la Création, deux versions de la Genèse existent. Le plus ancien est le deuxième (Gen.2 : 4b), il daterait du 9ème siècle avant notre ère. Le premier (Gen.1 :1 – 2 : 4a) daterait de la période babylonienne au 6ème siècle avant notre ère. Les accents sont différents. Ainsi, le plus ancien place la Création de l’Homme à un niveau central et l’Homme doit se soumettre à la volonté divine. Dans la version plus récente, le monde est créé ex nihilo et la Création est linéaire, l’Homme est créé à l’image de Dieu et reçoit la responsabilité du reste de la Création (Cornille, 1997).

L'église catholique restera toujours une institution bicéphale avec d’une part un pôle mystique de transcendance, de révélation et de vérité et d’autre part un pôle naturel empirique d'insertion dans un contexte historique.  L'église effectue un effort permanent pour s'adapter non seulement à chaque époque, mais aussi aux conditions politiques locales. On peut d’ailleurs s’interroger sur le poids réel pour les catholiques des documents issus du Vatican, et notamment des encycliques. Au moment de leur parution, celles-ci sont présentées par le clergé comme des directives morales, prétendant à un modèle permanent, indépendant de conjoncture précise. Et cependant, l’histoire montre que les encycliques sont des réponses ponctuelles à des situations ponctuelles.

Il en résulte des ambiguïtés,  des  promesses dialectiques et des contradictions.  La violence de l'église, qui a longtemps condamné les droits de l'Homme, est abandonnée et un revirement s’est réalisé. Sur le plan individuel, beaucoup de catholiques pratiquent, en effet, une tolérance nouvellement découverte, mais au niveau collectif l'intolérance subsiste et les tabous sexuels et éthiques persistent.[vi] En ce qui concerne l'évolution, ce n'est que récemment que le Vatican admet que la théorie de l'évolution ne doit plus être considérée comme une simple hypothèse.

En 1864, Pie IX, dans l’encyclique  Quanta Cura, condamne fermement le libéralisme, le socialisme, le rationalisme et les sciences lorsqu’elles sont en contradiction avec la tradition de l’Eglise. En 1909, Pie X et la commission pontificale continuent d’affirmer que les 3 premiers chapitres de la genèse ne peuvent être mis en doute.  Cependant, en 1950, sous Pie XII, l'encyclique Humani generis mentionne qu'il n'y aurait pas opposition entre l'évolution et la foi chrétienne.  Mais, tous les hommes sont considérés comme descendants d'Adam et la théorie polygéniste doit donc être rejetée. Ce n'est seulement qu'en 1996 que le pape Jean-Paul II mentionne à l'académie pontificale des sciences que "des connaissances récentes amènent à reconnaître que la théorie de l'évolution est plus qu'une hypothèse" (récentes ??).

L'approche reste cependant très "prudente", car le pape ne cite jamais Charles Darwin et continue naturellement à considérer que la présence humaine ne peut s'expliquer sans une intervention divine.  L'église catholique romaine n'accepte donc pas l'évolution naturelle, l'esprit humain ne peut émerger de l'évolution matérielle, de la matière vivante ; l'évolution n'est donc pas sous contrôle des forces naturelles mais est sous contrôle divin.  Les catholiques doivent affirmer que dieu est le créateur de toutes choses, spirituelles et matérielles, et que si une évolution a lieu c'est sous sa guidance. « The moment of transition to the spiritual cannot be the object of this kind of observation, which nevertheless can discover at the experimental level a series of very valuable signs indicating what is specific to the human being. But the experience of metaphysical knowledge, of self-awareness and self-reflection, of moral conscience, freedom, or again of aesthetic and religious experience, falls within the competence of philosophical analysis and reflection, while theology brings out its ultimate meaning according to the Creator’s plans » (Osservatore Romano, 1996).

La position officielle de l'église catholique est que l'homme n’est pas sur terre par hasard, même s’il est le produit de l’évolution et que de plus l’esprit humain est de création divine, non sujette à des changements évolutifs.  Cependant, des fondamentalistes catholiques continuent à croire à une interprétation littérale de la bible et n'acceptent aucune forme de compromis.  Les auteurs fondamentalistes catholiques sont peut-être peu représentatifs. C'est le cas notamment d'un article de A. Nephard (article non daté) publié sur le site des livres catholiques Theodokos (dont l'origine est difficile à situer comme pour de nombreux sites), qui affirme que les écritures sacrées sont vraies puisque dieu est leur auteur et que nous avons besoin de l'église pour les interpréter infailliblement.  Selon lui, même Jean Paul II admet ce principe puisque la catéchèse de 1994 continue à dire que la genèse exprime la réalité de la création et sa fin divine.  C’est le cas aussi de Gonzales (2003) du St. Joseph's Men Society qui affirme également que "we can determine by reason, for instance, that God is infinetely good and that he is the author of life.  If we accept the general theory of evolution, we would also have to say that he is the autor of death, corruption and violence".

Il existe au moins 5 sites belges néerlandophones (dont "creabel") qui prônent le créationnisme, il s’agit d’un créationnisme strict en 6 jours et en 6000 ans maximum. Suivant "creabel" l’Homme a été créé de manière parfaite et la Bible ne peut contenir de mensonges. La position de catholiques non-européens pourrait aussi être plus fondamentaliste: une enquête auprès de 20 étudiants africains au niveau master de mon université (et ayant donc un niveau d’éducation équivalent à celui d’une licence) montre que 18 d’entre-eux peuvent être considérés comme créationnistes. L’un d’eux estime "qu’il ne faut pas exagérer le niveau d’évolution atteint par l’Homme, il y a  eu plutôt une évolution de l’environnement humain, pas de l’essence de l’Homme", ou "les anthropologues n’étaient pas là pour voir comment l’Homme a évolué", ou "l’évolution est une théorie pas une science, on cache la vérité aux étudiants", ou encore "les chrétiens dans mon pays en restent à l’idée que Dieu est créateur de l’Homme à son image, ils n’ont pas confiance en l’idée scientifique d’un homme issu de singes".

 

La Reforme: des theologies largement opposees

"La diversité, la multiplicité presque, des courants issus de la réforme a conduit à l'émergence de pensées éthiques, morales, anthropologiques et théologiques différentes, parfois même rigoureusement opposées les unes aux autres " (Burdet, 2000).

On distingue essentiellement 7 groupes religieux: les luthériens, les calvinistes, les anglicans, les pentecôtistes, les méthodistes, les baptistes et les presbytériens. Malgré leur diversité, les protestants respectent la règle du sola scriptura prônée par Luther, maître de la Réforme en 1496,  et examinent donc toutes choses à l'aune du seul critère de la conformité aux textes de la bible.  Cependant, par rapport à ce principe, des divergences fondamentales sont apparues.  Par rapport à des concepts bioéthiques tels que l'avortement par exemple, certains médecins protestants le pratiquent, d'autres participent à des "commandos anti-avortement".

Pour les "évangélistes protestants", l'auteur de la bible est directement l'esprit de dieu, aucune erreur n'a donc pu s'y glisser.  Pour les courants "réformés", les textes bibliques doivent être interprétés sous l'angle de la critique historique et du contexte culturel.  Il n'y a donc pas une mais plusieurs théologies protestantes, et par conséquent chaque croyant a une responsabilité personnelle.

Les courants "évangélistes" sont connus comme "conservateurs" ou "fondamentalistes" et sont dans une large mesure opposés aux principes d'évolution.  Ils considèrent que rejeter la genèse, dans son sens strict de 6 jours, revient à détruire les fondements mêmes de la chrétienté.  Au contraire, le "libéralisme protestant" a une approche libre et critique de la bible et les positions dogmatiques sont rejetées.  Ils considèrent la création comme un mythe, tel que bien d'autres mythes existent dans d'autres religions. "Mais ce que je conteste, et les protestants libéraux avec moi, c’est la prétention de l’orthodoxieà avoir acquis le droit de préciser et de fixer pour l’éternité telle ou telle affirmation intellectuelle. C’est pour cela que la protestantisme libéral, dans bien des cas, attachera beaucoup plus d’importance à la rectitude de la conduite (eupraxie) qu’à l’adhésion intellectuelle à un catalogue de propositions dogmatiques, considérées pour l’éternité comme représenatant le contenu de la foi chrétienne." (Th. Monod, 2004). Entre les deux, on pourrait situer les "réformés" qui insistent sur le retour aux textes bibliques mais sans qu'un livre puisse traduire des révélations.  Le protestant peut varier du sectaire refusant l'idée d'évolution au libertaire ou au rebelle n'ayant aucune difficulté à accepter l'évolution humaine.

Comme le catholicisme, le protestantisme belge témoigne aussi de processus d'individuation des croyances.  L'église protestante unie de Belgique, qui regroupe la plupart des églises issues de la réforme et qui jouit des subsides de l'état, est cependant fortement concurrencée par des églises évangélistes, dites "libres", où l'accent est mis sur la conversion individuelle.  Les croyants se disent plus chrétiens que protestants.  D'origine anglo-saxonne, essentiellement américaine, les églises évangélistes sont aidées financièrement par des fonds nord-américains.  Le discours est souvent manichéen (conception dualiste du bien et du mal) et simpliste, et la bible, autorité suprême, est réputée infaillible.  Le créationnisme y est de mise et il n'y est pas question d'œcuménisme (tendance à l’union de toutes les églises chrétiennes), de tolérance ou de pluralisme.

Depuis un demi-siècle, la tendance à amalgamer patriotisme américain et croyance en dieu, s'est progressivement accentuée.  Cela commença notamment avec le président Eisenhower qui proposa, en 1954, la devise à connotation confessionnelle "In God we trust".  Sous la présidence de Ronald Reagan (1981-1989), les fondamentalistes chrétiens sont dans l'antichambre du pouvoir, c'est la période des procès de l'enseignement de l'évolution dans les cours de biologie, du réveil religieux (revivalism) avec les prêcheurs modernes.  Chaque session du Congrès s'ouvre par une prière récitée par un religieux ; avant de témoigner à une Cour on devra dire "so help me god" ; dans 44 états les élèves commencent leur journée par un "one nation under god".  Avec l’actuel président, George W. Bush, les fondamentalistes chrétiens sont désormais au pouvoir et participent directement aux prises de décisions politiques.  Le gouvernement américain demande à être jugé non plus sur ses actes mais sur la pureté morale et doctrinale dont il se réclame.

