Mènon, C.S., Hal El Fadl, S., Ahami, A.O.T., Latifi, M., 2015. Étude de l'impact des traumatismes crâniens sur les fonctions cognitives des patients neuro-traumatisés marocains de la région du Gharb. Antropo, 33, 81-90. www.didac.ehu.es/antropo


 

Étude de l'impact des traumatismes crâniens sur les fonctions cognitives des patients neuro-traumatisés marocains de la région du Gharb

 

Impact of head injuries on cognitive functions of neuro-traumatized Moroccan patients in Gharb region

 

Coffi  Sèdégnan Mènon1, Souad Hal El Fadl1, Ahmed Omar Touhami Ahami1, Mohamed Latifi2

 

1Equipe de Neurosciences Cliniques, Cognitives et Santé, Laboratoire Biologie et Santé, Département de Biologie, Faculté des Sciences, Université Ibn Tofail, BP 133, Kenitra, Maroc.

2Centre de Formation des Inspecteurs d’Enseignement, Rabat, Maroc            

 

Correspondance: Coffi  Sèdégnan Mènon. Equipe de Neurosciences Cliniques. Département de Biologie. Email: coffisco2007@yahoo.fr

 

Mots clés: Traumatisme crânien, Lésions cérébrales, Tests neuropsychologiques, Maroc

 

Keywords: Head injury, Brain injury, Neuropsychological tests, Morocco

 

Résumé

Le traumatisme crânio-cérébral (TCC) est  une altération de la fonction cérébrale provoquée par une force mécanique externe, provoquant une diminution de l’état de conscience. Ainsi, cela entraîne une altération des capacités cognitives ou physiques, qui peut aussi produire des troubles comportementaux ou émotionnels. Le présent travail est d’étudier et évaluer les séquelles neuropsychologiques suite à des lésions cérébrales à court terme durant les trois premiers mois suivant le traumatisme crânien.                 

Il s’agit d’une étude prospective effectuée dans le service de neurochirurgie au Centre Hospitalier Régional du Gharb Cherarda Beni H’ssen de Kénitra, portant sur 20 patients neurotraumatisés et 20 témoins, où les hommes sont plus touchés que les femmes par ce type de traumatisme. L’étude a été effectuée avec un échantillon de moyenne d’âge de 26,75 ans et un écart type de 16,34 avec des extrêmes compris entre 4 et 60 ans. Onze patients présentent un traumatisme crânien modéré et neuf patients sont des traumatisés crâniens légers. Trois tests neuropsychologiques ont été mis à la disposition de nos patients neurotraumatisés: Le bell’s test ou barrages de cloches, le test de Raven et l’empan de chiffres.               

 Les résultats obtenus ont montré des différences significatives chez les  patients en comparaison au groupe témoins. En outre, le test de Raven d’intelligence non verbale et celui d’empan de chiffres évaluant la mémoire verbale ont révélé dans chacun des cas que  les scores obtenus chez le groupe patients sont significativement plus bas par rapport au groupe témoins.

 

Abstract

The traumatic brain injury (TBI) is an alteration of brain function caused by an external mechanical force, causing a decrease in the level of consciousness. Thus, this leads to impaired cognitive or physical abilities, which can also produce behavioral or emotional disorders. The present work is to study and evaluate the neuropsychological sequelae after brain damage in the short term during the first three months after head injury.

This is a prospective study in the neurosurgery department at the Regional Hospital of Gharb  Cherarda Beni H'ssen Kenitra, involving 20 patients and 20 control neuro-traumatized, where men are more affected than women by this type trauma. The study was performed in sample with an average age of 26.75 years and a standard deviation of 16.34 with extremes between 4 and 60 years. Eleven patients had a moderate head injury and nine patients are mild head trauma. Three neuropsychological tests were made to our patients neuro-traumatized: The bell's test, the Raven test and digit span.

The results showed significant differences between patients compared to the control group. In addition, the Raven test of nonverbal intelligence and that of digit span assessing verbal memory revealed in each case that the scores obtained in the patient group were significantly lower compared to the control group.

                                              

Introduction

La prise en charge des traumatismes crâniens est un réel problème d'actualité. Cette pathologie est en effet une préoccupation de santé publique, que ce soit en terme de mortalité ou de morbidité. Les causes principales sont environ 40 % des accidents de la voie publique; 25 % sont causés par les chutes et 20 % par les agressions ou violence (Selzer, 1995; Gadoury, 1999; Bourque, 1999; Elovic et Kirschblum, 1999). C’est une pathologie qui touche surtout le sujet jeune et actif. Ainsi, plus d’hommes que de femmes sont affectés par ce type de traumatisme (Elovic et Kirschblum, 1999; Hal Elfadl et al., 2014).  

