Sellam, E.B., Bour,
A., 2014. Anémie chez les femmes en âge de procréer au Maroc (Préfecture
d’Oujda-Angad). Antropo, 32, 35-44. www.didac.ehu.es/antropo
Anémie chez les femmes en âge de procréer au
Maroc
(Préfecture d’Oujda-Angad)
Anemia among women of childbearing age in Morocco (Prefecture
of Oujda- Angad )
El Bakkay Sellam, Abdellatif Bour
Équipe de la Transition Alimentaire et
Nutritionnelle (ETAN), Laboratoire des Essais Biologique, Département de
Biologie, Faculté des Sciences, Université Ibn Tofail, B.P: 133, Kénitra,
14 000, Maroc.
El Bakkay Sellam.
Email: Sellam79@gmail.com
Abdellatif Bour. Email:
abdellatifbour@yahoo.fr
Mots-clés: Anémie, Anémie hypochrome microcytaire, Hémoglobine, facteurs sociodémographiques,
Femmes, Maroc.
Keywords: Anemia, hypochromic microcytic
anemia, hemoglobin, sociodemographic factors, Women, Morocco.
Résumé
Objectif
L’objectif de la
présente étude est de déterminer la prévalence de l’anémie dans la préfecture
d’Oujda-Angad et l’influence des paramètres sociodémographiques sur son
incidence,
Matériel et Méthodes
Notre étude s’est déroulée dans la
préfecture d’Oujda-Angad, la capitale de la région de l’oriental du Maroc.
L’étude a porté sur 424 femmes âgées de 20 à 49 seins et pas enceints.
Résultats
L’âge moyen des femmes enquêtées est
de 34,14 ans ±8,35 ans. La tranche d’âge de 20 à 29 est la plus représenté
(38,7%). La
situation matrimoniale, l’âge, le nombre de grossesses, le nombre des enfants,
et l’activité du chef du ménage sont parmis les facteurs sociodémographiques
impliqués dans l’apparition de l’anémie. Les résultats montrent que l’anémie hypochrome microcytaire est la forme la plus représenté.
Conclusion
L’anémie est un problème
de santé publique au Maroc. Les preuves apportées par notre étude soulignent la
nécessité de la mise en œuvre des programmes éducatifs visant à améliorer la
connaissance nutritionnelle et la sensibilisation des femmes.
Abstract
Objective
The objective of this study was to determine the prevalence
of anemia in the prefecture of Oujda- Angad and influence of sociodemographic
parameters on incidence.
Materials and Methods
Our study was conducted in the prefecture of Oujda- Angad,
the capital of the region of Eastern Morocco. The study included 424 women aged
20 to 49 and not enceints breasts.
Results
The mean age of the women surveyed was 34,14 years ± 8,35
years. The age bracket 20-29 is the most represented (38,7 %). Marital status,
age, number of pregnancies, number of children, and the activity of the
household head are among sociodemographic factors involved in the onset of
anemia. The results show that the microcytic hypochromic anemia is the most
common form shown.
Conclusion
Anemia is a public health problem in Morocco. Evidence from
our study emphasize the need for the implementation of educational programs to
improve the nutritional knowledge and awareness of women.
Introduction
La carence en Fer, avec l’anémie qu’elle provoque est aujourd’hui la
maladie nutritionnelle la plus répandue dans le monde. Selon l’OMS l’anémie
dans le monde touche 30,2 % des femmes en âge de procréer et 41,8% des femmes
enceintes (Benoist
et al., 2008). Ces effets sur la santé de l'individu sont multiples, se
traduisant chez l'adulte par une diminution de la capacité physique (Gardner., et al 1977; FAO, 2013) et de la productivité (FAO, 2013; Basta et
al., 1979).
Chez la
femme enceinte, les anémies sévères peuvent augmenter le
risque de mortalité maternelle au cours de la grossesse et de l’accouchement de
3,7 % à 12,8 % (Khan
et al., 2006). L’anémie augmente également le risque de morbidité et
de mortalité infantile de 4,3 % (Jones, 2003), de prématurité, et de faible poids du nourrisson à la naissance
(Allen,
1997; Lone et al., 2004; Adam et al.,
2007; Haggaz et al., 2010; Kidanto et al., 2009).