Après la première guerre mondiale de 1914-1918, les conservateurs chrétiens américains, dans une recherche de la renaissance de valeurs qu'ils estiment traditionnelles, proposent d'interdire toute notion d'évolution dans l'enseignement public.  Il en résulte le Butler Act voté en 1925 au Tennessee et interdisant l'enseignement de l'évolution. Différentes lois ont été abolies par la cour suprême des états-Unis car elles violaient le principe de séparation de l'église et de l'état.

Cette polémique reste cependant d'actualité, car les fondamentalistes religieux, connus sous le nom de créationnistes, ont persisté dans leurs tentatives d'interdire l'enseignement de l’évolution dans les écoles publiques et/ou d'introduire des notions anti-évolutionnistes.  Dans les 30 dernières années, les créationnistes ont proposé la création et son  enseignement comme "science".  Le site de l'Institute for Creation Research (2004), dans un article de Morris (1982), mentionne même que l'enseignement de l'évolution devrait être interdit puisqu'il est à la base du communisme et du nazisme !  Naturellement, le créationnisme n'est pas, par définition, une science, dans la mesure où ses arguments sont considérés comme absolus et infaillibles. Autres exemples en 1981 en Arkansas, en 1987 en Louisiane, des lois créationnistes ont été abolies. Cela n'a pas dérangé les créationnistes qui ont demandé aux professeurs d'utiliser leur "liberté académique" pour enseigner le créationnisme[vii].  Pour éviter des termes trop teintés de religion, ils proposent le terme "intelligent design theory" (!?).  Ce courant a un impact sur l'enseignement de la biologie et sur l'éducation aux états-Unis parce que de nombreux professeurs d'écoles publiques, pour éviter les controverses, décident de ne pas enseigner l'évolution. Dans d’autres cas, l’évolution est rendue facultative car simplement supprimée des connaissances exigibles aux examens.

A titre d’autre exemple, le 30 janvier 2004, le New York Times publie un article mentionnant que l’Etat de Géorgie propose de remplacer le terme évolution par "changement dans le temps", car le terme évolution a une connotation trop négative ! et de remplacer le terme "âge élevé de la terre" par "âge de la terre". La qualité moyenne de l’enseignement de l’évolution est donc relativement mauvaise, l’esprit critique de plus en plus exclu et l’endoctrinement en hausse. Dans un rapport récent sur l’état de l’enseignement de l’Evolution aux Etats-Unis, L. Lerner (2000) estime que cet enseignement est très bon dans seulement 10 états, satisfaisant dans 21 états, insatisfaisant dans 6 états et même sans utilité ou absent dans 13 autres états (dont l’Alabama, la Floride, la Géorgie, le Kansas, le Mississipi, l’Ohio, le Tennessee). En Australie, le poids politique et économique des créationnistes est considérable et fit qu’au début des années 1980 l’état du Queensland autorisa l’enseignement du créationnisme dans les écoles. Les associations créationnistes australiennes et américaines sont également  de puissants moteurs de l’extension du créationnisme en Europe, en Russie et Turquie notamment, mais aussi dans de nombreux autres états par l’intermédiaire des sites internet, des cassettes vidéo, des livrets, des conférences et d’autres subsides pour aider à la diffusion dans les médias..

Les créationnistes, dont nous avons vu l’énorme variabilité d’opinion, n'ont pas de support scientifique[viii] aux états-Unis mais tentent d'avoir une influence politique et éducationnelle.  Les créationnistes en restent donc à une interprétation littérale de la bible, certains continuent même de parler d'une terre plate (la bible invoquant  les "4 coins de la terre") et de géocentrisme (ou terre stationnaire,centre de l’Univers). Les autres créationnistes sont nombreux et leur influence peut être puissante.  Le seul fait que ce groupe continue à exister est en tous les cas un fait de société.

Il s'agit d’une position primairement anti-scientifique.  Les créationnistes considèrent que l'âge établi pour la terre (4,6 milliards d'années) est en fait le résultat d'une conspiration du monde scientifique pour "donner du temps à l'évolution".  En fait, le débat a aussi une origine politique, puisque l'évolution serait pour eux "à la base de l'athéisme, du communisme, du nazisme, du racisme, de l'impérialisme économique, du militarisme, de l'anarchie et de tout système de croyance anti-chrétien" (excusez du peu!).  "L'Amérique est attaquée par les forces de Satan dans un effort de miner l'Amérique".  Vous pourriez penser que ce débat est surprenant, il l'est en effet, en termes scientifiques ;cependant, leur but n'est pas de convaincre les scientifiques mais un public peu formé aux sciences :les processus de l'évolution constituent une science complexe, faisant appel à de nombreux domaines scientifiques parfois difficiles à expliquer.  Les créationnistes manipulent donc souvent les faits scientifiques à leur propre avantage : ainsi dans des musées créationnistes, on juxtapose des pièces fossiles de manière artificielle, comme par exemple un moulage de trilobite (articulé marin de l’ère primaire, de 400 millions d’années) superposé à un pied humain, la juxtaposition des 2 pièces prétend ainsi attester la coexistence des trilobites et de l’homme durant le déluge.

A titre d'exemples plus spécifiques, citons un certain nombre d'églises protestantes:

- Episcopal Church (USA) : la créativité divine peut se retrouver aussi bien dans l'histoire de la création que dans la théorie d'évolution, une résolution de la convention générale de cette église en 1982 s'oppose à l'enseignement du dogmatisme rigide de la "Creation science".

- Eglise évangélique luthérienne : dieu aurait pu utiliser l'évolution dans le processus de création.

- Eglise luthérienne (synode de Missouri) : est créationniste.

- Eglise évangélique luthérienne (synode de Wisconsin): est aussi créationniste.  L'évolution n'est rien d'autre qu'une tentative arrogante d'effacer la responsabilité du créateur.

- Eglise presbystérienne (USA) : l'assemblée générale en 2002 réaffirme la création divine selon la sagesse des écritures, mais l'évolution naturelle est compatible avec cette création ; un recensement de 1998 montre que l’énorme majorité des membres de cette église est créationniste, 98 % pour les pasteurs et 96 % pour les croyants.

- Eglise méthodiste unie : le rapport de 2004 de la Task Force Science & Théologie pose la question. pourquoi l'évolution ne pourrait-elle pas être une partie d'un dessein intelligent ?  L'évolution ne pourrait-elle pas être une manière subtile et élégante de dieu d'accomplir ses intentions ?

- Assemblées de Dieu : rejette l'idée d'évolution théiste et est donc favorable au créationnisme, "si l'humanité a évolué à partir de formes de vie inférieures, nous ne pourrions être créés à l'image de dieu (genèse 1:27; 2,7).

- Eglise baptiste (Utah) : nous avons été créé par dieu et nous n'avons pas évolué de manière accidentelle ; il n'y a pas eu un processus de changement d'un animal à un autre mais plutôt, comme la genèse l'enseigne, que chacun a été créé dans un ordre propre ; en fait, humains et animaux ont été créés à des jours différents.

 

Les Églises orthodoxes indépendantes et nationales

Le grand schisme séparant la chrétienté de l'Est et de l'Ouest date de 1054.  Le patriarche oecuménique de Constantinople (actuelle ville turque Istanbul) est considéré comme le "primus inter pares".  Mais, les églises orthodoxes sont dites "autocéphales", c'est-à-dire indépendantes du patriarcat oecuménique de Constantinople.  En d'autres termes, elles sont autonomes par rapport à toute autorité ecclésiastique "étrangère" et sont par conséquent nationales.  On ne peut donc envisager l'orthodoxie dans son ensemble, les Eglises sont indépendantes entre elles, souveraines, organisées autour de synodes d'évêques et assujetties à leurs Etats respectifs.

En Grèce, l'église orthodoxe est une église d'Etat, et 97 % de la population grecque actuelle est officiellement considérée comme orthodoxe.  Jusqu'en 2000, la carte d'identité grecque mentionnait obligatoirement la religion.  Suivant les principes orthodoxes, le "père" est le créateur du ciel et de la terre et de toutes choses visibles et invisibles.  L'homme est créé à l'image de dieu.  L'évolution n'est éventuellement pas rejetée dans la mesure où dieu reste maître de celle-ci, les 6 jours de la Création peuvent aussi être considérés comme des périodes.  Dans l'enseignement, les professeurs sont considérés comme orthodoxes, appartenance vérifiable jusqu’en 2000 par la carte d'identité.  L'évolution ne fait pas partie du programme de l'enseignement secondaire, certains livres y consacrent malgré tout quelques pages, mais qui ne font cependant pas partie du cursus officiel.

L’église orthodoxe russe n’a pas une interprétation littérale de la création biblique et le concept d’évolution n’est pas considéré comme incompatible avec la religion, dans la mesure cependant où cette évolution reste sous la direction divine. Suivant une enquête d’opinion, plus de 60 % de la population russe est considérée en 1994 comme non croyante. Mais, en 1991 la « Moscow Creation society » fut créée et ses membres, en collaboration avec le ministre russe de l’enseignement ( !),  ont édité une brochure créationniste destinée aux écoles russes. Les publications de l’institute for Creation Research sont largement diffusées dans les facultés universitaires.

Ainsi, Bufeev (2004) (l'auteur est d'origine russe mais il est difficile de donner une origine à cet article comme souvent sur internet) affirme qu'un chrétien orthodoxe ne peut être évolutionniste.  "Without God neither science nor any other concept of human thought leads to the Truth".  "The cornerstone of the Orthodox attitude to science is the concept of creation ...  Creation is in principle a religious concept, but not a scientific one".  L'évolutionnisme théiste est considéré ici comme une perversion de théologiens médiocres et de "ténèbres" occidentaux.  Le monde créé en 6 jours était parfait, la mort n'apparut qu'après que l'homme ait péché.

En Serbie, l’agence AFP du 9 septembre 2004 signale que la ministre serbe de l'éducation, Ljiljana Colic, a supprimé l'étude de l’évolution en 8ème année d’études. Selon le journal Glas Javnosti, Mme Colic a  indiqué que le darwinisme et la conception selon laquelle l'Homme a été créé par Dieu seraient étudiés en parallèle. Les déclarations de Mme Colic ont déclanché une polémique à propos des mérites de chacune des deux conceptions et de leur place dans le systeme d'éducation[ix].