Lors de l’accident, les forces physiques mises en jeu entraînent au niveau du crâne et de son contenu des lésions immédiates ou primaires, dont l’évolution dans les heures et les jours suivant va déterminer l’apparition d’autres lésions dites lésions secondaires.   

Grâce aux progrès scientifiques, d’importantes réalisations ont été effectuées dans la prise en charge médicale et rapide des patients selon le diagnostic immédiat et précis des lésions qui peuvent bénéficier d'un traitement chirurgical (Gavett et al.,2011).              

Le système nerveux est à la base de la coordination des actions et de la communication rapide entre les différentes parties du corps (Spicher et al., 2010). En effet, le cerveau représente, le centre nerveux où s’élaborent les grandes fonctions cognitives, motrices, sensitives et associatives. Il se divise en quatre grands lobes: Le lobe frontal contrôle les mouvements, la parole, le comportement, la mémoire, les émotions et le fonctionnement intellectuel, comme la réflexion, le raisonnement, la résolution de problèmes, la prise de décisions et la planification (Cambier, 2012); il intervient de même dans le décodage cérébral où les premières études de décodage ont été réalisées en 2001 tout en démontrant que le souvenir des objets est encodé de manière très distribuée dans le cerveau. Ainsi, le lobe frontal est constitué de deux régions fonctionnelles bien distinctes; une région frontale postérieure motrice et le cortex préfrontal qui représente la région frontale antérieure. Le lobe pariétal contrôle les sensations comme le toucher, la pression, la douleur et la température. Il commande aussi l’orientation spatiale (compréhension de la taille, de la forme et de la direction); il est situé en arrière de la scissure centrale de Rolando et au-dessus de la scissure de Sylvius et communique en arrière avec les lobes temporal et occipital par une zone appelée le carrefour temporo-pariéto-occipital (Bossy, 1990). Le lobe temporal se charge du contrôle de l’ouïe, la mémoire et les émotions. Le lobe temporal gauche s’implique dans le langage. Il est situé en dessous de la scissure de Sylvius, c'est-à-dire au-dessous des lobes en frontal et pariétal tout en se trouvant, en avant du lobe occipital. Il possède 5 circonvolutions (T1 à T5).

Le lobe occipital s’intègre dans la vision. Il existe donc, une représentation particulière de la vision bien détaillée avec les voies optiques, appelée visuotopie (Nieuwenhuys et al.,2007).

Les traumatismes crâniens constituent une cause majeure d’handicaps à long terme. Ces handicaps sont en grande partie associés aux séquelles psychologiques multiples de l'atteinte encéphalique. Depuis une quinzaine d'années, des équipes de recherche ont entrepris des études approfondies sur les séquelles des traumatismes crâniens et sur leurs répercussions sur les activités sociales et professionnelles des victimes. La compréhension des mécanismes mis en jeu est indispensable pour une prise en charge cohérente. Le traumatisme crânien est une pathologie des confins, au carrefour de la neurologie et de la psychiatrie, de l’apport des neurosciences et de l’approche clinique du sujet (Truelle, 2005).

L’objectif de cette étude est d’évaluer les séquelles sur la santé neurocognitive des patients neurotraumatisés, hospitalisés au Centre Hospitalier Régional du Gharb Cherarda Beni H’ssen, en comparaison aux témoins; à travers trois tests neuropsychologiques:

-Le bell’s test ou test de barrage de cloches permet une évaluation attentionnelle sélective, visuo-spatiale et stratégique.

-Le test de Raven s’intéresse à l’intelligence neuropsychologique non verbale où le sujet est amené à analyser et à résoudre chaque problème du test en se basant sur un raisonnement inductif.

-L’empan de chiffres est un test mnésique.

 

Sujets et méthodes

Sujets

Nous avons colligé 20 traumatisés crâniens dont 4 de sexe féminin et 16 de sexe masculin, d’âge moyen 26,75 ans et un écart type de 16,34, avec des extrêmes compris entre 04 et 60 ans.

Les critères d’inclusion du traumatisme crânien sont les patients avec des lésions cérébrales du type: œdème cérébrale, contusion cérébrale, lésion osseuse, hémorragie méningée, hématome extradural, hématome sous-dural.

Les cas exceptés sont les AVC (Accident Vasculaire Cérébral), les tumeurs cérébrales...

Il s’agit d’une étude qui concerne deux groupes, 20 patients et 20 témoins dont les caractéristiques sociodémographiques sont semblables à ceux des patients.

