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Colloques du Groupement des Anthropologistes de Langue Française (GALF)

Chevé, D., Barthélémy, M., Seck, D., 2012, Corps en lutte à Dakar entre tradition et modernité: une approche anthropobio-culturelle. Antropo, 27, 73-79. www.didac.ehu.es/antropo


 

Corps en lutte à Dakar entre tradition et modernité: une approche anthropobio-culturelle

 

Wrestling bodies in Dakar between tradition and modernity: an antropobio-cultural approach

 

Dominique Chevé1, Marianne Barthélémy1, Djibril Seck2

 

1Chercheur associé, UMR 6578 CNRS-Université de la Méditerranée-EFS, Marseille

2Pr. INSEPS, Chercheur associé UMI 3189 CNRS-UCAD, Dakar

 

Auteur correspondant: Dominique Chevé. chevedominique@netcourrier.com

 

Résumé

Si la lutte est une pratique corporelle et sportive ancienne très prisée des Sénégalais et omniprésente dans les stades et les médias aujourd’hui, comme toute pratique, elle est complexe, poreuse et évolutive, imprégnée et déterminée par le contexte socio-économique. Son évolution, à Dakar, est révélatrice des mutations démographiques, sociales, économiques et culturelles, particulièrement depuis les années 90 (Diop, 2008; Ndiaye, 2008). La population dakaroise comporte 50% de moins de 20 ans dans les quartiers et banlieues défavorisés comme Yeumbeul à Pikine (Soumaré, 2002). Dans ces conditions, tant les pratiques sportives que la médiatisation et les spectacles sportifs (lutte et football surtout) sont des pôles d’expression et d’insertion ou de compensation sociale comme des vecteurs éducatifs et de liens sociaux possibles. Pour autant, l'articulation complexe entre la préservation des valeurs, des croyances comme des gestes et les processus de "sportivisation" et de spectacularisation contemporains constitue la toile de fond de la construction des corps des lutteurs, entre tradition et modernité. Ce processus se perçoit également dans le "bricolage" propre aux lutteurs qui tient à la transmission ethnique comme au mimétisme télévisuel ainsi que dans l'intégration de logiques sportives, commerciales, de pratiques sacrées et profanes. 

Phénomène complexe et phénomène social total (Chevé, 2010; 2011), la lutte engage des corps exercés, investis et portant les traces des pratiques culturelles sénégalaises urbaines. A certains égards, l’écurie de lutte rejoue, et renoue avec, la communauté du village.

A partir d’enquêtes de terrain les corps des lutteurs sont étudiés comme l’un des prismes de lecture d’une pratique complexe et spécifique, elle-même prisme d’étude de la population selon les axes: sport, santé, société. Il s’agira ici de présenter les premiers résultats d’un projet pluridisciplinaire sur la construction complexe des corps en lutte.

 

Abstract

Even if wrestling is an ancient physical and sporting practice which is extremely popular among the Senegalese people and ever-present in the sports arenas and the media today, it is however, like all practices, complex, porous and evolving, imbued with and determined by the social and economical context. Its evolution, in Dakar, is a telltale sign of demographical, social, economical and cultural mutations particularly since the 1990’s (Diop 2008; Ndiaye 2008). The population in Dakar’s poorer suburbs like Yeumbeul in Pikine is composed of 50% people under 20 (Soumaré 2002). In this context, sporting practices, their media-coverage and spectator sports (principally wrestling and football) are a means of expression and a route to integration and to social compensation as well as an educational opportunity and a potential social link. For all that, the complex articulation between the preservation of traditional values, credence and gestures and the process of regularization and adaptation to spectator sports is the backdrop of the construction of the wrestlers’ bodies – halfway between tradition and modernity. This process can also be perceived in the “makeshift practices” peculiar to wrestlers belonging both to ethnical transmission and unconscious mimicry of television and in the integration of sporting and marketing logic, of sacred and profane practices. As a complex phenomenon and complex all-encompassing social phenomenon (Chevé, 2010; 2011), wrestling involves well-trained, committed bodies bearing the traces of Senegalese urban cultural practices. To some regards, the confraternities of fighters, revives and re-enacts the village community.

Starting from field survey, the bodies of wrestlers are studied as one of the many viewing angles of a complex and specific practice which is itself a viewing angle of the population studied according to various areas of research: sport, health, society. Our aim is here to present the first results of a multidisciplinary research project on the complex construction of wrestling bodies.