Selon la littérature 1,5 % des décès à travers le
monde sont attribuables au déficit en fer (Badham et al., 2007). L’anémie est responsable du retard de développement mental de 40 à 60%
des nourrissons dans les pays en développement (Black et al., 2003), et a des conséquences négatives majeures sur la santé humaine et le
développement social et économique (FAO, 2013). Environ 20% des mortalités
périnatales et 10% des mortalités maternelles dans les pays en développement
seraient dues à la carence en fer (Stoltzfus et Dreyfuss, 1998).
Au Maroc, les rares enquêtes réalisées à l’échelle nationale ou régionale
montre que l’anémie reste toujours un problème de santé surtout pour les
femmes.
La prévalence de l’anémie par carence en fer chez les femmes enceintes est de
37,2% et est de 32,6% chez les femmes en âge de procréer (MS, 2000).
Ainsi, le but de notre travail, est de déterminer la prévalence de l’anémie
et ces formes morphologique dans la préfecture d’Oujda-Angad et d’examiner
l’influence des paramètres sociodémographiques sur son incidence.
Matériels et Méthodes
Notre étude s’est déroulée dans la
préfecture d’Oujda-Angad, la capitale de la région de l’oriental du Maroc, elle
est située
à la limite Nord-Est du Maroc, est sise à 12 Km de la frontière Algérienne et à 60 Km du
littoral méditerranéen. La superficie s’étend sur 1714 Km² soit 2,06% de la
superficie de la région de l’oriental. La préfecture se compose de 11 communes
(3 urbaines et 8 rurales). La population est de l’ordre de 477 100, qui se
localise dans le milieu urbain (86%),
dont 243 334 des femmes. Le taux d’analphabétisme au niveau de la
Préfecture est de 30% (HCP, 2005). La région urbaine de la préfecture d’Oujda
est considérée comme étant un centre administratif, commercial et industriel.
Les données de cette étude sont
issues d’une enquête transversale, dans six centre de santé de la préfecture
d’Oujda –Angad.
L’étude a porté sur 424 femmes en
âge de procréer (âgées de 20 à 49 ans) seins et non enceints, sélectionnées de
façon aléatoire pendant leur passage dans les différents bureaux des centres de
santé (bureau de planification familiale, bureau de santé maternelle et
infantile).
Les femmes ont été envoyées dans un laboratoire
d’analyses médicales privées, dans la ville d’Oujda pour réaliser un hémogramme.
L’anémie a été déterminée par le dosage du taux
d’hémoglobine à travers la numération sanguine complète. L'anémie a été définie
par un taux d’hémoglobine <120 g/l pour les femmes en âge de procréer.
Les hémogrammes ont été déterminés
sur un appareil automatique (CELLTAC) qui donne des informations sur les
globules rouges, les globules blancs, l’hémoglobine, hématocrite, le volume
globulaire moyen (VGM), la concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine
CCMH) et la teneur corpusculaire moyenne en hémoglobine (TCMH). La formule
sanguine a été réalisée manuellement sur un frottis fixé et coloré.
Nous avons exploité les indices
érythrocytaires CCMH et VGM pour la classification des anémies.
(Taux N= 30 à 35g/dl)
CCMH est normal dans l'anémie normochrome.
CCMH est bas dans l'anémie hypochrome.
(Taux N= 80 - 98
μ3)
VGM est normal dans l'anémie normocytaire
VGM est bas dans l'anémie microcytaire
VGM est élevé dans
l'anémie macrocytaire.
Les données sur le niveau
socioéconomique et démographique ont été collectées à l’aide d’un
questionnaire. Plusieurs variables ont été recueillies pour caractériser les
femmes enquêtées, notamment l’âge, la
taille du ménage, le nombre des enfants, la profession, le niveau d’éducation,
la profession du chef du ménage et le type de logement.
Les données de l’étude ont été saisies
et analysées sur le logiciel SPSS version 20 pour Windows. Les résultats sont
exprimés en moyenne écart-type ou en pourcentage. Les corrélations entre
l’anémie et les différentes variables ont été évaluées par le test de Spearman.
Le test de chi deux est utilisé pour comparer deux pourcentages. Le niveau de
signification a été fixé à 0,05.
(p<0,05, est significative)
Résultats
Caractéristiques sociodémographiques
L’âge moyen des femmes enquêtées été
de 34,14 ans ± 8,35 ans (tableau 1). Selon le tableau 2 la tranche d’âge de 20ans
à 29 ans est la plus représenté (38,7%), plus de 30 % des femmes sont
analphabètes, la plupart sont des femmes au foyer (96,8%) et la majorité sont mariée
(96%). Pour les femmes mariées, environ 51,6% sont des mères de moins de 2
enfants. 71% des femmes vivent dans des ménages qui dépassent 5 personnes
(Tableau 2).