Cette étude s’est déroulée durant les périodes d’Avril, Mai et Juin 2014 au sein du Centre Hospitalier Régional du Gharb Cherarda Beni H’ssen, Kenitra, Maroc.

 

Tests neuropsychologiques utilisés

Les patients ainsi que les témoins ont bénéficié de trois tests neuropsychologiques: le test d’empan de chiffres, de Raven (PM38) et le bell’s test ou test de barrage de cloches.

 

Test de barrage de cloches avec ses différentes stratégies et omissions

Le bell’s test encore appelé test de barrage de cloches est une épreuve permettant de mesurer l’attention sélective mise à la disposition du patient souffrant du traumatisme crânio-cérébral. Ainsi, la méthode utilisée est celle de Gauthier et al., (1989). Le test consiste à présenter  au patient traumatisé crânien une feuille au format A4 renfermant 112 dessins d’objets (scie, pomme, cheval, voiture, nuage….) dont 35 cloches. Il doit, durant 2 mn, barrer ou entourer le plus de cloches possibles. A la fin du test, le score (nombre de cloches barrées) est noté (Azzaoui et al., 2010). Le barrage de cloches a été utilisé dans cette étude afin de mesurer les capacités visuo-attentionnelles des patients neurotraumatisés (Odedys, 2005). En outre, le bell’s test ou barrage de cloches permet de distinguer des groupes avec et sans déficits neurologiques et des lésions de l'hémisphère droit ou gauche ( Ferber et Karnath, 2001).

 

Test des Matrices Progressives Standards de Raven (SPMR)

Les matrices progressives de Raven connues sous le nom de PM38 ont été conçues afin d’évaluer l’intelligence, la capacité intellectuelle et l’habileté mentale générale par l’intermédiaire de la comparaison des formes et du raisonnement par analogie (Azzaoui et al., 2008). L'épreuve des matrices progressives de Raven (1938) a été créée pour évaluer le raisonnement logique inductif.

Il comprend 60 problèmes divisés en cinq séries (A, B, C, D et E) de 12 problèmes, d’un ordre de complexité croissante chacune, se réalisant en deux phases; la 1ère phase comportant les séries A, B et C (en 30 mn) et la 2ème phase comportant les séries D et E (en 20 mn) (Azzaoui et al., 2010).

 

Test d’empan de chiffres

Il est basé sur l’échelle de Wechsler portant sur la capacité de mémoire verbale. Il consiste à déterminer le nombre maximal de chiffres que le patient est capable de répéter dans l’ordre où ils ont été énoncés: c’est l’empan de chiffres endroit (MCE). Quand le nombre de chiffres que le sujet doit répéter est dans l’ordre inverse de celui où ils ont été énoncés: c’est l’empan de chiffres envers (MCI) (Azzaoui et al., 2010). En effet, le test d’empan des chiffres a pour objectif de permettre une approximation des capacités de mémoire de travail (D’Amico et Guarnera, 2005; Deforge et al., 2006 ).

 

Résultats

Clinique

Traumatisme crânien isolé ou associé

Les vingt patients présentent des traumatismes crâniens isolés.

 

Etat neurologique

L’état de conscience met en évidence le score de Glasgow. L'échelle d'évaluation de la profondeur du coma la plus utilisée est l'échelle de Glasgow (ou Glasgow Coma Scale, GCS). Elle est ainsi utilisée pour évaluer aussi, la sévérité du trauma selon la durée de l’état de conscience altérée lors de l’entrée à l’hôpital (Teasdale et Jennet, 1974).

Le score de Glasgow permet de classer les TC selon le degré de sévérité:

TC léger: 13<GCS<15

TC modéré: 9<GCS<12

TC grave ou sévère: 3<GCS<8

Selon l’état de conscience(Glasgow) de nos patients:

11 patients ont un TC modéré et sont répartis comme suit:

2 patients de Glasgow GCS= 9

3 patients possèdent un GCS=10

4 patients avec un score GCS=11

2 patients de Glasgow GCS=12

9 patients sont de TC léger, distingués de la façon suivante:

3patients de GCS=13

6 patients avec GCS=15

 

Déficit neurologique

Trois cas présentent une aphasie

 

Résultats Scannographiques

Trois patients présentent un TDM normal.

Chez un patient, il peut y avoir une ou plusieurs lésions. Les résultats sont comme suit:

Œdème cérébral

On en dénombre 4 patients.

 

Hémorragie méningée

Nous avons recensé au cours du scanner 3 patients dont l’un d’entre eux a perdu la vue (cécité) au cours de l’accident.