A titre d'autre d'exemple, en 2000 l'archidiocèse américain de l'église orthodoxe grecque mentionne, suivant le révérend Mastrantonis, que l'évolution ne contredit pas l'existence d'un être suprême intelligent, mais s'oppose au concept d'évolution excluant une création.  De manière plus ou moins semblable, l'église orthodoxe américaine affirme que si les hommes ont pu évoluer physiquement sous la direction d'un créateur, leurs âmes ne peuvent avoir évolué.  L'évolution peut être acceptée si elle n'élimine pas le besoin d'un dieu créateur.

La religion orthodoxe estime donc que dieu est le créateur de toutes choses et que les hommes, créés à l'image de dieu, sont uniques parmi les autres créations.  Mais, en même temps, l'orthodoxie n'analyse pas la genèse de manière littérale. Comme la genèse nous est présentée, nous ne pouvons la comprendre et cependant nous devons y croire !

Cependant, des nuances existent étant donné l'indépendance des différentes églises orthodoxes.  L'église orthodoxe estime ne pas avoir de problèmes avec l'évolution comme théorie scientifique mais bien avec l'évolution éliminant le besoin d'un créateur, qui est intervenu pour donner l'esprit à l'homme.

 

Islam et Islamisme

Le coran est considéré par pratiquement tous les musulmans comme le message direct d'Allah et la genèse est considérée comme une version corrompue du message divin. La création est décrite de manière plus vague dans le coran que dans la bible, et elle est dispersée sur plusieurs chapitres ou surahs (2:109-111; 7:52-57; 16:1-17; 40:66-70; 41:9-12; 42:28; 65:12).  Ceci entraîne des interprétations créationnistes aussi larges que celles décrites précédemment dans notre paragraphe "Conceptions cosmologiques": selon l'Islamic Society of Greater Salt Lake, "if you believe in God and in the Qur'an, you have to believe that everything that was in the universe was created by God ...  If there was an evolutionary process, that process was created and put in place by God").

L'islam a connu au Moyen Âge, du Vè au XVè ,  un développement exceptionnel des lettres et des sciences, une rencontre avec la civilisation grecque ancienne, avec celle de la Perse et du Moyen-Orient.  La civilisation occidentale plongée alors dans un esprit des ténèbres doit beaucoup à cet islam par la présence d'un courant rationaliste ne suivant pas aveuglément les textes du Coran.  Mais dès le IXè siècle, de nombreux religieux musulmans s’opposent vivement à l’extension des sciences dites rationnelles par opposition aux sciences religieuses ou traditionnelles. Pour eux, la philosophie grecque est un apport étranger. Cette condamnation par l’islam rigoriste de la philosophie grecque et de la logique allait avoir des conséquences dramatiques, en faisant de cette religion une religion sans esprit  critique, conventionnelle à l’excès.

Au XXIè siècle, le darwinisme est cependant discuté de manière assez libre dans les pays arabes dans la mesure où les idées rationalistes étaient connues des personnes éduquées.  Ainsi, certains intellectuels admettent le darwinisme pour un monde sans créateur.  Les auteurs religieux musulmans, comme Isfahani, al-Jisr Hussein, ne sont pas opposés à l'évolution et essaient de réconcilier darwinisme et islam et même matérialisme et islam, ils regardent cependant les inventions scientifiques comme des révélations des secrets de l'univers créé par dieu, l'évolution se déroule sous contrôle divin (A.A. Ziadat, 1986).

L'islam a donc fourni de brillantes contributions scientifiques à l'humanité, de la médecine à l'astronomie, ainsi d'ailleurs qu'au niveau des lettres.  Cela n'empêchait pas les pays musulmans de garder les traditions coraniques, qui restaient donc une priorité. Le livre de Darwin « Origin of species »de 1859, ne fut d’ailleurs traduit en langue arabe qu’en 1964. Selon un discours en 1994 de Dalil Boubakeur (recteur de l’institut musulman de la mosquée de Paris), « l’islam accorde à la raison une importance primordiale » mais plus loin il mentionne aussi « que le raisonnement philosophique ne peut nous mener à une conclusion contraire à la révélation divine ». 

Jusqu'au XXe siècle, dans les pays musulmans n'existait le plus souvent qu'un système d'éducation basé sur les traditions musulmanes, liées à l'étude du Coran, dans lequel les matières scientifiques étaient absentes.  Après la deuxième  guerre mondiale, les réformes de l'éducation sont apparues et les sciences ont été introduites.  Cependant, les rapports de l'Unesco montrent que cet enseignement des sciences est basé sur des aspects théoriques évitant le développement d’une pensée critique et d’une réflexion sur les questions éthiques liées aux problèmes scientifiques (Abd-El-Wahed, 1996).  La république kémaliste proclamée en 1923 est une exception, car le fondateur de cette Turquie Mustafa Kemal Atatürk proclame la soumission de la religion à l'état.  Atatürk a imposé, non sans violence, une forme de laïcisation.  Il fallait libérer la société de la néfaste tutelle religieuse, émanciper la femme toujours sous le joug des traditions, rattraper le retard politique et éducatif  par rapport à l'Occident, abandonner la charia qui commande de couper une main d’un voleur ou de lapider une femme « adultère », cette lapidation étant considérée comme une punition mais aussi comme une « purification » (Hani Ramadan 2002). De plus, il fallait instaurer des droits notamment par référence au code civil suisse, au code pénal italien et au code administratif français. Du point de vue de l’éducation, l’évolution fut mis au programme scolaire et l’enseignement de la biologie devint une obligation même si elle restait imprégnée de la religion. Néanmoins, le créationnisme revient actuellement en force en Turquie et il existe une « Islamic Scientific Creationist and Science Research Foundation » (BAV), financée par des organisations étrangères, par rapport à laquelle une « Turkish Evolution Committee » a dû être créée (X7). L’auteur le plus actif de ce BAV est Harun Yahya (2002), qui serait, selon certains, un collectif de personnes dont ferait même partie Necmettin Erbakan, l’actuel premier ministre et dirigeant du parti islamique (X12 et X14). Pour eux, l’évolution est la racine des maux de notre monde moderne,  du fascisme et du capitalisme forcené et même des attaques terroristes du 11 septembre 2001  contre les twin  towers à New York !! (Yahya, 2002).

Actuellement, l'islam veut privilégier les droits de la communauté musulmane au détriment des droits de l'individu, dans leurs propres pays et même dans les pays d’accueil. « Il va de soi que la vie communautaire et le statut social soient stictement réglés par la sharia » (discours en 1994 de Dalil Boubakeur, recteur de l’institut musulman de la mosquée de Paris). Sans vouloir imposer nos coutumes occidentales, sans amalgamer racisme et critique de l'islam, il nous faut maintenir la laïcisation de la société et restreindre les opinions religieuses au seul domaine privé.

"If "evolution" implies that man is actually an evolved form of a certain other creature, then Islam does not affirm such a standpoint.  According to the Qur'an, Adam (pbuh) - the first man - was a direct creation of God, as a man.  The Qur'an does not support that Adam evolved from another species" (X1, 2004).  Seuls Adam et Eve, et les générations suivantes, ont reçu les proportions physiques adéquates et les qualités humaines avancées.  Et les fossiles humains légèrement différents (comment interpréter cette différence ?  Néanderthaliens, Homo erectus, Homo habilis, ... ?), sont des "presque" humains n'ayant pas reçu ces proportions et ces qualités, et ils se sont éteints avec le temps (X1, 2004).

L'évolution des autres espèces non-humaines peut être acceptée sauf si les transformations sont dues à des mutations aléatoires et à la sélection naturelle conçues comme des causes indépendantes de la volonté d'Allah.  Rien ne se déroule au hasard, et il n'existe pas de nature autonome.  "The slaves of evolution have no limit" (X2, 2004) et exposent la société musulmane à tous les dangers.  "This is why we tell to those who demand from Islam to evolve, why don't they demand from evolution to be Islamic" (en gras dans le texte, X2, 2004).

Un autre site islamique (Kadous, 1996) accepte la méthode scientifique d'observation et d'expérimentation, ainsi d'ailleurs qu'une évolution graduelle au sein de couches géologiques.  Mais il ajoute directement que les formes vivantes (terme imprécis utilisé ainsi probablement de manière intentionnelle ?) ne peuvent se transformer des plus simples aux plus complexes, que les premières formes de vie ont dû être créées, et que de toute façon l’homme est en dehors de ce schéma d'évolution.  "Finally, if we can remove the notion of man being linked to this chain, whom Allah has honoured above all creation, then the theory of evolution can be accepted ...  As Muslims, we cannot accept that man was a monkey, or a bird or a fly" (Kadous, 1996).

Un autre site musulman (X3, 2004) mentionne que l'apparition de l'homme sur la base de l'évolution à partir d'autres primates n'est pas en conflit avec les versets du Qur'an, mais il précise plus loin que "the emergence of man in an extraordinary way was a special favor of Allah".

Naturellement, il existe une différence fondamentale entre l'islam et l'islamisme.  L'islam est une religion monothéiste basée sur un culte commun, elle est divisée en courants théologiques, tels que le sunnisme et le shiisme.  Le sunnisme considère les 6 jours de la création de manière littérale et le shiisme plutôt en tant que 6 périodes. Dans nos pays occidentaux notamment, émergent des mouvements de religiosité modérée et une intelligentsia musulmane réformiste attachée à un islam plus moderne.  Souvent, cependant, ils sont intimidés pour les mouvements islamistes.

L'islamisme est, en effet, une idéologie politique de combat recouvrant une diversité de courants, comme les traditionalistes combattant pour une morale religieuse sans déviances, les fondamentalistes combattant pour une réforme sociale mais soumise aux préceptes de la charia/Sharia ou encore les néo-fondamentalistes ne reconnaissant comme légitimes que la Umma ou communauté des croyants.  L'islamisme, dans son ensemble, met l'accent sur une idéologie puritaine et rigoriste et prône l'Etat islamique ; il se radicalise à partir des années 1990 rejetant les valeurs de tolérance, de pluralisme et les droits de l'Homme.

 

Immigration, Islam et islamisme

Récemment, parmi les populations immigrées, le phénomène religieux joue un rôle identitaire important, lié à des comportements qui ne se limitent pas à la sphère privée mais se répercutent sur les structures sociales et les rapports entre les sexes.  Il sert de justification à de nouvelles divisions et dérives  au sein de nos sociétés occidentales alors que la démocratie exige la tolérance en matière d'opinions religieuses et politiques.