Moyenne |
Ecart type |
Minimum |
Maximum |
|
Age (ans) |
34,14 |
8,35 |
20 |
48 |
Taille (m) |
1,61 |
0,06 |
1,47 |
1,96 |
Poids (Kg) |
72,88 |
14,10 |
32 |
126,00 |
Tableau 1. Paramètres anthropométriques des femmes.
Table 1. Anthropometric
parameters women
N |
% |
||
Age |
20-29 |
164 |
38,7 |
30-39 |
151 |
35,5 |
|
40-49 |
109 |
25,8 |
|
Situation
socioprofessionnelle |
actif |
50 |
11.79 |
inactif |
374 |
88.21 |
|
Situation matrimoniale |
célibataire |
14 |
3,3 |
mariée |
401 |
94,58 |
|
|
divorcé |
9 |
2,12 |
Niveau d'étude |
analphabète |
78 |
18,40 |
primaire |
169 |
39,86 |
|
secondaire |
169 |
39,86 |
|
sup |
8 |
1,88 |
|
Taille du ménage |
1-4 |
219 |
53,7 |
>5 |
205 |
46,3 |
|
Nombre d'enfants |
0 |
18 |
4,25 |
1-2 |
269 |
63,44 |
|
>3 |
137 |
32,31 |
|
Profession du chef du
ménage |
actif |
383 |
90,33 |
inactif |
41 |
9,67 |
Tableau 2. Caractéristiques
sociodémographiques des femmes.
Table 2. Women demographics.
Données biologiques
Les paramètres de la
lignée leucocytaire sont rapportés dans le tableau 3 et les paramètres de la
lignée érythrocytaire sont rapportés dans le tableau 4.
Les corrélations entre
les paramètres leucocytaires et érythrocytaires sont représentées dans le tableau 5, les résultats
montrent que l’hémoglobine et l’hématocrite sont associées positivement avec
les neutrophiles (p=0,01).
Moyenne |
Ecart type |
Minimum |
Maximum |
|
Neutrophile |
54,24 |
7,81 |
33,7 |
65,9 |
Eosinophile |
2,92 |
1,46 |
1 |
6 |
Basophile |
0,57 |
0,16 |
0 |
90 |
Lymphocyte |
36,08 |
7,27 |
23 |
51,6 |
Monocyte |
6,16 |
1,4 |
3,9 |
9,2 |
Tableau 3. Valeurs moyennes des
paramètres de la ligne leucocytaire.
Table 3. Average values of the
parameters of leukocyte
Moyenne |
Ecart type |
Minimum |
Maximum |
|
Globule rouge
(M/mm 3) |
6,63 |
0,25 |
3,98 |
5,08 |
Hémoglobine (g/dl) |
13,23 |
1,32 |
9 |
15,3 |
Hématocrite (%) |
39,19 |
3,38 |
29 |
45 |
VGM (fl) |
84,43 |
5,73 |
71 |
93 |
TCMH (pg) |
28,76 |
2,46 |
22 |
32 |
CCMH (%) |
33,82 |
0,92 |
31 |
35 |
Tableau 4. Valeurs
moyennes des paramètres de la ligne érythrocytaires.
Table 4. Average values
of the parameters of the erythrocyte
L’anémie
La valeur moyenne (IC95%) de
l’hémoglobine dans notre échantillon est de 13,24g/dl ± 1,34 g/dl, La valeur minimale est de 9 g/dl, et la valeur maximale est de 15,3 g/dl
(tableau 4). La
prévalence de l’anémie est de 16,1%.
La prévalence de l’anémie diminue
avec l’âge (p=0,01), le taux le plus élevé est observer chez les femmes de 20 à
29 ans (60%) (tableau 6). On n’a pas trouvé une différence significative de la
prévalence de l’anémie selon la situation matrimoniale des femmes (p>0,05).