 

Lésion osseuse

Elle a été retenue chez 7 patients,nous avons:

1 patient de type EA (Etage antérieur)

1 patient de type fracture fronto- pariétal droit

2 patients de type PCC (Plaie cranio-cérébral)

 

Hématome extra-dural

IL a été retrouvé chez 2 patients, dont 1 cas victime d’hématome de la fosse cérébrale postérieure.

 

 Hématome sous-dural

Deux patients présentent un hématome sous dural.

 

Contusion cérébrale

Sept patients présentent des contusions.

 

Traitement

Réanimation

Nous avons colligé au cours de notre enquête, 4(20%) patients sont admis en réanimation.

 

Traitement médical

Tous nos patients bénéficient d’un traitement médical à base d’antalgique et d’anticonvulsivant.

 

Traitement chirurgical

Huit (40%) patients ont subi une opération.

 

Rééducation

Seul 1 (5%) patient a subi la rééducation physique contre 19 (95%) qui n’ont subi ni la rééducation orthophonique ainsi que physique.

 

Résultats des tests neuropsychologiques

Les résultats obtenus corroborent qu’il existe de différences significatives entre les performances neurocognitives des patients en comparaison aux témoins. Selon le test de l’ANOVA, à un seul facteur, nous avons constaté qu’au niveau de matrice progressive de Raven, il existe de différence significative entre le groupe patients souffrant du traumatisme crânien et celui des témoins (p<0,05). Il en résulte alors, que les scores du test de Raven dont les résultats de la moyenne du groupe patients (Moyenne=17,82; E.T=10,53) sont moins importants par rapport à ceux des témoins (Moyenne= 33,70; E.T=6,46) (Tableau1).

Les résultats d’empan de chiffres montrent que la différence est significative lors de l’épreuve d’empan envers en comparaison aux groupes témoins (p<0,05) accompagnés d’une moyenne (Moyenne-Patients=1,72 < Moyenne-Témoins=2,25) ce qui veut dire que les fonctions cérébrales ont été atteintes suite à travers des lésions cérébrales engendrant des conséquences psychologiques avec la présence de signes pathologiques. Néanmoins, les fonctions cérébrales ne présentent aucune différence significative au niveau de l’empan endroit (p>0,05) (Tableau 2).

Ainsi, au niveau de barrage de cloches, les résultats obtenus à partir des scores n’ont montré aucune différence significative entre les deux groupes (p>0,05) (Tableau 3).

 

 

Score

 

 

 

 

 

Groupe

Score A

Score B

Score C

Score D

Score E

SCORE en PM38

Patients

Moyenne

7,82

3,24

3,47

2,29

1,00

17,82

Ecart-type

2,555

2,223

3,281

2,616

1,414

10,537

Témoins

Moyenne

9,80

8,80

7,00

5,50

2,55

33,70

Ecart-type

1,704

2,042

1,654

2,090

1,849

6,465

Tableau1. Scores en PM38 des groupes patients et témoins. Les résultats des scores sont représentés par  les moyennes. Les scores du groupe patients sont inférieurs à ceux des témoins avec différence significative (p<0,05).

Table1. PM38 scores in patients and control groups. The results of the scores are represented by the averages. The scores of the patient group are lower than those of control with significant difference (p <0.05).

 

Groupe

Empan  endroit

Empan envers

Patients

Moyenne

2,28

1,72

Ecart-type

0,461

0,752

Témoins

Moyenne

2,45

2,25

Ecart-type

0,510

0,444

Tableau 2.Scores du test d’empan de chiffres des groupes patients et témoins

Les résultats  sont représentés par les moyennes.IL en résulte que les valeurs sont significativement différents au  niveau de l’empan envers (p<0,05). Néanmoins, l’empan endroit confirme qu’il n’existe pas de différence significative (p>0,05).

Table 2.Digit span scores of patients and control groups. The results of the scores are represented by the averages. Values are significantly different at the back span (p <0.05). However, the direct span confirms that there is no significant difference (p> 0.05)

 

Groupe

Nombre de cloches barrées

Patients

Moyenne

27,65

Ecart-type

7,474

Témoins

Moyenne

27,30

Ecart-type

4,824

Tableau 3. Test de barrages de cloches des groupes patients et témoins. Les résultats  sont représentés par les moyennes. Aucune différence significative entre le groupe patients et témoins (p>0,05). 17 patients sur 20 ont passé  ce test dont 3 patients souffraient de troubles de mémoire.