Si on prend l'exemple de la migration marocaine en Belgique, qui débute officiellement en février 1964, la communauté marocaine ne fut intéressée au début que par l'acquisition de droits sociaux et par l'égalité de ces droits.  L'histoire plus récente.est caractérisée par un repli sur la sphère privée et communautaire : de plus en plus d'associations se créent en faisant référence à l'islam. L’individu se soumet aux préceptes de l'islam et il est lui est quasiment impossible de dissocier communauté et croyance.  Les sites, francophones en tous les cas, se veulent pratiques et proposent tout et donc n'importe quoi : comme des indications pour parfaire sa religion ou des conseils concernant le mariage tels "il n'est pas conseillé à une musulmane de se marier à un chrétien.  Car dans le couple la femme doit être soumise à son mari" (www.immigrer.net).

De plus, les imams, qui prêchent dans les mosquées belges et françaises par exemple, sont habituellement des missionnaires étrangers, payés notamment par des subsides de pays arabes, issus d'écoles sectaires voire fanatiques, et protégés par certains consulats.  Dans l'islam, la notion de citoyenneté n'existe pas mais bien la notion de communauté, car reconnaître une communauté, c'est donner la possibilité d'appliquer les propres lois de l'islam à cette communauté (Amar Lasfar, recteur de la mosquée de Lille dans Hommes et Migrations, n° 1218, 1999).

Lorsqu'une république islamique existe, comme dans le cas de l'Iran, l'oppression prend la forme d'opposition à la liberté de la femme, de suppression de la liberté d‘expression culturelle et dans le domaine personnel, de vote de lois brutales, comme la charia.  Les soldats d'Allah attaquent des librairies et des maisons d'édition, des livres sont brûlés, des universités attaquées, des étudiants tués (Kamgulan, 2002).  L'Iran représente un cas unique dans l'islam.  Groupant plus de 60 millions de chiites, il connaît un clergé centralisé, à l'image de l'église catholique.  Tout théologien peut diriger l'état et veiller sur l'éthique de la nation.

 

Le monde musulman et l’éthique

L'éthique, qui concerne les principes de la morale,  est un sujet de préoccupation de la société musulmane.  "A cet effet, les communautés scientifique et religieuse sont en contact permanent pour débattre de la définition des valeurs" (Pouya, 2000).  Pour l'islam, l'éthique ne peut être détachée de l'idéologie religieuse.  Ainsi, l'avortement est officiellement condamné, mais l'avortement clandestin se pratique malgré cet interdit religieux.

Une majorité de musulmans se trouve dans l'incapacité d'accepter la critique historique à l'égard du Coran, ce qui les font juger comme "fondamentalistes".  L'islamisme militant est cependant fondamentalement politique et correspond à une protestation contre la modernité de musulmans ayant souvent bénéficié d'une formation techno-scientifique occidentale (Etienne, 2002).  Les fondamentalistes sont en totale opposition avec la notion d'évolution.

L'islam est trop multiple pour qu’on puisse porter un jugement d'ensemble sur ses pratiques et sur son contenu.  Et il est vrai que, dans les pays occidentaux tout au moins, la plupart des musulmans sont des modérés respectables.  Au contraire, l'islamisme nous interpelle puisqu'il s'agit d'une forme d'impérialisme religieux fondée sur des méthodes de conquête, de prosélytisme, voire d'oppression.  Il prône une vision théologique de la société.  Dans nos pays, ils forment une minorité, qui n'est cependant pas condamnée fermement par les modérés qui cèdent souvent à la peur et aux menaces.

La liberté est perçue, dans la pensée musulmane, comme l'équivalent du désordre, et elle est considérée comme une menace pour cette pensée.  Tout penseur s'inscrivant en dehors du cadre de la religion est taxé d'athée et d’impie et condamné en tant que tel. Une théologie islamique de la libération est absente ou combattue : ainsi Mahmoud Mohamed Taha, penseur musulman contemporain, a proposé une relecture éclairée du Coran, a remis en question la suprématie de la loi islamique dans la codification des sociétés musulmanes contemporaines, il défendait l’égalité devant la loi des musulmans et des non musulmans, des hommes et des femmes, mais en 1985 il fut condamné au Soudan pour apostasie et subversion politique et pendu par le régime islamo-militaire du général Nouméri. Même les dirigeants arabo-musulmans les plus opposés à l'intégrisme continuent à utiliser l'islam comme élément unificateur de la société ; ainsi par exemple, l'Algérie socialiste s'inspire ouvertement du Coran dans sa charte nationale.

Naturellement, des opposants humanistes, progressistes et démocrates existent dans les pays arabo-musulmans.  Mais, leurs dirigeants sont le plus souvent en exil, essentiellement parce que les mouvements démocratiques débutant dans les années 1960-1970 ont été isolés dans la majorité des pays de l'islam et n'ont pas été défendus par les gouvernements occidentaux : ils ont été éliminés en utilisant l'islam réactionnaire.  Des sites laïques, athées et minoritaires existent cependant, tel www.assoaime.net  et ils présentent une forte résistance à toute forme d’intégrisme.

L'attitude à l'égard de l'athéisme dans l'islam est inhérent au credo religieux.  La fatwa, ou sentence de mort, lancée en 1990 contre l’écrivain Salman Rushdie par l’ayatollah khamenei et par les gardiens de la théocratie iranienne est typique à cet égard.  Aucune transgression et aucune contestation ne sont permises à l'affirmation de l'existence de dieu, à la confiance en la prophétie de Mohamed et en la shâria ou charia  qui vise à modéliser la vie du croyant.  Il y a quasiment déni d'humanité pour l'athée aussi bien dans l'islam-religion que dans l'islam-tradition.  Ainsi, le premier ministre actuel turc Recep Tayyip Erdogan déclarait au début des années '90 "on ne peut être musulman et laïque".

Les intellectuels progressistes du monde musulman ont dans leur majorité reculé devant la remise en question de l'islam, ils dénoncent éventuellement des pratiques rétrogrades  mais l'islam est jugé bon en soi.  Parmi l'immigration maghrébine en occident, beaucoup ne croient plus en dieu, mais ne se réfèrent à l'islam que par une sorte de fidélité uniquement culturelle et insistent sur l'intimité de la conscience.  Ils créent une catégorie de "musulmans sociologiques" d'essence culturelle, souvent laïque voire athée (Nouréa Ouali, 2000).

 

Le Judaisme: pas de reponses univoques

Le judaïsme est une des plus vieilles religions monothéistes, elle est basée sur des écrits plus anciens que les évangiles.  Leurs concepts ethnocentristes de "peuple élu", valable à l'époque du royaume Hébreux comme formule fédératrice, n'est plus de mise dans notre monde globalisé.

Le livre de la genèse de l’Ancien Testament décrit la vie des trois patriarches (Abraham, Isaac et Jacob) et l'organisation tribale d'origine.  Les textes juifs comprennent le Tanakh ,souvent appelé l'ancien testament par les chrétiens, (dont la Torah) et le Talmud contenant des lois, des choix moraux et des connaissances médicales.  Le messie arrivera, reconduira les juifs sur la terre d'Israël, et une résurrection générale aura lieu.  Les juifs se réfèrent donc souvent comme peuple élu de dieu, n'impliquant pas qu'ils soient supérieurs aux autres mais qu'ils ont reçu plus de responsabilités dans l'étude de la Torah. Il s'agit d'une croyance en un dieu unique. L'Homme est placé au sommet de la création.

L'identité juive repose sur un imaginaire hérité d'un passé biblique, sur l'appartenance à une communauté religieuse, sur l'image d'un peuple persécuté de nombreuses fois.  Le sentiment d'identité est particulièrement puissant dans le judaïsme orthodoxe où l'évolution, le métissage culturel et les relations inter-ethniques sont considérées comme des fautes graves.  Plus le monde s'ouvre et plus ces communautés se referment sur elles-mêmes.

Mais, la communauté juive exprime des positions philosophiques très différentes, parfois opposées (Deroover, 2000). On peut, arbitrairement peut-être, distinguer des juifs dit laïcs, athées ou peu pratiquants, des libéraux pratiquant un judaïsme évolutif tourné vers le modernisme, des réformateurs (groupe libéral suivant les lois éthiques juives mais sans exigence de tradition alimentaire notamment, beaucoup de rabbins sont féminins), des conservateurs (situés entre les réformateurs et les orthodoxes), des orthodoxes attachés aux lois religieuses traditionnelles et à leurs interdits et des ultra-orthodoxes (ou "gardiens du Temple", ou "Fous de Dieu") sectaires et obscurantistes.

On estime qu'actuellement aux états-Unis seulement 10% des juifs américains sont orthodoxes (mais 40% des synagogues le sont) et 26% sont réformistes.  On parle aussi de judaïsme humaniste (The Humanist Manifesto II, 1973), mouvement lié à la libre-pensée, ou aussi d'humanisme religieux similaire au précédent mouvement mais pratiquant certains rites religieux.  "A lot of humanists have decided that religion is a natural human impulse and ... that there needs to be some kind of ritual and socialising aspect and that going to church or going to temple can help us to do that" (Murphy, 2001).  "Humanistic Judaism embraces a human-centered philosophy that combines rational thinking with a celebration of Jewish culture and identity.  Humanist Jews value their Jewish identity and the aspects of Jewish culture that offer a genuine expression of their contemporary way of life.  Humanistic Jewish communities celebrate Jewish holidays and life cycle events (such as weddings and bar and bat mitzvah) with inspirational ceremonies that draw upon but go beyond traditional literature" (Society for Humanistic Judaism).  La congrégation juive "Beth Chai" du Bethesda mentionne que les hommes ont la responsabilité de conduire leur propre vie indépendamment d'une autorité supranaturelle, que l'identité juive est la mieux préservée dans un environnement libre et pluraliste, que la liberté et la dignité du peuple juif doit aller de pair avec la liberté et la dignité de tous les autres êtres humains.  "Our services do not consist of worship of a supreme being.  We all believe that it is human beings who have the power and duty to make the world a better place.  We are not looking to someone else to help us" (What is humanistic judaism ?)

A côté des mouvements religieux conservateurs, orthodoxes et ultra orthodoxes, il existe aussi un judaïsme messianique : si la plupart des juifs religieux pensent que le messie doit encore venir, les juifs messianiques pensent que Yeshua de Nazareth (Jésus-Christ des chrétiens) était ce messie (International Alliance of Messianic Congregations and Synagogues).