La prévalence de l’anémie est significative selon le nombre de grossesse (p=0,002)
et le nombre d’enfants (p=0,005). Elle est plus élevée chez les femmes qui ont
plus de 2 enfants. L’anémie et plus accentuée chez les femmes issues des ménages
où le chef du ménage est inactive (p=0,006). La taille du ménage et le niveau
d’étude des femmes n’ont pas d’effet sur la prévalence de l’anémie dans notre
étude (tableau 6).
|
Leucocyte |
Neutrophile |
Hématie |
R=0,20 p=0,04 |
Ns |
Hémoglobine |
R=0,35 p= 0,000 |
R=0,24 p=0,01 |
Hématocrite |
R=0,33 p=0,001 |
R=0,24 p= 0,01 |
Plaquette |
R=0,11 p>0,05 |
Ns |
Tableau 5. Corrélation entre les
paramètres leucocytaires et érythrocytaires.
Table 5. Correlation between
leukocyte and erythrocyte parameters
N |
% |
p |
||||
Niveau d'étude |
analphabète |
113 |
26,66 |
0,1 |
||
primaire |
198 |
46,66 |
|
|||
secondaire |
113 |
26,67 |
|
|||
supérieur |
0 |
0,00 |
|
|||
Situation matrimonial |
célibataire |
85 |
20,00 |
0,000 |
||
Mariée |
339 |
80,00 |
|
|||
|
Veuf |
0 |
0 |
|
|
|
divorcé |
0 |
0 |
|
|||
Profession du chef du
ménage |
actif |
85 |
20 |
0,006 |
||
inactif |
339 |
80 |
|
|||
Taille du ménage |
1-4 |
170 |
40,00 |
0,3 |
||
>5 |
254 |
60,00 |
|
|||
Nombre d'enfants |
0 |
85 |
20,00 |
0,005 |
||
1_2 |
254 |
60.00 |
|
|||
>3 |
85 |
20.00 |
|
|
||
âge |
20,29 |
226 |
53,33 |
0,01 |
|
|
30,39 |
141 |
33,33 |
|
|
||
40,49 |
57 |
13,33 |
|
|
Tableau 6. Corrélations entre
l’anémie et les facteurs sociodémographiques.
Table 6. Correlations between anemia and sociodemographic
factors
Classification
de l’anémie (Tableau 7)
Classification des anémies selon le
VGM: les anémies microcytaires représentent (87,9 %) suivies des anémies
normocytaires (12,10%).
Classification des anémies selon le
TCMH: les anémies hypochromes sont les plus fréquentes (88,6%) que les anémies
normochromes (11,4%).
Classification des anémies selon le
VGM et le TCMH: l’anémie hypochrome microcytaire est la plus nombreuses
(88,57%) que l’anémie normochrome normocytaire 11,43%.
Prévalences (%) |
|||
Typologie |
selon VGM |
Microcytaire |
87,9 |
Normocytaire |
12,1 |
||
selon le TCMH |
Hypochrome |
88,6 |
|
Normochrome |
11,4 |
||
selon VGM et TCMH |
Normochrome
Normocytaitre |
11,43 |
|
Hypochrome
microcytaire |
88,57 |
Tableau 7. Prevalence of
anemia according to its type, the corpuscular volume (VGM) and mean corpuscular
hemoglobin (TCMH).
Table 7. Prevalence of anemia
according typology according corpuscular volume (VGM) and mean corpuscular
hemoglobin (TCMH).
Discussion
La malnutrition carentielle en vitamines et en minéraux, en particulier les carences en fer, vitamine A et iode, représente un problème majeur
de santé publique en raisons de leurs prévalences enlevé et leurs conséquences négatives aussi bien sur la santé humaine que sur le développement social
et économique (FAO, 2013).
L’anémie est définie comme un état pathologique dans lequel
la teneur du sang en hémoglobine est inférieure à 12 g/dl chez les femmes non
enceintes (OMS, 2001). Elle se produit à tous les stades du cycle de vie, mais
elle est plus fréquente chez les femmes enceintes et les jeunes enfants. Les
femmes en âge de procréer sont donc plus susceptibles à développer une anémie
parce qu'elles ont plus besoin de fer pour des raisons diverses biologiques;
les menstruations, les grossesses et l’allaitement etc.
Dans ce cadre, la présente étude a été menée dans l’objectif
d’estimer la prévalence de l'anémie chez les femmes adultes entre 20 et 49 ans
afin d’évaluer l’ampleur chez ces femmes de ce problème en âge de procréer.