Table3. Bell’s test scores of patients and control group. The results are represented by the averages. No significant differences between the patient group and control group (p> 0.05). 17 patients of  20 passed this test including 3 patients suffered from memory problems.

 

Test de Raven

Au cours du test de Raven, on constate un énorme écart en comparant, les scores de nos patients en raison du TC (Traumatisme Crânien); puisque ne disposant, d’étalonnage marocain, excepté celui de Latifi et al.,(2009) qui situe les adolescents marocains consanguins entre 13-18 ans portant sur la performance cognitive. Ainsi, par rapport à celui d’Azzaoui et al. (2010); nous énumérons qu’il n’y a aucune proportion des patients qui est classée dans le grade I où le sujet possède un QI (Quotient Intellectuel) excellent; de même aucun patient n’est abouti au grade II qui  représente un QI définitivement au-dessus de la moyenne, 3 parmi nos patients traumatisés crâniens sont classés dans le grade III (QI moyen), 2 patients  sont orientés dans le grade IV (QI sous la moyenne), 6 adolescents et 7 adultes de nos patients sont situés dans le grade V correspondant à un QI déficient. Notons que 2 parmi nos patients de type aphasique n’ont pas pu passer au test de Raven.

 

Test de barrages de cloches

Le test de barrage de cloches a montré que 17 patients sur 20 ont réussi au test. Cependant, 3 parmi nos patients souffrants de troubles de mémoire n’ont pas pu avoir accès à cetest.

 

Test d’empan de chiffres

Dix-huit patients sur 20 ont passé à ce test dont 2 cas de troubles aphasiques.

Les résultats du test de la mémoire des chiffres endroit ont corroboré tous les 18 patients traumatisés crâniens sont capables de répéter correctement les chiffres dans l’ordre avec une importante moyenne de score. Mais, au niveau du test de la mémoire des chiffres inverses, les patients présentent une mémoire pathologique avec une faible moyenne de score.

 

Discussion

La signification différentielle pourrait être à la base de la gravité des différents accidents suite aux traumatismes crâniens; sur nos 20 patients, nous avons remarqué que les AVP (Accidents de la Voie Publique) qui sont les plus fréquents et majoritaires dont 10 patients (50%) accidentés; ensuite viennent les agressions moins fréquentes par rapport aux AVP, ainsi 7 patients (35%) ont été agressés et finalement s’ajoutent les accidents de chutes dont 3 patients (15%) en sont responsables.

 

Evaluation de troubles attentionnels

Grâce au test de barrage de cloches, on constate malgré que les résultats ne sont pas significatifs entre les deux groupes patients et témoins. Nos patients neurotraumatisés sont moins attentionnels avec une stratégie de barrage de cloches plus désorganisée par rapport au second groupe.

En ce qui concerne le test des cloches; utilisé pour l’évaluation visuo-attentionnelle sélective, il a été remarqué qu’aucune tendance à l’amélioration ne fut observée c’est-à-dire il n’y a pas de différences significatives (p>0,05) entre le groupe patients ainsi que celui des témoins. Donc, on constate que  ces deux groupes possèdent une bonne performance vis-à-vis à ce test. Certains participants ont même obtenu des scores parfaits. Néanmoins, selon l’examen neuropsychologique de Paris (Ahami, 2011) qui révèle qu’au niveau du test de barrages de cloches il existe  9 types de stratégies qui ont été relevés (A, B, C, D, E, F, G, H et I); parmi lesquels la stratégie I, la plus désorganisée a été observée chez 7 patients neurotraumatisés par rapport à 2 cas chez les témoins. Par conséquent, les résultats obtenus chez nos patients pourraient s’expliquer par un épuisement mental. Ainsi, la fatigabilité mentale accrue lors des troubles attentionnels engendrent une baisse générale du rendement cognitif affectant toutes les phases de traitement de l’information (Ponsford et al., 1992 et Leclercq et al., 2000 cités par Azouvi et al. 2010).

La fatigue mentale s'exprime par une fatigabilité durant la réalisation de tâches cognitives, une irritabilité, ou encore une augmentation de la fréquence des maux de tête (Belmont et al., 2006).

Selon l'hypothèse du «Coping» (adaptation) de Van Zomeren et al. (1984, cité par Belmont et al. 2006) la fatigue mentale des patients TC serait directement secondaire aux troubles cognitifs, notamment attentionnels: elle serait due aux efforts supplémentaires fournis consciemment ou non, par le patient, pour compenser le ralentissement et les troubles cognitifs dans la vie quotidienne.

 

Evaluation de troubles d’intelligence

Les résultats de Raven sont statisquement significatifs entre les deux groupes.