 

 

Cet article s’inscrit dans une lecture anthropobio-culturelle du corps à l’interface du biologique et du culturel, de ses constructions et de ses représentations (Boëtsch & Chevé, 2000; Chevé, 2006; Queval, 2008; Andrieu, 2010). Que le corps soit un projet individuel et social n’est plus à démontrer, que ce projet s’incarne comme action, investissement, épreuve du soi corporel se décèle dans les pratiques corporelles diverses (Andrieu et al., 2011). Celle de la lutte au Sénégal engage un pluriel des corps: ceux des lutteurs en premier lieu, ceux des acteurs sociaux, ceux des représentations et des imaginaires collectifs. Ce phénomène conduit à se demander si une «anthropo-logique», logique de production et de construction de l’humain, particulière, est à l’œuvre à travers les corps, les épreuves et les représentations de la pratique. Quelle corporéité spécifique se construit et s’expose dans ces arènes sénégalaises, sur le sable de cette «Afrique à poings nus»[1] (Bordas, 2004) et de ses plages, lieux privilégiés des exercices et combats en plein air, mais aussi dans les salles de sport dakaroises?

La lutte sénégalaise est complexe, poreuse et évolutive comme toute pratique corporelle, déterminée de façon pluri-factorielle. À Dakar, sa spécificité tient, d’une part, à son ancrage historique précolonial dans la tradition et le mythe (Ndiaye, 1996), à son inscription dans le contexte colonial comme sport populaire et commercialisé aux XIXe et XXe et à un essor dans les années 90. Si les collusions entre lutte et politique existaient[2] (Faye, 2002), si l’articulation colonisation, sport et argent n’est pas nouvelle[3] (Bidiar, 1990), si les arènes dakaroises ont cristallisé les dynamiques de construction de l’État-nation sénégalais (fin des années 50, années 60) en ordonnant les lieux des manifestations sportives populaires, si le mouvement du bul faale[4] (Havard, 2001; 2005) en 1996 a coïncidé avec la revitalisation de la lutte comme loisir populaire et animé la banlieue de Pikine en se politisant, s’incarnant en Tyson (Mohamed Ndao) véritable héros des jeunes gens nés après l’indépendance et d’une certaine libération (Havard, 2001), force est de constater que la lutte libre, depuis les années 2000 et encore, représente à la fois ce «premier sport national»[5] (Faye, 2002) à forte valeur identificatoire et tout un système social lucratif et fécond en symboles et rituels, creuset dans lequel les trajectoires des lutteurs sont inscrites (Faye, 2002; Biaya, 2002; Baller, 2007)[6].

D’autre part, la particularité de cette lutte à la fois guerrière, sportive, ludique, festive et rituelle, comportant une dimension chorégraphique et des chants gymniques se décline en 2 types. La «lutte traditionnelle sans frappe», pratiquée dans les villages à la fin des moissons, lors des mbapat[7], surtout chez les Lebu, Sereer, Diola[8]. Le mbapat institue un rituel originairement guerrier de violence réglée, initialement lié aux nécessités de défense d’un territoire, d’une identité clanique ou villageoise: une mise en scène de gestes, de mots, de sons, de corps des jeunes hommes par laquelle on se défie, se protège, on conjure les dangers. La «lutte avec frappe», conjuguant à la précédente (de préhension) la percussion et donc empruntant à la boxe (bëre door en wolof). Les combats se déroulent dans des arènes, situées dans les stades urbains, de novembre à juillet en fin de semaine et d’après midi. La lutte avec frappe est dominante. Elle draine beaucoup de monde, d’argent, d’enjeux, sa popularité est considérable et le phénomène est surinvesti. La lutte a envahi les médias: 4 émissions de TV, 18 FM, 2 magazines, 2 quotidiens, nombreux blogs et sites, panneaux de publicité dans la ville, pages sportives et pléthore d’interviews lors de grands combats des «rois» des arènes et autres «lions» des banlieues.

Le corps engagé dans cette pratique est objet d’investissement pour une société urbaine jeune, en recomposition permanente et en déficit de ressource: les travaux de M. Diouf (2002a, 2002b, 2003), de M.-C. Diop (1997; 2002; 2008), de T. K. Biaya (2000; 2002), de J.-F. Havard (2001, 2005), d’A. Marie (2008), de G. Daffé et A. Diagne (2009) notamment, ont montré ces aspects socio-économiques et politiques en contexte de crise et de mutations démographiques. La littérature, peu abondante sur la lutte sénégalaise, mais plus importante sur les sports en Afrique, donne le sport comme mode majeur d’expression et de réalisation des conjugaisons entre tradition et modernité, local et global, médiateur des identités générationnelles, de la construction comme de la production de certaines ethno-culturalités (Alegi, 2004). Rien ici de spécifiquement réservé à l’Afrique, notons simplement que de la «marseillanité» s’invente en France avec l’Olympique de Marseille, que de la citoyenneté et de l’anti-citoyenneté peuvent se construire et se déconstruire dans ces espaces sportifs des zones urbaines sensibles des grandes métropoles, de Marseille ou de Dakar. Force est de constater que le sport comme pratique et investissement urbains de tous ordres, appropriation et promotion commerciales, objet d’instrumentalisation, existe partout.