Au Maroc peu d’études se sont
intéressées à la prévalence de l’anémie que ce soit au niveau nationale ou
régionale. La dernière enquête réalisée au Maroc sur la prévalence de l’anémie
par carence en fer revient à l’an 2000, les résultats de cette enquête montrent
que la prévalence de l’anémie est de 32,6%
chez les femmes en âge de procréer (MS, 2003). Par ailleurs, notre étude a révélé un
pourcentage de 16,1%, ce résultat est similaire à celui enregistré par une
enquête réalisée au niveau de Rabat-Salé (16,6%) (ElHsaïni et al., 2013). L’amélioration peut être explique par le programme de fortification
nationale des farine en fer et vitamines B mené par le ministère de la santé.
Les prévalences affichées dans
d’autres régions du Maroc ou dans quelques pays en développement montrent des
disparités. Toutefois, il est difficile de comparer ces
chiffres en raison de l’hétérogénéité des références ou des méthodes utilisées
pour le dosage de l’hémoglobine, ou encore l’état sanitaire des femmes
enquêtées.
La répartition par tranche d’âge
montre que la moitié des femmes âgées de 20 à 29 ans sont anémiques alors qu’elle
n’est seulement de 13,3% pour les femmes de 40 à 49 ans. Ce résultat est
similaire à une étude réalisé dans la région d’El Gharb en 2009 (Aboussaleh et al., 2009). Cette prévalence peut être due à la fréquence de grossesse dans cet
âge.
Par ailleurs le niveau d’instruction des femmes n’est pas
associé à l’anémie selon nos résultats, ceci revient au fait que la plupart des
femmes enquêtées sont analphabètes ou ayant seulement un enseignement primaire,
résultats similaire ont été trouvés dans une autre étude réalisé au Maroc entre
2008 et 2010 et publié en 2013 (Agnes et
al., 2013). Cependant, une étude réalisée dans la région de Kénitra a
montré que la prévalence de l’anémie diminue avec le niveau d’études des femmes
(Aboussaleh et al., 2009).
De même, nous n’avons pas trouvé une association entre
l’anémie et l’état matrimoniale, ce même résultat a été montré dans l’étude
réalisée au Maroc et en Tunisie (Agnes et
al., 2013). Dans notre cas cela peut être expliqué par le pourcentage très
élevé des femmes mariées dans notre échantillon (96,3%). Cependant, on a montré
que le risque de développer l’anémie est plus élevé chez les femmes à 3 enfants
ou plus que chez les femmes de moins à 2 enfants. Ceci est en accord avec les
résultats Agnes et ses collaborateurs en 2013 (Agnes et al., 2013). La
multiparité peut induire une anémie en réduisant les réserves maternelles en
fer à chaque grossesse à cause de la perte du sang au cours de l’accouchement. Par ailleurs, il
a été montré qu’au cours de la grossesse, l’anémie est principalement liée à
une carence en fer (Adelekan et Adeodu, 1998; Marchant et al., 2002), les femmes enceintes anémiques ont un risque plus
élevé d’accoucher un nourrisson de faible poids à la naissance (Adam et al., 2007; Haggaz et al., 2010; Kidanto et al., 2009). Les besoins en fer pour
les femmes enceintes ne peuvent pas être couverts uniquement par sources
alimentaires (Lone et al., 2004). Par
conséquent, des suppléments quotidiens en fer et d’acide folique ont été
recommandés universellement (Stoltzfus et Dreyfuss,1998).
La situation socioprofessionnelle du chef de ménage est
significativement corrélée à l’installation de l’anémie chez les femmes. Ainsi,
la prévalence de l’anémie est faible lorsque le chef du ménage possède une
profession, même résultat observé par El Hssaini et ses collaborateurs en 2013
(ElHsaïni et al., 2013). En effet, le
niveau socioéconomique élevé permet l’accès des ménages à une alimentation
équilibrée et riche en fer et en vitamines. L’OMS a montré que la consommation
de viande (source de fer héminique) s’accroit dans les PED grâce à
l’augmentation des revenus (OMS, 2003).
Les corrélations entre les paramètres érythrocytaire et
leucocytaire montre que l’hémoglobine et l’hématocrite sont corrélés
positivement avec les neutrophiles, ces résultats ont été trouvés également
dans une étude mené dans la région de Kénitra (ElHioui et al., 2006). Les neutrophiles sont les premières barrières de
défense immunitaire lors de l’introduction d’un agent pathogène dans
l’organisme (bactérie, champignon, molécules endogènes). L’anémie diminue donc
l’immunité dans le corps humain ce qui augmente le risque des infections (Berger,
Dillon 2000).