Ce qui pourrait être à la base d’un raisonnement anormal inductif lors de la résolution des problèmes. Ainsi, certains auteurs ont corroboré que la perturbation de l’activité consciente, intentionnelle est fréquente à la suite d'un traumatisme (Luria,1973): le patient n’analyse pas les données d'un problème qui lui est posé; il n'établit pas de schéma ou de programme général de résolution du problème à partir de l’analyse préliminaire de ces données et se limite souvent à donner des réponses impulsives à certains éléments des données qui ont retenu son attention et qu’il a dégagés de l'ensemble; il éprouve de grandes difficultés à passer d 'une opération à une autre; enfin, il ne teste pas les résultats obtenus avec les données initiales du problème.

 

Evaluation de troubles mnésiques

Au niveau du test d’empan de chiffres dont le but est de tester la capacité de mémoire de travail et verbale. Il est constitué de deux types qui sont l’empan endroit et l’empan envers.

Le concept de mémoire travail renvoie à la capacité à maintenir une information en mémoire le temps de l'utiliser et d'effectuer des opérations cognitives plus ou moins complexes Baddeley (1986, cité par Robin et al., 2008).

Les résultats obtenus sont statisquement significatifs chez nos neurotraumatisés. Ces différences pourraient être dues qu’au niveau de l’empan envers où on débute le test de la droite vers la gauche c’est-à-dire sens contraire à la normale. Chez les patients TC (Traumatisme Crânien), les troubles prédominent sur la mémoire déclarative épisodique et sur la mémoire prospective, les mémoires simplicités semblant peu perturbées. Il s'agirait davantage d'un déficit de mise en action des processus mnésiques, peut-être secondaire aux troubles attentionnels et dysexécutifs, que d'une atteinte des stocks de souvenirs. En effet, il ne s'agit pas d'un véritable oubli à mesure mais plutôt d'une mauvaise stratégie d'apprentissage et de récupération de l'information, notamment en situation de double tâche, avec une mauvaise utilisation de l'imagerie mentale et de l'encodage syntaxique.

En outre, le test d’empan de chiffres est un test de mémoire verbale. Pendant laquelle les troubles de communications ont été déterminés au cours d’empan envers, chez les patients neurotraumatisés qui pourraient être l’un des facteurs qui empêche le bon déroulement de la conversation étant à la base d’une expression logorrhéique avec digressions et bavardages excessifs. Ainsi, le patient se laisse emporter par un flot de commentaires personnels non adaptés à la situation. On remarque parfois des persévérations de mots ou de thèmes, des phénomènes de palilalies (répétition involontaire d'un ou plusieurs mots) et d'écholalies (répétition des paroles de l'interlocuteur).

Les conséquences mnésiques, intellectuelles et attentionnelles pourraient perturber la vie familiale, sociale que professionnelle du patient traumatisé crânien. Le test de Raven a démontré les résultats significatifs neurocognitifs entre les patients lors de cette épreuve psychologique non verbale évaluant l’intelligence. Il y en a de même, pour le test d’empan de chiffres envers où les résultats sont significatifs. Ainsi, ces différences significatives confirmeraient que les patients neurotraumatisés présenteraient d’énormes difficultés et déficits significatifs à exercer des tâches sur le plan attentionnel mais ne démontrent pas la présence d'un déficit visuoperceptif ou d'un trouble de planification. Les tests neurocognitifs utilisés mettent un accent particulier sur la signification des patients dont l’impact du traumatisme crânien présente un déséquilibre sur la santé; du coup ils ont de la peine à se concentrer au moment de ces différentes tâches d’épreuves effectuées. Par raisonnement inductif, nous pouvons énumérer que ces patients neurotraumatisés présenteraient, certes; des signes pathologiques pendant les examens neuropsychologiques du TDM; ce qui pourrait être dû à des lésions cérébrales selon la gravité (légère, modérée ou sévère) rencontrées à travers les divers lobes du crâne soit temporal, occipital, pariétal, frontal.    

En effet, lorsqu’il est établi qu’un traumatisme crânien a provoqué une lésion cérébrale, l’importance de cette lésion doit être investiguée pour en déterminer la gravité (légère, modérée ou sévère) puisque les soins aigües ainsi que les services de réadaptations seront établis selon la gravité du TCC (Traumatisme Crânio-Cérébral) (Cappa et al., 2011).

 

Conclusion

La qualité de vie subjective nous semble en effet prendre en compte de façon non restrictiveles conséquences du traumatisme crânien sur la vie du blessé.