Le judaïsme est caractérisé par l'absence d'autorité centralisatrice représentant l'entièreté du judaïsme, et donc par l'absence de réponses univoques vis-à-vis de l’évolution par exemple.

Aux Etats-Unis au moins, le judaïsme propose actuellement de ne pas enseigner le créationnisme dans les écoles publiques du moins selon l'American Jewish Congress, le Central Conference of American Rabbis et le Jewish Theological Seminary.  Selon le rabbin Richard Jacobs (2004), on peut croire en la réalité de la genèse mais aussi en la réalité de la science de l'évolution.  La science permet de comprendre comme le monde a été créé mais elle ne dit pourquoi pas il a été créé.  Mais, selon l'union des congrégations juives orthodoxes, les jours de la genèse doivent être compris comme 6 jours de la création d'un monde mature peuplé de créatures matures, et le darwinisme ne peut exister à côté de la croyance en la création (X10). La torah décrit pourquoi dieu a créé le monde et il n’est pas nécessaire de savoir comment (X10).

En Israël, actuellement bien que la plupart des juifs ne soient pas orthodoxes, le judaïsme orthodoxe a une autorité considérable dans la vie du pays par le contrôle des mariages, des enterrements, de la reconnaissance du caractère juif des individus, de la délivrance du certificat Kasher/cacher, concernant le choix alimentaire, etc.  La déclaration d'indépendance de l'état d’Israël garantit cependant la liberté religieuse "The State of Israël ... will be based on the precepts of liberty, justice and peace as envisaged by the prophets of Israël ; it will ensure complete equality of social and political rights to all its inhabitants regardless of religion, race or gender ; it will guarantee freedom of religion, conscience, language, education and culture".  Cependant, ces principes ne sont pas remplis complètement.  Aux dépens des juifs non orthodoxes, la branche orthodoxe du judaïsme est la seule forme de judaïsme reconnue au mécontentement des juifs de tradition plus libérale.  Ainsi des enquêtes récentes montrent que 67,9% des israëliens estiment que les partis politiques religieux ont trop de pouvoir, 63% que le judaïsme réformateur et conservateur devrait avoir le même statut légal que les orthodoxes, 63% que les cérémonies de mariage de tradition réformatrice ou conservatrice devraient être reconnus (alors que seul les services orthodoxes le sont).  Notons encore la discrimination des juifs messianiques et le fait que des personnes de différentes religions ne peuvent se marier en Israël

 

Autres religions et/ou sectes

- Bouddhisme: Le bouddhisme,  religion  et philosophie orientale,  est apparu en inde entre le  VIe et le IVe avant notre ère,  en réaction à l’hindouisme ,  il en rejette les nombreux dieux ; il n’est peut-être pas une religion dans le sens strict du terme, car non théiste, mais il l’est cependant par son côté métaphysique et mystique. Après plusieurs vies, le bouddhiste peut espérer atteindre le nirvana, phase ultime de bonheur.

Le bouddhisme n’est pas une religion révélée. Dans l’école bouddhiste classique, basée sur la retranscription des enseignements du Bouddha, fondateur, il n’y a aucune réponse métaphysique sur les origines du monde et de l’homme. Mais, comme dans d’autres religions, plusieurs courants existent où les origines de l’homme sont définies. Des créations répétées dans le temps se déroulent en différents cycles ou kalpa. Les organismes qui peuplent l'univers du kalpa précédent renaissent, l'un de ces organismes a formé l'homme à la base des populations humaines. Éventuellement l'univers peut disparaître et toutes les créatures retourneraient au stade d'âme.  La philosophie bouddhiste est évolutionniste et accepte un univers vieux de milliards d'années.  Bouddha enseigne que toutes les choses ne sont pas immuables, constamment elles apparaissent, changent et disparaissent.  La différence entre animaux et hommes n'est pas significative puisque tous possèdent des esprits qui survivent à la mort.

Les croyances bouddhistes ont été beaucoup moins mises en doute par la révolution scientifique (Weeramatna, 2004).  Si la plupart des religions basées sur des dogmes forment potentiellement une barrière à la connaissance, le bouddhisme n'est pas basé sur des dogmes et stimule la curiosité.  Le bouddhisme reste naturellement une croyance, mais uniquement comme une étape pour arriver à la sagesse.  Le but est donc l'émancipation de l'homme. Pour certains scientifiques, comme Albert Einstein (1879-1955), le bouddhisme est une religion acceptable par les sciences modernes [x]. Que l'on parle de Karma, où le vécu antérieur d’un individu détermine sa vie future, de comportement, d'éthique, de valeurs, d'esprit, toutes sont en harmonie avec les lois de la nature.

Un autre fondement est celui de l'indépendance de l'être humain, ainsi que celui des processus naturels sous influence complète des lois de la nature. Il n’y a pas de créateur mais il existe un résultat cumulatif de forces collectives naturelles par lesquelles certains êtres deviennent meilleurs ou plus forts. Bouddha a enseigné à ses disciples l'absence d'un créateur et d'un statut supérieur de l'homme par rapport à l'animal.  Un esprit est présent aussi bien chez l'homme que chez l'animal, esprit qui survit à la mort.

Le concept de l'évolution dans le bouddhisme est cependant celui d’un individu et non celui d’une population comme dans le néo-darwinisme moderne.  L'évolution, dans la version bouddhiste, concerne les organismes, qui atteignent des formes de vie plus intelligentes (ou éventuellement moins intelligentes) ; ces changements, sujets aux forces de Karma, connaissent un processus infini.

- Confucianisme (Confucius de 551 ans avant JC) et taoisme (tradition spirituelle chinoise du

Xè siècle) : peuvent être considérés plus comme des croyances que des religions, basées sur la méditation et la contemplation, elles demandent à chaque personne d’essayer d’appréhender les harmonies de l’univers ; le concept de divinité personnifiée et de création n’y sont pas présents

- Hindouisme, désigne au début de l’ère chrétienne les pratiques brahmaniques en Inde. Pour l’hindouiste, la religion est une manière de vivre et une manière d’évolution personnelle. L’hindouisme est polythéiste. Tous les êtres évoluent, l'homme n'est qu'une étape de l'évolution de la vie et du mouvement de l'âme vers la réalité ultime.  La réincarnation implique que le "karma"  d’un individu ne peut être vécu dans une seule vie. Après la mort, les âmes renaissent dans un autre corps, humain ou animal. La qualité de la réincarnation dépend des actes vécus dans la vie (ou les vies) précédente.

Suivant la tradition hindoue, des premières formes de vie à l'homme actuel il aurait fallu 8.400.000 naissances ; les histoires hindoues de création sont diverses, l'une parle du sacrifice du premier homme, Purusa, son corps était l'univers; l'autre décrite par les Puranas, anciens livres védiques (le terme sanscrit véda désigne la connaissance et le savoir), mentionne que l'univers se forme à partir de la respiration du dieu Vishnu, le dieu protecteur. L'hindouisme croit en l'évolution mais met l'accent sur l'évolution mentale et spirituelle, en passant d'un stade d'ignorance vers un stade d'illumination, et par des stades intermédiaires et progressifs d'ignorance et d'illumination partielle ; ainsi, l'hindouisme interprète l'évolution non seulement sur les transformations physiques mais sur un processus caché de libération de l'âme par détachements de tous désirs, d'efforts égoïstes et de pensées impures.

          Certains s’opposent au concept d’évolution darwinienne (X8, X9): les animaux doivent rester dans le monde animal jusqu’à ce qu’ils soient réincarnés en hommes. La seule explication de la diversité animale serait une création.

- Jaïnisme , philosophie et religion née en inde avant 600 ans avant JC : le jaïnisme ne vénère pas de dieu et considère que le monde existe depuis toujours. Donc, la doctrine de création doit être rejetée, un dieu immatériel ne pouvant créer une terre matérielle.

- Anciennes religions païennes:  le mot païen ou Paysan fut créé par les chrétiens pour qualifier les religions polythéistes. un thème fréquent est celui d'une déesse divisant les eaux, et créant le ciel et la terre.  Parfois, un dieu mâle sous forme de serpent s'y ajoute et la création peut être conduite par une femme.

- Eglise / secte de scientologie: La scientologie fut créée aux USA par Ron L. Hubbard en 1950.  Il se présente comme un scientifique alors que la plupart de ses diplômes sont faux ou délivrés par des universités malafide et aujourd'hui fermées.  La scientologie se présente comme une tentative d’améliorer les conditions de vie individuelle. Des séances de psychologie, très surpayées,  sont organisées. Les relations sexuelles perverses doivent être évitées, à savoir "des relations homophiles" ou même avec "des personnes de classes sociales ou de races erronées" !!.  Aux états-Unis, cette église est considérée comme une organisation religieuse; au contraire, en Europe, elle est le plus souvent considérée comme une secte totalitaire et dangereuse.

Selon Hubbard, les organismes vivants seraient tous issus "du virus et de la cellule" (X4).  Ces organismes, y compris les unicellulaires, pensent et apprennent: il postule que l'organisme peut par son "mécontentement" se changer en d'autres organismes.  Le principe de la vie est la survie.

Concernant l'homme, Hubbard prétend que le corps humain consiste en un esprit immortel (le thétane) et en une entité génétique (GE) située au centre du corps (X4).  La GE serait depuis longtemps présente sur la terre et aurait suivi l'évolution des organismes vivants, le thétane, au contraire, serait venu sur terre il y a 35000 ans pour "superviser le développement des habitants des grottes vers l'Homo sapiens" (X5)[xi].

Mais, l’interprétation des textes de cette secte, par ailleurs souvent contradictoires, signalent toujours que les singes, habiles et intelligents, furent rapidement suivis par l'homme de Piltdown, qui est considéré par les scientifiques comme un faux grossier.  Après l'homme de Piltdown, viennent les habitants des grottes, puis l'Homo sapiens.  La prochaine étape sera l'Homo novis, résultant de la scientologie,et  qui possèdera d'énormes forces mentales[xii].

- Mormons :Église fondée en 1830 par J.Smith aux USA. Elle est considérée comme "l’Église   des Saints des derniers Jours” qui se présentent comme la seule vraie Église, restauration de l'Église originelle du Christ et des apôtres. Ses membres peuvent être considérés comme créationnistes, l'homme est l'enfant de dieu.  Le créateur n'aurait pas pris des chemins aussi complexes que ceux de l'évolution pour former la vie.  Les livres des Mormons  publiés par cette église contiennent cependant parfois des articles favorables à certains principes de l'évolution.