Nous avons constaté que la plupart des anémies morphologiques
sont microcytaires hypochromes (88,57%), et 11,43 % sont normocytaires
normochromes. Les anémies microcytaires sont les plus fréquentes dans notre
échantillon 87,90% ces résultats sont similaires à d’autre études au Maroc (MS, 2000; ElHioui et al., 2006).
L’anémie hypochrome microcytaire est la forme la plus
observé dans notre échantillon. Selon la littérature cette forme d’anémie est
en relation avec l’anémie ferriprive et inflammatoire. Il est généralement
admis que 50 % des cas de l'anémie est due à une carence en fer (OMS, 2006).
Dans les pays en développement, l’anémie est causée principalement par la
carence en fer (Berger, Dillon 2002).
L’anémie ferriprive pourrait être due soit à une
insuffisance de l’apport en fer ou bien à une mauvaise absorption de cet
élément au niveau intestinal.
Il est largement connu que le fer existe dans plusieurs type
des aliments que ce soit les végétaux ou les animaux. Seulement la forme la
plus facilement absorbée est celle présente dans les viandes (Fer héminique). Nous
avons observé que la plupart des femmes enquêtées mange les viandes une à deux
fois par semaine. De ce fait, une alimentation pauvre en viandes peut provoquer
une anémie, en effet certaines études ont montré que la faible consommation de
viande est associée à l’anémie (Wolmarans et
al., 2003; Baig-Ansari et al.,2008).
Au Maroc, les gens mangent généralement peu de viande (11 Kg/habitant/ans) (FAO,
2009) par rapport aux pays développés ou la consommation atteint 82
Kg/habitant/ans (FAO, 2009).
Les marocain consomme à la moyenne 213g des fruits et
légumes par jours qui reste faible aux recommandations de l’OMS (Edwidg, 2012),
ces aliments sont très riche en minéraux et surtout en vitamine telle que la
vitamine C qui augment l’absorption du fer au niveau de l’intestin qui peu
participé à l’anémie nutritionnelle. Les régimes qui dépendent fortement des
céréales peuvent également contribuer à la carence en fer et en zinc du fait de
l'effet inhibiteur des niveaux élevés d'acide phytique souvent trouvé dans ces
agrafes sur l'absorption des oligo-éléments (Bo Lonnerdal, 2000; Qianyi et al., 2012).
D’autre part, la présence des inhibiteurs de l'absorption du
fer comme les phytates ou les phénols, très présents dans les aliments
d'origine végétale, ou bien l'absence des promoteurs de cette absorption telle
que la vitamine C participent au développement de l’anémie (Wolmarans et al., 2003). L’une des
caractéristiques des habitudes alimentaire des marocains et la présence du pain:
c’est un élément essentiel sur la table « le pain servant de
fourchette ». La consommation du pain lors des repas surtout en présence
des aliments riches en fer, peut inhiber l’absorption de cet élément à cause
des phytates qu’il contient. De plus, le thé, boisson la plus consommé au Maroc
est très riche en phénol qui peut également réduire l’absorption du fer, en
effet, certaines études ont associé la consommation du thé à l’anémie (Baig-Ansari
et al., 2008; FAO, 2009) alors que d’autres montrent que le thé réduit
l’absorption du fer mais n’influence pas les réserve en fer dans le corps (Zijp
et al., 2000; Mennen et al., 2007). En outre, la plupart des femmes enquêtées consomment
les fruits (source principale de
vitamine C) après les repas, ceci augmente le risque de la détérioration de la
vitamine C dans l’estomac par l’acidité gastrique et diminue l’absorption du
fer au niveau du duodénum surtout pour le fer non héminique.
Toutes ces mauvaises habitudes alimentaires pourraient donc
contribuer à l’installation de l’anémie ferriprive.
Nos modes de consommation sont largement influencés par
notre lieu de résidence, et par la persistance des poches de pauvreté au Maroc
qui est corrélé avec le retard de croissance (HCP, 2011). En outre, des
disparités s’opèrent au sein même des couches sociales de la population.
Conclusion.