En ce qui concerne les résultats obtenus chez les patients traumatisés crâniens, modérés et sévères et légers, la meilleure satisfaction concerne la capacité des blessés à faire face aux actes de la vie quotidienne (AVQ), suivie par les relations sociales et personnelles. En revanche, ils ne sont pas satisfaits de leurs émotions et de leurs fonctions supérieures et plus gênés par leurs difficultés émotionnelles (anxiété, dépression, solitude). Cela confirme l’importance du «handicap invisible» dans le traumatisme crânien.

L’évaluation de la satisfaction du proche sur la qualité de vie du blessé a mis en lumière unesimilitude presque superposable dans les domaines source de satisfaction, d’insatisfaction et de gêne entre les TC et leurs proches. C’est-à-dire que les proches sont satisfaits de la capacité des blessés à assumer leurs besoins personnels (AVQ) et des relations du blessé avec sa famille. Par contre, l’insatisfaction des proches concerne les émotions et les sentiments du blessé et ils se trouvent plus gênés par les troubles émotionnels du blessé (colère, agressivité, dépression, anxiété).

L’impact de la psychopathologie sur la qualité de vie du blessé est considérable. La dépression, l’anxiété et l’alexithymie sont des facteurs pronostiques négatifs pour la qualité de vie du traumatisé crânien. En revanche, une bonne estime de soi, la mise en place des stratégies d’ajustement adaptatives et efficaces ainsi qu’un travail personnel sur soi (psychothérapie) sont des facteurs prédictifs d’une qualité de vie satisfaisante.

La psychothérapie et, en particulier, la psychothérapie de soutien associée à une prise en charge «holistique» du blessé a un impact positif non seulement sur la qualité de vie du blessé mais aussi, sur l’acceptation du handicap et la reconstruction identitaire.

 

Remerciements. Nos remerciements vont à l’endroit de toute l’équipe neurochirurgicale et au Directeur du Centre Hospitalier Régional du Gharb Cherarda Beni H’ssen kénitra-Maroc; ainsi qu’à la Délégation du Ministère de la Santé et de la délégation du Ministère de l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur, de la Formation des Cadres et de la Recherche Scientifiques à Kénitra, qui ont autorisé à réaliser cette étude.

 

Références bibliographiques

Aboussaleh Y. et Ahami A.O.T., 2005, Comparaison des mesures anthropométriques des enfants scolaires selon leur milieu de résidence: Etude dans la province de Kenitra au Nord Ouest du Maroc". Antropo, 9, 89-93.

Ahami A.O.T., 2011, Examen neuropsychologique sur les 9 types de stratégies (A, B, C, D, E,            F, G, H et I) de bell’s test ou test de barrage de cloches. Consensus, France ed. Paris.

Anne D., 2010, Les mystères du cerveau. Sciences humaines à la découverte du cerveau. Larousse, 2e éd.

Azouvi P., Belmont A., 2010, Le handicap invisible: principaux troubles cognitifs et comportementaux après un traumatisme crânien sévère. In: Expertise après traumatisme crânien sous la direction de Laurent-Vannier A, Pelissier J. Paris:Sauramps Médical. 15-20.

Azzaoui F-Z, Ahami A.O.T, Khadmaoui A., 2008, Relation entre les facteurs socioéconomiques, environnementaux et la malnutrition: Cas d'enfants âgés de 6 à 8 ans de la plaine du Gharb (Nord-Ouest Marocain), Antropo, 17, 1-5.

Azzaoui et al., 2010, Etude d’impact du milieu environnant sur les fonctions cognitives des enfants marocains de la région du Gharb. Antropo, 21, 19-25.

Baddeley, A.D., 1986, Working Memory. Oxford: Clarendon Press.

Bernard C., 2006, Le Pommier. Qu’est-ce qu’un neurone ? Sciences humaines à la découverte du cerveau.

Belmont A., Agar N., Hugeron C., Gallais B., Azouvi P., 2006, Fatigue et traumatisme crânien. Annales de Réadaptation et de Médecine Physique. 49:283-288.

Bossy J.,1990, Neuro - anatomie. Springer - Verlag France ed. Paris.

Bourque C., 1999, Cadre de référence clinique pour l'élaboration de programmes de        réadaptation pour la clientèle qui a subi un traumatisme cranio-cérébral (volet enfants et adolescents). Québec: Direction des politiques et programmes pour les accidentés,      Service de la programmation en réadaptation, Société de l'assurance automobile du    Québec.

Cappa, K. A., Conger, J. C. et Conger, A. J., 2011, Injury severity and outcome: a meta-          analysis of prospective studies on TBI outcome. Health psychology, 30 (5), 542-560.