- Hare Krishna: Krishna est un avatar de Vishnu qui a vécu au Ixe avant JC. Hare Krishna est une secte religieuse inspirée du Vaishnavisme (dédié à Vishnu, second terme de la triade brahmanique) hindouiste avec une dévotion particulière au dieu Krishna; leur philosophie est basée sur les écrits védiques, hymnes à Veda constitués, au Vè avant JC, de quatre livres sacrés de l’Inde écrits en sanscrit et attribués à la révélation de Brahma; ces livres doivent montrer la voie vers le monde spirituel et donner la chance de se retrouver à côté de SriKrishna. La réincarnation fait partie de cette croyance, qui permet par un bon comportement religieux de renaître comme Homme ou même comme entité supérieure sur une planète matérielle plus élevée. Cette secte est créationniste, Krishna a créé le monde matériel d’un univers infini mais qui ne représente qu’un quart du monde réel, le reste forme en effet le monde spirituel, non créé et non destructible.

- Témoins de Jéhovah: secte créée il y a plus d’un siècle aux USA.  Selon cette secte,   l'évolution est incompatible avec la bible, puisqu'elle dit que nous avons été créés de manière parfaite à l'image de dieu ; cette secte est donc créationniste même si le terme jour peut être interprété comme période (X15)

 

Religions traditionnelles 

- prenons l’exemple de la religion traditionnelle Akan, qui  est un terme  générique qui se réfère à un grand nombre de peuples au langage apparenté (50 % des groupes traditionnels au Ghana) ; elle envisage une multiplicité d’esprits dans l’univers en 4 catégories, le dieu suprême (Onyame), différents dieux résidant dans les rivières, arbres, montagnes, … et intermédiaires entre le dieu suprême et la société, les ancêtres jouant aussi un rôle d’intermédiaire. Tout l’univers a été créé par Onyame.

- Tribus amérindiennes: histoire de création où les ancêtres vivent dans les ténèbres à l'intérieur de la Terre Mère.  Par exemple, les Navajos, tribus de l’Amérique du Nord,  pensent que des insectes habitaient les 3 premiers mondes inférieurs, ils ont été expulsés par les dieux vers le 4 ème monde où ils aidèrent à créer le premier homme et la première femme. Ces derniers et leurs 10 enfants montèrent au 5 ème monde, celui que nous occupons encore.

- Yoruba: Yoruba  se réfère à une langue parlée par plus de 20 millions de personnes au Brésil, Togo, bénin et Nigéria; Cette religion traditionnelle est pratiquée depuis plusieurs générations.   Les  400 divinités de Yoruba sont connues  comme par exemple orisha, et la divinité suprême est Olorun, qui s’est créé lui-même et qui créa l’univers

- Bien d'autres mythes de création existent où parfois, comme chez les anciens Mayas au Mexique et Guatémala   et chez les Bantous de l’Afrique du Sud, les animaux sont créés en premier , mais comme ils ne sont pas en admiration devant leurs dieux créateurs, l'homme est créé secondairement.

 

- Raéliens: secte qui prétend que la vie a été créée par des scientifiques d'autres planètes.

 

En guise de Discussion

 

1. La Laïcite: doit-on renoncer aux illusions de toute-puissance?

Les anthropologues s’accordent à admettre que les notions de race, de supériorité ou d’infériorité des populations, sont dénuées de tout fondement scientifique. Actuellement, certains politiques tentent d’utiliser les différences culturelles pour justifier une prétendue supériorité d’une culture.

Les différences, au contraire, doivent être reconnues pour y trouver, par addition de leurs richesses, un progrès spirituel. Teilhard de Chardin pàrle de "diversité fonctionnelle" et de "complémentarité essentielle". Une société multiculturelle est un enrichissement mais elle ne peut aboutir, au nom du droit à la différence, à la liberté de choisir n’importe quel comportement. Le respect des droits de l’Homme, la liberté de conscience, l’égalité de l’homme et de la femme, la séparation de l’état et de l’Eglise, doivent rester des principes fondamentaux de la société. notre société doit se déclarer anticléricale, c’est-à-dire opposée à l’influence du clergé dans les affaires publiques, mais non antireligieuse, doit respecter les différences des individus  et devenir multiculturelle,  mais sans devenir une simple addition de communautés autonomes dont les droits seraient différents et antinomistes. Il faut refuser certains « messages » religieux qui utilisent la différence culturelle pour rejeter certains droits fondamentaux des individus. Ainsi, les religieux musulmans utilisent le port d’un "foulard" ou hijâb, signe qui n’est pas anodin malgré les apparences, comme un instrument d’aliénation des femmes et  tentent même d’interdire des cours tels ceux des sciences naturelles, d’éducation physique ou d’éducation sexuelle. Le point litigieux vient de la volonté de tous les clergés à prétendre imposer leurs dogmes à tous leurs fidèles, voire même à l’ensemble de la société.

"La liberté signifie la responsabilité.  C'est pourquoi la plupart des hommes la redoutent" (George Bernard Shaw, 1856-1950). 

"Secular humanism is antagonistic to established traditions and religious commitment.  Humanism has become for many the dominant religion of our time, a part of the lives of nearly everyone in the developed world" (Ehrenfeld, 1978).

"Cessons de rêver l'homme, cessons de faire de l'humanisme une religion : ce ne serait qu'un narcissisme généralisé ou hypostasié.  L'homme n'est grand que dans la conscience qu'il a de sa misère.  Il n'est humain qu'à condition de renoncer à la divinité.  L'homme, par exemple, n'est ni maître ni possesseur de la nature : si l'humanisme n'est pas un sous-ensemble de l'écologisme, il ne saurait non plus justifier une quelconque indifférence à l'environnement ou aux autres espèces vivantes.  La nature n'est pas Dieu, l'homme n'est pas Dieu : il n'y a pas de Dieu du tout, et c'est en quoi l'humanité est en charge d'elle-même, de la nature et de l'esprit" (A. Comte-Sponville, 1994)

"With the collapse of traditional belief structures, there has also been a dramatic transformation of the ways in which the world, society and the authority of political and social structures are regarded.  Probably for the first time in history, the religious legitimations of the world have lost their plausibility not only for a few intellectuals but for broad masses of entire societies" (Engelhardt Jr., 1991).

Etre humaniste, c’est cultiver la tolérance, c’est avoir confiance en la raison de l’Homme, c’est le respecter, c’est réclamer de l’autre cette même tolérance et ce même respect. Le mouvement laïque prône la liberté d'expression et le droit à la différence.  La laïcité est d’actualité en Europe occidentale, car elle concilie le fait de vivre ensemble et la diversité des êtres humains, sans nier les différences.  Mais, la laïcité n'avalise pas, au nom de la tolérance, l'irrationalité comme l'incompétence et même la nocivité  des astrologues,et les pratiques plus que douteuses de mages et autres gourous ; de même que  l'irrationalité de thérapeutiques risquées dites naturelles, l’interdiction de certains cours,et  le rejet de tout concept scientifique contraire aux textes sacrés.

Cependant, les témoignages de ces interdictions sont clairs : dans certaines écoles de l'agglomération bruxelloise, il n'est plus possible d'enseigner les notions d'évolution, certaines parties de la biologie ou aussi de l'histoire, la préhistoire, l’évolution de l'homme et du monde. Des tracts sont distribués à la sortie des écoles pour « rectifier » les cours de biologie.

L'intégrisme est présent dans toutes les religions, il n'est pas spécialement musulman, il est d'origine catholique aussi et est bien présent dans le judaïsme et le "revivalisme" protestant.  Si l'Europe de l'Ouest n'est plus actuellement terre d'intégrisme, les trois religions monothéistes  sont capables de fanatisme, elles sont promptes à parler d'offenses à leurs convictions et de sacrilèges lorsqu'elles sont en position de force. Ainsi, il existe une alliance entre les divers intégrismes religieux pour détruire le modèle laïque européen (Fourest et Venner, 2003).

De plus, il existe une alliance de fait entre les puritains protestants américains et les puritains saoudiens : les valeurs néo-fondamentalistes sont défendues avec l'argent des pétrodollars d'une part et le soutien des états-Unis d'autre part (Etienne, 2002). Il y a convergence entre intégristes chrétiens, juifs et musulmans : ils s’adaptent aux faits de société, et puisque, le racisme est une honte, on propose que toute critique contre la religion est un « racisme anti-religieux ». Pour tous ces intégrismes « quand dieu est le chef de l’homme, l’homme est le chef de la femme ». donc tous s’attaquent à l’égalité entre hommes et femmes, à l’accès à la contraception, au droit à l’avortement, à l’usage du préservatif dans la lutte contre le sida, à la liberté de pensée. Le danger du fondamentalisme irrationnel est de conduire à des conflits violents entre individus ou entre populations ne partageant pas les mêmes croyances.

Aristote proposait la présence d’une âme végétative au début de la vie embryonnaire, d’une âme sensitive chez les animaux mais aussi au stade où la future mère observe les premiers mouvements fœtaux. Dans un troisième stade une âme rationnelle se développe avec la possibilité de raisonner et dé penser. Il est naturellement plus agréable d'imaginer que nous sommes plus proches des anges que des singes, comme il est plus difficile d'accepter d'observer  le comportement des primates pour comprendre notre biologie et nos comportements que de se fier aux écritures sacrées.

"L'origine des espèces" de Darwin (1859 ) et ses théories de l’Évolution a probablement pesé lourd dans le déclin des religions.  Cependant, le darwinisme ne crée aucune impossibilité de croire en un Dieu. Pour les croyants, l'évolution peut être considérée comme une réalisation progressive, en quelque sorte dirigée par un plan divin.  Teilhard de Chardin, Jésuite, paléontologue et philosophe français (1881-1955)  voyait dans l'évolution de la vie le prolongement d'une évolution cosmique tout entière orientée vers l'homme : une sorte de créationnisme évolutionniste. Pour Arnould (1998) il s'agit d'un monstre de logique d'un esprit humain préférant les belles histoires de mythe originel aux austères récits évolutifs.  La science expose l'humanité à renoncer à ses illusions de toute-puissance : Copernic, astronome polonais (1473-1543) met les hommes hors du centre de l'univers, Darwin les place dans la lignée des animaux et les psychanalystes ne donnent plus confiance à l’ego de l’Homme  Les hommes se découvrent les purs produits du hasard, sans légitimité.  L'humiliation !