L’anémie est un problème
de santé publique au Maroc. Dans le but de réduire ce problème de santé au
Maroc, le ministère de la santé a développé un programme nutritionnel national
de lutte contre les carence en micronutriments impliquent la fortification des
farine en fer et vitamines B (thiamine, riboflavine, niacine et acide folique)
et la supplémentation en fer et acide folique pour les femmes enceintes. (MS,
2003). Les preuves apportées par notre étude soulignent la nécessité de la mise
en œuvre des programmes éducatifs visant à améliorer la connaissance
nutritionnelle et la sensibilisation des mères et les travailleurs de la santé.
Remerciements. Nos remerciements à M.
le Directeur Régional de la Santé, M. le Délégué de la Délégation de la Santé
de la Préfecture d’Oujda-Angad et tout le personnel des Centres de Santé qui
ont contribués de près ou de loin à cette étude est pour leurs aides pour la
collecte des données de cette étude. Nos remercient également l’Équipe de la
Transition Alimentaire et Nutritionnelle (ETAN), Laboratoire des Essais
Biologique, Département de Biologie, Faculté des Sciences, Université Ibn
Tofail.
Références
Aboussaleh Y, Farsi, M, El Hioui M, Ahami, A., 2009.
Transition nutritionnelle au Maroc: Coexistence de l’anémie et de l’obésité
chez les femmes au Nord Ouest marocain. Antropo, 19, 67-74. www.didac.ehu.es/antropo
Adam I, Babiker, S., Mohmmed, A., Salih, M., Prins, M.,
Zaki, Z., 2007. Low body massindex, anaemia and poor perinatal outcome in a
rural hospital in eastern Sudan. Journal of Tropical Pediatrics 54, 202-204.
Adelekan D, Adeodu O, 1998. Anaemia in Nigerian mothers and
their children: relative importance of infections and iron deficiency. Afr J
Med Sci; 27: 185-7.
Agnes G, El Ati J, Traissac P, Bour A, Berger J, Edwige L,
El Hsaıni H, Ben Rayana C, and Delpeuch F, 2013. A Double Burden of
Overall or Central Adiposity and Anemia or Iron Deficiency Is Prevalent but
with Little Socioeconomic Patterning among Moroccan and Tunisian Urban Women.
The Journal of Nutrition.
Allen LH, 1997. Pregnancy and iron deficiency: Unresolved
issues. Nut Rev. 55:91-101
Badham, J., Zimmermann, M.B., et Kramer, K., 2007. Le guide
de l'anémie nutritionnelle. Suisse: Sight and Life.
Baig-Ansari N, Badruddin SH, Karmaliani R, Harris H, Jehan
I, Pasha O, Moss N, McClure EM, Goldenberg RL, 2008. Anaemia prevalence and
risk factors in pregnant women in an urban area of Pakistan. Food Nutr Bull, 29:132-9.
Basta S, Soekirman M, Karryadi K, Scrimshaw N, 1979. Iron
deficiency anemia and the productivity ofadult males in Indonesia. Am] Clin
Nutr. 3:916-25.
Benoist B et al., 2008.
Worldwide prevalence of anaemia 1993-2005. WHO Global Database on Anaemia.
Genève, Organisation mondiale de la Santé.
Berger J, Dillon 1, 2002. Stratégies de contrôle de la
carence en fer dans les pays en développement. Cahiers Santé; 12(1):22-30
Black RE, Morris SS, Bryce J, 2003. Where and why are 10 million
children dying every year. Lancet; 361: 2226-2234.
Bo Lonnerdal, 2000. Dietary Factors Influencing Zinc
Absorption. American Society for Nutritional Sciences. 1378S/1383S.
Edwige L, 2012. Fruit and vegetable consumption and its
determinats amongst moroccan women, in the context of nutrition transition.
thesis octobre. University of Nottingham.
El Hioui M, Ahami, A, Aboussaleh Y, Lemrini, J, Loutfi H, 2006,
Anémie en milieu hospitalier Marocain: Typologie et influences des facteurs
sociodémographiques sur son incidence. Antropo, 12, 83-91.
www.didac.ehu.es/antropo
El Hsaïni H, Gartner A, Berger J, Aguenaou H, Landais E,
Ayyat O, Maire B, El Ati J, Delpeuch F, El Kabbaj S, Bour A, 2013. Coexistence de surpoids/obésité et d’anémie
chez les femmes de Rabat-Salé.Biomatec Journal, 8:5767.
FAO, 2009. La situation mondiale de l’alimentation et de
l’agriculture. Organisation des nations unies pour l’alimentation et
l’agriculture, Rome. disponible au http://www.fao.org/docrep/012/i0680f/i0680f.pdf.