Cambier J., 2012, Abrégé de Neurologie. Masson.

D'Amico A. et Guarnera M., 2005, Exploring working memory in children with low arithmetical achievement. Learning and Individual Differences, 15(3), 189-202.

Deforge H., Andre M., Hascoët JM., Toniolo AM., Demange V., Fresson J., 2006, Développement cognitif et performances attentionnelles de l'ancien prématuré «normal» à l'âge scolaire. Archives de pédiatrie, 13(9), 1195-1201.

Elovic, E., & Kirschblum, S., 1999, Epidemiology of spinal cord injury and traumatic brain injury: The scope of the problem. Topics in Spinal Cord Injury Rehabilitation, 5(2),1-20.

Ferber S., Karnath H. O., 2001, How to assess spatial neglect – line bisection or cancellation tasks? J. Clin. Exp. Neuropsychol. 23, 599–607

Gadoury, M., 1999, Cadre de référence clinique pour l'élaboration de programmes de réadaptation pour la clientèle qui a subi un traumatisme cranio-cérébral (volet adulte). Québec: Direction des politiques et programmes pour les accidentés. Service de la programmation en réadaptation, Société de l'assurance automobile du Québec.

Gauthier L., Dehaut F. et Joanette Y., 1989, The bells test: a quantitative and qualitative           test for visual neglect. Int J Clin Neuropsychol., 11, 49-53.

Gavett BE, Stern RA, McKee AC, 2011, Chronic traumatic encephalopathy: a potential late effect of sport-related concussive and subconcussive head trauma. Clin Sports Med, vol.30, no 1, p. 179-88.

Hal El Fadl S. et al., 2014, Etude réalisée sur les dossiers des patients traumatisés crâniens au service de neurochirurgie au Centre Hospitalier Régional du Gharb Cherarda Beni H’ssen-kénitra-Maroc.

Hal El Fadl S., Ahami  A.O.T., Menon Coffi  S., 2014, Étude de l'impact des traumatismes crâniens sur la santé neurocognitive de patients hospitalisés au Centre Hospitalier Régional du Gharb Cherarda Beni H’ssen-kénitra-Maroc.

Latifi, M., Soulaymani, A., Ahami, A.O.T., Mokhtari, A., Aboussaleh, Y., Rusinek, S., 2009, Comparaison des performances cognitives chez les adolescents consanguins et les non consanguins de la région nord ouest marocain. Antropo, 19, 57-65.

Leclercq et al., 2000, Le handicap invisible: principaux troubles cognitifs et comportementaux après un traumatisme crânien sévère. In: Expertise après traumatisme crânien.

Luria, A.R.,1973, The working brain. New York: Basic Books inc.

Mazaux J.M., Giroire J.M.,Vanier M. et al.,1991, Les troubles de mémoire des traumatisés crâniens graves, in traumatisme crâniens graves et médecine de rééducation, J.Pélissier, M, Barat, J.M. Mazaux éd., Paris, Masson.

Nieuwenhuys R., Voogd J., Van Huijzen C., 2007,The human central nervous system. Springer Verlag Berlin. 4ème edition.

ODEDYS., Outil de dépistage des Dyslexies, version 2., 2005. Laboratoire de Psychologie et Neurocognition. Université Pierre Mendès, France.

Ponsford J. et al., 1992, Le handicap invisible: principaux troubles cognitifs et comportementaux après un traumatisme crânien sévère. In: Expertise après traumatisme crânien.

Raven, J. C., 1938, Progressive matrices: A perceptual test of intelligence. London 7 H.K. Lewis.

Robin A., Kiefer C., Cochepin-Martins K., 2008,Troubles psychiques des         traumatisés crâniens sévères. Psychiatrie 37-546-A-10.

Selzer, M. E., 1995, Introduction: epidemiology and pathophysiology of traumatic brain          injury. Journal of Neurological Rehabilitation, 9(2), 55-60.

Spicher, C.J., Desfoux, N. et Sprumont, P., 2010, Atlas des territoires cutanés du corps humain; Esthésiologie de 240 branches. Montpellier, Paris: Sauramps Médical.

Teasdale, G. & Jennet, B.,1974,Assesment of coma and impaired consciousness: A pratical scale. Lancet, 2,81-84.

Truelle JL.,2005,The QOLIBRI story. Acta Neuropsychologica.3: 6–7.

Van Zomeren et al.,1974, Fatigue et traumatisme crânien. Annales de Réadaptation et de           Médecine Physique.