La société dakaroise est hybride, composite et complexe. Les enjeux actuels conjuguent individualisme émergeant et identités communautaires, recomposition et réinterprétation des rapports sociaux traditionnels (Marie, 2008; Diop, 2008). Cette imbrication se retrouve dans le monde de la lutte, pratique portée par toute la communauté, ayant un retentissement manifeste tant dans les quartiers périphériques qu’au centre, tant sur les plages  qu’à l’université: la lutte à Dakar n’est pas seulement affaire sportive, culturelle, politique; elle est tout cela conjugué, phénomène social total. Au reste, c’est ce qui frappe d’emblée le chercheur dans une écurie de lutte ou lors des Mbapat traditionnels, dès l’appel des tambours durant les manifestations des combats. S’articulent ou s’entremêlent la préservation des valeurs, des pratiques et croyances traditionnelles et les processus de «sportivisation», de spectacularisation et de commercialisation liés à l’ «occidentalisation» des activités. Il s’agit alors d’une ré-invention de la tradition[9], recomposition des mondes et de ce monde avec ce que ces bouleversements comportent d’abandons, de conflits, de déchirements mais aussi d’acculturation et d’horizons nouveaux.

Cette complexité se lit également dans la geste de la lutte et ses rituels mystiques (Chevé et al. 2010; Breton et Gudin, 2011) comme dans la technique des combats: rien de neuf après Mauss, toute motricité est une «ethnomotricité», la logique interne d’une activité est investie par les traditions ethno-culturelles et les usages sociaux symboliques, par les représentations et les croyances: la lutte, affaire collective et communautaire, est aujourd’hui pratique métissée[10]. C’est dans ce contexte complexe que se jouent les partitions des corps des lutteurs, corps eux-mêmes surinvestis et surdéterminés.

Notre contribution délibérément synthétique se veut étape dans une recherche initiée en fin 2009, qui se poursuit actuellement[11]. Les données proviennent d’enquêtes de terrain effectuées dans les écuries dakaroises auprès des lutteurs et du personnel d’encadrement, mais également d’entretiens avec des acteurs divers de la lutte[12]. Les trames d’entretiens qualitatifs comportaient des questions sur les perceptions et les représentations de leurs corps chez les lutteurs, tenant tant aux aspects physiques et sportifs qu’aux aspects mystiques et symboliques ou encore axiologiques et esthétiques. De plus, des questionnaires complets pour chaque lutteur interrogé[13] renseignent les aspects socio-démographiques, socio-économiques, biologiques et médicaux sur ce que nous appellerons les «régimes de vie et de subjectivité» des lutteurs. Enfin, des données socio-démographiques ont été analysées[14]. Ces derniers éléments ont permis un état des lieux de la pratique sportive: en 2010, 50 associations de lutte («écuries») existent officiellement à Dakar-région (exceptée Rufisque) alors qu’elles sont 115 déclarées au plan national; 15 «écoles de lutte» exercent une activité éducative; 2489 lutteurs déclarés en lutte avec frappe, 2359 en lutte sans frappe, 6000 licenciés au national, plus des ¾ dans la capitale; plus de 330 combats à Dakar pour 439 lutteurs, ce qui atteste la sélectivité de la pratique. Les rêves de réussite des jeunes lutteurs viennent ainsi se heurter à l’impossibilité de combattre, de fait, pour un grand nombre d’entre eux[15]. Enfin, 2 milliards 500 millions CFA ont été investis dans l’arène pour 21 promoteurs. La répartition géographique des écuries manifeste la prédominance des banlieues (Pikine, forte densité, 5 stades, réunit 24 écuries; Guediawaye, très forte densité, 2 stades, 13 écuries) mais également la présence forte à Dakar (Grand Dakar, Fass et Médina comportent 9 stades et 13 écuries).

Ces données ont contribué à la construction de terrains d’étude spécifiques dans les écuries. En effet, à Dakar, ces clubs sportifs sont pour la plupart sans lieu bâti mais avec des points d’ancrage dans les écoles de quartier et sur les plages, selon les moments d’entraînement. Une dizaine d’écuries ont été privilégiées pour leur distribution géographique[16] et pour leur affichage ethno-culturel marqué ou au contraire indifférencié, comme pour leur ancrage historique ou au contraire leur création récente.