FAO, 2011. Profil Nutritionnel du Maroc. Division de la
nutrition et de la protection des consommateurs.
FAO, 2013. La situation mondiale de l’alimentation et de
l’agriculture FAO, 2013. www.fao.org/publications/sofa/fr/.
Gardner GW, Edgerton VR, Senewiratne B, Barnard RJ, Ohira Y,
1977. Physical work capacity and metabol ic stress in subjects with iron deficiency
anemia. Am Clin Nutr; 30: 910-7.
Haggaz, A.D., Radi, E.A. & Adam, I., 2010 Anaemia and
low birth weight in Western Sudan. Transactions of the Royal Society of
Tropical Medicine and Hygiene 104, 234-236
HCP, 2005. Direction de la statistique. Recensement Général
de l’Habitat et de la Population 2004. Haut Commissariat au Plan.
HCP, 2011. Direction de la statistique. Enquête Nationale
Anthropométrique ENA 2011. Principaux résultats. Haut Commissariat au Plan.
http://whqlibdoc.who.int/publications/2011/9789242594010_fre.pdf.
http://www.who.int/nut/documents/ida_assessment_prevention_control.pdf,
Jones G, 2003. How many child deaths can we prevent this
year. Lancet; 362: 65-71.
Khan KS, W. D., Say L, Gulmezoglu AM, Van Look PF, 2006. WHO
analysis of causes of maternal death: a systemic review. Lancet, 367,
1066-1074.
Kidanto, H.L., Morgen, I., Lindmark, G., Massawe, S.,
Nystrom, L., 2009. Risk for pretermdelivery and low birth weight are
independently increased by severity of maternal anaemia. South African Medical
Journal 99, 98-102.
Lone, F.W., Qureshi, R.N. & Emanuel, F., 2004. Maternal
anaemia and its impact on perinatal outcome. Tropical Medicine International Health 9: 486-490.
Marchant T, Schellenberg JR, Edgar T, Ronsmans C, Nathan R,
Abdulla S et al, 2002. Anaemia during
pregnancy in southern Tanzania. Ann Trop Med Parasitol; 96: 477-87.
Mennen L, Hirvonen T, Arnault N, Bertrais S, Galan P,
Hercberg S, 2007: Consumption of black, green and herbal tea and iron status in
French adults. Eur J Clin Nutr, 61(10):1174-9.
MS, 2000. Enquête nationale sur l’anémie par carence en fer,
la supplémentation et la couverture des ménages par le sel iodé. Ministère de
la Santé Rabat Maroc.
MS, 2003. La lutte contre les troubles dus aux carences en
micronutriments. Situation et perspectives. Ministère de la Santé Rabat Maroc.
OMS, 2003. Diet, nutrition and the prevention of chronic
diseases, 2003. Report of a WHO/FAO Expert Consultation. Geneva: World Health
Organization.
OMS, 2006. Directives sur l’enrichissement des aliments en
micronutriments. PARTIE II Évaluation de l’importance de la malnutrition par carence en
micronutriments sur le plan de la santé publique. Disponible au:
Qianyi Ma, Eun-Young Kim, Elizabeth Ann Lindsay, Okhee Han, 2012.
Bioactive Dietary Polyphenols Inhibit Heme Iron Absorption in A Dose-Dependent
Manner in Human Intestinal Caco-2 cells. J Food Sci. Author manuscript;
available in PMC June 1.
Stoltzfus RJ, Dreyfuss ML, 1998. Guidelines for the use of
iron supplements to prevent and treat iron deficiency anaemia. Washington, DC:
ILSI Press, Available: http:
//www.who.int/nutrition/publications/micronutrients/guidelines_for_Iron_supple
mentation.pdf.
UNICEF/UNU/WHO, 2001. Iron deficiency anaemia: assessment,
prevention, and control. Genève, Organisation mondiale de la Santé, WHO/NHD/01.3;
Wolmarans P, Dhansay MA, Mansvelt EP, Laubscher JA, Benadé
AJ, 2003: Iron status of South African women working in a fruit-packing factory.
Public Health Nutr, 6(5):439-45.
Zijp IM, Korver O, Tijburg LB, 2000. Effect of tea and other
dietary factors on iron absorption. Crit Rev Food Sci Nutr, 40(5):371-98.