Les conceptions néo-darwiniennes de l’évolution humaine grâce à la Synthèse de l’Évolution vers 1940 par  Dobzhansky conçoivent l’Évolution comme buissonnante où de nombreuses branches abortives sont présentes, aléatoire, imprévisible (Susanne, 2003). Au début du XXème siècle, la plupart des biologistes imaginaient cependant l'évolution comme un processus linéaire orienté vers le progrès. C'est un peu de ce point de vue, de processus à une dimension, que certains catholiques notamment voient encore l'évolution humaine. L’espèce humaine a toujours été polymorphe, au niveau génétique et culturel. Dans l’avenir, vu le développement des capacités techno-scientifiques, l’homme interviendra probablement sur sa propre évolution, ce qui n’implique pas que ces transformations délibérées devraient entraîner une aliénation, une disparition de liberté ou de conscience.

Dans le domaine  religieux, on estime que la vérité existe et que la religion détient cette vérité.  L'intolérance religieuse trouve ses mécanismes les plus profonds dans ce rapport à la vérité.  En réaction contre cette intolérance, certains philosophes défendent l'idée d'un relativisme absolu où la vérité n'existe pas, et donc la tolérance ne serait pas le respect des autres discours, mais l'indifférence.  En fait, aucune instance ne possèdant cette vérité dans sa totalité, les discours doivent alors être relativisés et ouverts au dialogue et il faut nécessairement recourir à la confrontation des points de vue (Feltz, 2003).

Avec la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, les hommes se déclarent capables de se donner une éthique comme fondement de leur société.  Cela se caractérise par un renforcement de l'autonomie de la société par rapport à toute instance religieuse.  Ce phénomène apparaît comme irréversible et le religieux relève de plus en plus d'un choix personnel.

Les signes extérieurs religieux, issus de ce choix personnel, font actuellement partie d'un débat et de propositions de loi, au moins en France.  Il semble y avoir un accord pour dire que le port du foulard islamiste par exemple, lorsqu'il sert d'étendard à un islamisme revendicatif, lorsqu'il perturbe le programme scolaire et remet en cause certains cours, doit être interdit dans les écoles publiques .  Il ne faut pas que la tolérance religieuse permette de faire triompher l'intolérance.  Il y a débat cependant quant aux termes de la loi.  Ceux opposés à une légifération diront qu'il ne faut pas demander à l'islam de faire en 25 ans ce que le catholicisme a fait en 150 ans, et que s'il y a actuellement régression vestimentaire,cependant les jeunes filles musulmanes se marient plus tardivement, font plus d'études et ont moins d'enfants, qu’il y a donc progression.  Ils reprochent aussi de mettre trop l'accent sur l'islam alors que dans la réalité de la construction européenne, et de la constitution européenne, ce sont les différentes églises chrétiennes qui ont tenté d'influencer la rédaction de certains articles de cette constitution.

 Ceux en faveur d'une loi légiférant les signes extérieurs religieux veulent préserver l'école publique dans son accueil de tous les enfants sans distinction de sexe, d'origine ou de convictions religieuses ; ainsi le but est de préserver les enfants dans leur construction d'une citoyenneté éclairée et libre, à l'abri de tous les groupes de pression religieux.  Il faut garder la séparation de l'Eglise et de l'état qui seule permet d'avoir une égalité entre toutes les religions ainsi d’ailleiurs qu’avec l’humanisme athée. 

« Il faut apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon on mourra ensemble comme des idiots » (Martin Luther King, 1929-1968).

 

2. La bataille "perdue" ?

Quel est le rapport au monde d'un laïque qui n'est guidé par aucune révélation ?  L'homme est seul, ce qui ne le dispense pas du devoir de se donner une morale.  "C'est en l'homme, dans sa raison et dans sa liberté qui constituent sa dignité, qu'il faut fonder les principes du respect de l'autre, non dans une divinité" (Ferry, 1996).  "Il faut affirmer avec force la valeur de l'homme, de tous les hommes.  Affirmer et respecter la dignité de l'homme, à la condition expresse de laisser chaque homme définir sa propre dignité !" (Hanson, 2000).  "S'il ne faut, bien sûr pas tout tolérer, nous n'avons aucun critère objectif, aucun fondement universel, qui nous permette de déceler absolument de ce qui est, ou pas, tolérable.  Mais en avons-nous vraiment besoin ?  A-t-on besoin d'un fondement pour aimer la vie, la vérité, la paix ?" (Comte-Sponville, 1994).

"Dans les périodes révolutionnaires, on insiste sur la plasticité de l'être humain, son adaptabilité au milieu.  Dans les périodes réactionnaires, comme celle que nous vivons, on s'en va répétant que rien ne changera jamais, ... et on met en avant les aspects les plus noirs de l'être humain - l'irrationalisme, l'ethnicisme - en assurant que ces maladies sont incurables" (J. Bricmont dans R. Debray et J. Bricmont, 2003).  Dieu, l'état, la patrie sont des mystifications supra-humaines invoquées par certains hommes pour mieux en dominer d'autres.  Il y a ainsi une morale et un discours de justification du pouvoir et de cohésion ethnique car "Dieu est avec nous".  Il y a la croyance en des êtres imaginaires, une consolation concernant la continuation de la vie après la mort.  On représente souvent la religion comme s'occupant d'autres vérités que celles de la science.

"De façon générale, il n’ y a pas de conflit pour moi entre la foi chrétienne et les données scientifiques dont je m’occupe. Je en vois pas très bien sous quelle forme ce conflit pourrait naître, sauf si nous en venions à attribuer aux récits bibliques une compétence qu’ilns n’ont pas"  (Monod, Th 2004). On affirme qu'il n'y a donc pas conflit entre les deux: n'est-ce pas plus objectif de dire que ce conflit a eu lieu et qu'il a été perdu par la religion, il a fallu des siècles pour accepter les faits scientifiques.  Et aujourd'hui encore, là où certaines religions sont agressives, beaucoup de croyants interprètent littéralement les textes sacrés. Les créationnistes voient dans l’acceptation du principe d’évolution la "baisse de moralité" dans les sociétés occidentales ! selon eux, l’enseignement de l’évolution est responsable de la permissivité, de la pornographie, de la perversion, de l’usage des drogues, … !!

L’importance historique des livres sacrés n’est pas une garantie de vérité épistémiologique. Les croyances dépendent sans nul doute de mobiles psychologiques qui ne sont pas rationnels, elles répondent à un besoin affectif et à un besoin existentiel de spiritualité mais constituent néanmoins une "erreur" intellectuelle, notamment lorsqu’elles affirment que l’Homme est le résultat d’une création divine. Il ne faut pas céder au terrorisme du jour qui considère "positivisme", "rationalisme" avec une connotation négative permettant de discréditer les pensées scientifiques.  Le renouveau de la pratique philosophique doit se baser sur l'observation et non la spéculation, l'expérience reproductible et non l'intuition, la clarté du discours et non son obscurité, le débat public et non l'argument d'autorité.  Ce n'est pas de l'intolérance que de distinguer ce qui est rationnel et ce qui ne l'est pas ; la biologie et les sciences naturelles émettent des concepts rationnels, les religions mais aussi l'astrologie, la plupart des médecines dites parallèles ... ne le font pas.  L'étude de la culture ne peut plus ignorer les données des sciences biologiques: l'hostilité à toute approche biologique de l'homme est due à des préoccupations morales et religieuses par crainte notamment du déterminisme et de la disparition de notre libre arbitre.

Depuis le début des sciences modernes au XVIIème siècle, les conflits avec les religions ont débuté, et surtout avec ceux dont le prestige et le pouvoir dépendent de ces religions.  Au fur et à mesure des batailles "perdues", les religions vont se retirer dans le domaine privé. Les seules protestations significatives contre cette tendance proviennent de fondamentalistes ou intégristes, qui désirent refaire les batailles sur les mêmes sujets que celles du passé.

Il leur est difficile cependant de nier que les connaissances scientifiques ont amélioré les conditions humaines et de nier que la vérité est préférable aux mensonges.

 

3. On ne peut plus ignorer les Sciences biologiques

Les religions, comme tout ensemble complexe d'idées, sont des mèmes . Et en tant que tels, les religions participent à un système de reproduction et de sélection culturelle, dont dépendent leur succès et leur diffusion. Naturellement, dans le domaine des mèmes, un succès ne garantit pas la vérité du mème.  Ainsi, par exemple, le mème de l'astrologie est extrêmement populaire, et relève cependant du pur illogisme.

Seuls les créationnistes en restent à une interprétation biblique littérale de l’Évolution et essaient de convaincre que l'évolution n'est pas scientifique.  "It is crucial for creationists that they convince their audience that evolution is not scientific, because both sides agree that creationism is not" (Wilkins, 1997).

Je ne sympathise certainement pas (le lecteur l’aura déjà compris !) avec les idées fondamentalistes, leurs arguments étant complètement irrationnels.  Mais, je serais tenté de poser la question suivante: réconcilier l'âme et l'évolution est-il raisonnable ?. Certains acceptent, en effet, les principes de l'évolution , mais croient que l'acte de création divine est celui de l'esprit humain.  Mais, comment réconcilier ces deux concepts ?  Je ne crois pas en l'existence de l'âme, mais si elle a été réellement créée, à quel niveau de l'évolution l'a-t-elle été ,  des Homo sapiens aux hominidés qui les précèdent, ou encore à d'autres primates? Les Homo sapiens neandertalensis, Homo erectus, Homo habilis ont-ils eu une âme? Qu’est-ce qui a rendu une espèce d'hominidés si spéciale qu'elle reçut une âme et qu'elle put donc être sauvée par Jésus ?  Et les autres espèces d'hominidés, n'ont-elles donc pas été sauvées ?  Mais naturellement on pourrait toujours me répondre que "je ne sais pas mais je crois malgré tout".