Oser une typologie de ces corps à partir des entretiens avec les lutteurs sur leur propre corporéité conduit d’emblée à mettre en exergue leur complexité: corps de la performance sportive certes, mais aussi de la performance mystique et sociale. La conscience de la dimension athlétique et sportive s’impose, sans conteste. Ces corps sont surentraînés (4 séances par jour auxquelles s’ajoutent les séances en salle pour ceux qui y ont accès financièrement ou sur les parcours santé de la corniche dakaroise), ce sont des corps guerriers et des corps d’ascètes. La force, la puissance virile et musculaire, le contrôle et la ruse sont les termes récurrents pour les qualifier. La discipline de vie et le contrôle des corps est mise en avant, notamment avec des régimes alimentaires améliorés (en quantité, ajouts de viandes selon les finances) et/ou appropriés (additifs et alicaments déclarés: «red bul», «coca-cola», «protéines», «guronsan», «vitamines C»…), avec des régimes sexuels particuliers (abstinence avant les combats): corps exercés et mis à l’épreuve, dans tous les sens du terme.

Ces corps du défi répondent à l’expression et l’investissement collectifs comme corps exhibés dans l’espace public: corps spectaculaires des mises en jeu et en signes (entre folklore et ambiance survoltée, colorée et sonore, médiatisée), corps héroïsés incarnant les valeurs communautaires (honneur, courage, puissance, prestige) voire starifiés (mises en scène de soi et de son image), corps héraults, porte-étendards de l’écurie, de la communauté, de la banlieue et/ou de l’ethnie dans un syncrétisme propre aux recompositions urbaines actuelles. Ces corps leaders sociaux sont emblèmes de la réussite et fonctionnent comme des modèles d’identification répondant à des processus d’individuation tributaires des facteurs conjugués de la médiatisation, de l’urbanisation et de la crise économique  plus que de la scolarisation[17]. Dès lors le corps-ressource des jeunes dakarois est traversé par des logiques de revendication de leur existence dans l’espace public mais aussi des logiques marchandes et d’instrumentalisation.

Surchargés, surinvestis, ces corps le sont aussi en raison des pratiques et croyances mystiques prégnantes dans la lutte. Tout un arsenal mystique[18] blinde le lutteur, le protège et l’environne, sans quoi aucun combat ne peut être. Corps marqués, ritualisés, qui répondent à des étapes avant, pendant et après le combat, d’où le hasard est exclu. Si la puissance musculaire et l’habileté technique sont mises en avant par les lutteurs pour rendre compte de leurs performances, les «forces en présence dans l’arène ne se mesurent pas toutes au dynamomètre»[19] et tous accordent aux facteurs mystiques une part prépondérante dans la construction et les performances de leurs corps. La préparation mystique est déterminante, les gestes et les objets incorporés ont des fonctions de blindage, de protection, de renforcement et d’intimidation de l’adversaire, leur valeur est performative.

Ces constructions corporelles répondent donc à des logiques composites et d’hybridité: logiques d’individuation (Marie, 2008), de reformulation des identités à l’interface des dynamiques du dedans et du dehors (Balandier, 1971), de réappropriation de la tradition et des «arsenaux mystiques», de «bricolage» producteur d’ethno-culturalité poreuse, dans les écuries où les jeunes dakarois recherchent de nouvelles familles symboliques, des logiques de consommation hybride[20], des logiques de reconstruction des rapports au corps enfin, sur les plages et dans les arènes, mais aussi dans les salles de sport selon des modèles occidentaux idéalisés, ceux de la modernité supposée incarnée par les «Noirs américains» sportifs. Ces corps répondent à une logique syncrétique qui atteste encore une fois que la partition tradition / modernité ne relève pas du passage ou de la rupture, mais bien de l’intrication, de la recomposition de liens complexes renégociés  en permanence.

Les corps en lutte sont, osons la métaphore, des palimpsestes: ils portent traces de leurs constructions musculaire et mentale, symbolique et mystique, de leurs mises à l’épreuve, mais encore des pratiques collectives et traditionnelles de leurs communautés, comme ils manifestent les signes d’une société aux prises avec la modernité, le pouvoir économique et médiatique, les symptômes de vies conjuguant profondeur spirituelle, tension esthétique et adaptation ingénieuse, quête de la performance comme d’une puissance financière toute prosaïque. On ne saurait fustiger cette quête alors que, par une sorte de fascination exotique douteuse dont trop longtemps le regard occidental s’est contenté, on admirerait la belle adéquation de ces corps travaillés et de ces esprits nourris des paroles magiques. Se tissent sous nos yeux, dans la lutte, des forces nouvelles et violentes en tension, que ces corps de lutteurs aujourd’hui, à Dakar, rendent manifestes et invitent à penser.