On peut aussi toujours conclure par des phrases telles que "la vie de tout organisme, qu'il résulte d'un processus évolutif ou non, est un signe de dieu"!  "Le progrès scientifique est un mouvement dû à la guidance divine et ne peut donc être en conflit avec ce dieu"! On se trouve devant une sorte de doctrine « domino » : en ayant défendu les textes bibliques contre le concept de l’évolution, les religions sont obligées aujourd’hui de défendre envers et contre tout la genèse ou une partie de celle-ci, car si la genèse ne peut plus être considérée comme réelle, alors la bible ou les autres livres sacrés s'affaiblissent . Le concept d’évolution a depuis le XIXème siècle été et est encore considéré comme une menace pour les autorités religieuses traditionnelles. Admettre l’évolution est considéré par les créationnistes comme un suicide intellectuel, puisque ce serait renier les textes sacrés.

L'évolution ne correspond à aucun des mythes créateurs des différentes religions: ces mythes font parties de mèmes, dont le "succès reproductif" diminue très régulièrement, ils gardent seulement une certaine valeur allégorique.  Un mème relativement populaire est celui de l'évolution théiste qui admet la réalité de l'évolution humaine mais guidée par la volonté divine.  Une autre version ne voit la volonté divine que dans l'évolution de l'intelligence.  Une autre encore voit l'influence divine dans la création des premières formes vivantes à partir de matière non vivante.  Pour d'autres enfin, l'évolution se déroule sans influences divines, mais dieu aurait catalysé le Big- Bang à l’origine de l’univers .

Les sciences biologiques essaient de comprendre les mécanismes vitaux et mettent ainsi en doute les vérités révélées.  Peut-être est-ce pour cela que pour ceux qui estiment déposer  de la Vérité,  la science est si dérangeante. L'information se dispersant aujourd'hui à la seconde près dans notre village global,   les dépositaires de la vérité révélée trouvent trop souvent la solution de s'isoler et d'entraîner leurs ouailles dans ce même isolement.

Dans beaucoup de domaines scientifiques, la méthode scientifique est acceptée sans problèmes par les religions.  Mais, dans le domaine de la biologie et de l'évolution, les scientifiques peuvent être en contradiction avec leur foi et donc affirmer: "j'accepte la méthode scientifique si elle n'entre pas en conflit avec ma foi en la révélation".  Mais en faisant ainsi, on n'agit plus comme scientifique et en rejetant l'évolution (ou une partie de celle-ci) le biologiste se coupe de son "volant" de compréhension du monde vivant.

Les religions s'accommodent souvent de l'évolution, comme elles se sont accommodées en leur temps, de la terre ronde ou de la terre tournant autour du soleil, au prix d'interprétations de plus en plus libérales des textes bibliques.

Naturellement, les choix philosophiques hautement individualisés sont extrêmement larges du créationnisme à l'évolution humaniste.  Il y a un véritable continuum de positions avec des explications théistes diverses de l'évolution, et des textes sacrés qui deviennent des allégories.

La laïcité politique, avec le devoir d’impartialité des pouvoirs publics à l'égard des conceptions philosophiques et religieuses des individus,  demeure une exigence de toute démocratie.  Un état démocratique, c'est-à-dire un état laïque, doit garantir à tous ses citoyens l'exercice des droits et libertés publiques.  La liberté de conviction et son corollaire la liberté d'expression sont de ces droits essentiels (CAL, 2004).

 

En guise de Conclusion

Les écoles publiques doivent continuer à enseigner les sciences : particulièrement  les sciences paléontologiques qui ne sont ni bonnes ni mauvaises, car elles ont été rigoureusement testées par la communauté scientifique.  Ce n'est pas aux religions de dire et d'imposer ce qui peut ou ne peut pas être enseigné.  Ne laissons pas imposer l'ignorance, ce serait le risque de terminer la course dans le mur brun-noir du totalitarisme technopolitique et de la dictature de l’ignorance.

Je ne suis donc pas adversaire des croyances religieuses, mais à la condition qu'elles restent dans la sphère privée et qu'elles n'imposent pas directement ou indirectement des lois envahissant l'espace et les enseignements publiques  La tolérance s'applique en terme de respect de l'individu.  Mais, de la même manière que je ne peux admettre la xénophobie, le racisme, l'inégalité des sexes, le refus de mixité dans les écoles, je ne peux admettre que l'on refuse l'enseignement des avancées scientifiques, y compris l’enseignement de l'évolution humaine. Cet enseignement ne devrait peut-être pas se limiter aux sciences, mais aussi être abordé dans l’enseignement de l’histoire par exemple ou de l’Épistémologie  pour confronter les notions d’évolution aux mythes des religions, et pour développer l’esprit critique et susciter des questionnements. La perspective historique et la démonstration comparée ne peuvent que favoriser la réflexion et le non-dogmatisme.

Il est des endroits où la neutralité s'impose, et où l'expression d'une foi religieuse est inopportune, et ceci est le cas dans les services dispensés au public, les hôpitaux, les tribunaux, et naturellement les instituts d'enseignement.

Le savoir n’est cependant pas suffisant pour nous garder des épidémies idéologiques et pour combattre le fanatisme. L’enseignement ne peut donc se limiter à la transmission des connaissances, il est essentiel d’apprendre à apprendre et d’apprendre à être critique : le doute, le scepticisme, la contestation sont aussi des missions éducatives (A. Kahn, 2004). Le doute, essentiel à la science, est cependant perçu comme une menace pour et par certaines autorités religieuses.

Il est nécessaire d'armer nos étudiants contre les différentes formes de manipulations et la folie de l'extrémisme et du fanatisme.  Le fanatique refuse de donner toute explication à ses actes et ses pensées : il prêche la vérité et est insensible à tous les arguments ; il ne veut avoir aucune responsabilité vis-à-vis de ces concitoyens mais seulement vis-à-vis d'une autorité supérieure non contrôlable, son dieu.

Les sciences sont une condition nécessaire à l'humanisme.  Elles incorporent la nature sans la rendre sacrée, reconnaissant que nous sommes libres et responsables de donner une valeur à notre propre existence.  Les étudiants doivent être encouragés à donner forme à leurs vies de manière non dogmatique.

"Liberté signifie responsibilité. C’est pourquoi la plupart des Hommes la redoutent" George Bernard Shaw, 1856-1950).

 

Remerciements. Je tiens à remercier tout particulièrement Françoise Demoulin, Esther Rebato et Martine Vercauteren pour l’analyse très critique de ce texte, ce qui a sans nul doute permis de l’améliorer considérablement. De même, je tiens à remercier Esther Rebato et Elisabetta Marini pour la traduction de la version plus courte, respectivement en langue espagnole et italienne. 


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Notes



[i]  Souvent, ce fondamentalisme religieux est lié à un activisme politique comme les “Christian Right” aux Etats-Unis, les “Frères musulmans” dans les pays musulmans, le “Gush Emunim” en Israël, le “Baratiya Jaganata Party” en Indes.

[ii] Ce n’est qu’en 1871 que Darwin développera ses idées sur l’évolution de l’homme (The descent of man and selection in relation to sex). Comme il l’a écrit à Wallace, c’est pour des raisons tactiques qu’il ne l’a pas fait en 1859, il voulait éviter ainsi des critiques trop virulentes.

[iii] Après les publications de Darwin, l’église catholique a aussi créé une institution pseudo-scientifique, “Academia”, sous la direction du cardinal Wiseman. Clairement théologique, cet institut n’a jamais eu une influence décisive. Il en fut de même avec l’institut Victoria, créé par l’église anglicane.

[iv] Il s’agit d’une proposition du 19 février 2004 par la ministre de l’enseignement et de la recherche, Letizia Moratti (membre de Forza Italia). Sous pression d’une pétition largement suivis, la ministre a modifié sa proposition.

[v] Cette attitude n’est pas unique, nous verrons plus loin que la Grèce orthodoxe n’a pas l’enseignement de l’évolution à son programme, que la Serbie (voir orthodoxie) envisage de faire de même et que les Pays-Bas protestants ne mettent pas l’évolution dans les matières à examiner (même si théoriquement elle est au programme). La Suède ouvrit le premier musée crationniste à Uméa. Des pays, tels que la Russie et la Turquie, ouvrent leur porte au créationnisme.

[vi] La seule justification du très catholique Buttiglione (proposé en Oct 2004 comme commissaire européen), après ses propos homophobes et machistes devant le parlement européen, et le fait qu’il ait été rejeté comme commissionnaire, a été qu’il était “victime d’un complot anti-chrétien”.

[vii] Dans une assemblée d’environ 400 professeurs américains de biologie, la moitié déclare enseigner le créationnisme bien que la loi ne les y oblige pas (L. Devos, 2004)

[viii] Ils tentent malgré tout de s’insérer dans des journaux scientifiques à système de referees, comme un article de J. Wells en 1999 dans “The american biology teacher” et S.C. Meyer en 2004 dans “Proc. Biological society of Washington”, des journaux de réputation secondaire cependant.

[ix] "Et Dieu créa la ministre", a titré en "Une" avec humour le quotidien Glas Javnosti. Mme Colic avait déjà exprimé des doutes sur la théorie de l'Evolution, indiquant en particulier que "ce que nous savons sur les origines et le développement de l'Homme est encore plein de zones d'ombre".

[x] “The religion of the future will be a cosmic religion. It should transcend a personal god and avoid dogmas and theology. Covering both the natural and the spiritual, it should be based on a religiuos sense arising and a meaningful unity. Buddhism answers this description,... If there is any religion that would cope with modern scientific needs, it would be Buddhism” (X13)

[xi] Les conséquences du GE sont encore aujourd'hui apparentes: ainsi, un de nos ancêtres, un mollusque bivalve, est responsable de nos maux de dents car ces mollusques avaient des difficultés à ouvrir et à fermer les valves (?!?) De plus, les mollusques peuvent dessécher au soleil, les hommes s’en rappellent lors de coups de soleil ( ?!?). Après plusieurs étapes d’évolution, nous sommes devenus des paresseux souvent attaqués par des serpents et qui tombaient souvent des arbres, les hommes s’en souviennent par leur peur des serpents et par celle de tomber ( ?!?) (X4).

[xii] Pour ajouter à la confusion, un chef galactique nommé Xenu aurait été présent il y a 75 millions d'années.  Xénu, maître de différentes planètes surpeuplées, rassembla des milliards de personnes et les tua par des explosions atomiques.  Les thétanes survécurent et fusionnèrent en quelques milliers d'individus dont nous descendons.  Du fait que plusieurs thétanes forment un individu, chaque personne peut avoir plusieurs pensées, bonnes ou mauvaises: pour éliminer les mauvaises, il faut adhérer à la scientologie (X6).