 

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[1] Beau titre de P. Bordas que nous remercions pour sa générosité, pour la qualité et la poésie de son ouvrage aujourd’hui encore, indépassés.

[2] Fondation de la «ville noire» de la Médina en 1914.

[3] En 1927, Maurice Jacquin, entrepreneur de spectacles, aurait organisé au cinéma Al Amra les premiers combats de lutte payants, et créé la 1ère arène.

[4] Littéralement «ne t’en fais pas», «sois indifférent» ou «trace ta route».

[5] Érigée à ce titre officiellement en 1959, la lutte libre devint à cet égard le lieu des dynamiques d’unification d’une société sénégalaise composite, tant au plan des appartenances ethniques que confessionnelles et territoriales.

[6] Pour une étude de l’évolution de la lutte à Dakar (mbapat et lamb), voir l’article d’O. Faye (2002) qui est, à notre connaissance, le seul article socio-historique publié sur la lutte.

[7] Le terme, commun aux Sereer et aux Wolof, désigne la lutte libre et la composition sportive traditionnelle. Dans les trois populations, elle engage l’honneur de la communauté, des préparations magico-religieuses et un périmètre approprié pour le combat (Faye, 1984).

[8] Nous adoptons les transcriptions officielles de nos collègues sénégalais ou plus largement dans la majorité des textes édités sur les populations du Sénégal, depuis 2000. Cela dit, dans Atlas des peuples d’Afrique, J. Sellier (2011) adopte une transcription différente.

[9] Le concept d’É. Hobsbawm (1983; 1995) est celui d’ «invention de la tradition» dans une autre perspective (Ranger, 1993). Il est ici possible de parler de «ré-invention» permanente de cette tradition. Et ce, d’autant que les «traditions inventées» sont souvent des réponses à des temps de crise, à des situations de flottement social et culturel. Le gain de légitimité est alors fondé sur le rapport au passé, source de valeurs (Chevé et al. 2010).

[10] Ainsi l’évolution sportive de la pratique n’a pas conduit à une uniformisation des règles mais à une harmonisation qui rend possible les affrontements intra-, inter-ethniques et nationaux, selon les types de manifestations organisées, sous l’égide du Comité National de Gestion de la Lutte.

[11] De début 2010 à mai 2011, 6 étudiants de l’INSEPS de Dakar, Cheikh Mbacke Faye, Mamadou Tine, Diabel Faye, Joachim Clément Faye, Athanase Dione et Galass Sock, co-encadrés pour leurs mémoires de Maitrise/Master, ont enquêté et recueilli des données tant à partir d’entretiens qualitatifs, semi-directifs que d’observation participante étant donnée leur formation de sportifs et leur pratique de la lutte pour certains. Ces entretiens ont été enregistrés, traduits et transcrits. Parallèlement, nous avons enquêté et effectué des entretiens avec divers acteurs de la lutte ainsi qu’étudié les mémoires de maitrise de l’INSEPS, qui constituent les rares éléments bibliographiques sur la question. Un projet d’étude global «Corps en lutte au Sénégal entre tradition et modernité» réunit les collaborations de chercheurs de l’UMR 6578 CNRS-Université de la Méditerranée-EFS de Marseille, de l’UMI 3189 CNRS/UCAD et de l’INSEPS de Dakar.

[12] Quelques résultats préliminaires ont été publiés (Chevé & al. 2010; Chevé, 2011).

[13] 68 à ce jour.

[14] Obtenues en partie auprès des organismes officiels sénégalais (SRSD et CNGL).

[15] Sur ce point, S., l’une des personnes ressources déterminantes de notre étude (entretien du 28 juillet 2010) très impliquée dans le monde de la lutte, liait la montée des violences autour de la lutte à cette disproportion entre le nombre croissant de lutteurs et le peu de combats réels auxquels ils peuvent effectivement participer. S’il envisageait la lutte comme une voie possible d’exutoire, de régulation et de sublimation de la violence urbaine, il déplorait celle des tribunes et la perte de sens du défi et de sa mise en scène au profit d’une mise en spectacle de soi, d’une volonté de «se faire voir plus que d’être lutteur».

[16] Ainsi «Rock énergie» est située dans le quartier de Parcelles assainies à Guediawaye, alors que «Fass traditionnel» ou de «Fass benno» sont au cœur de Dakar)

[17] Le niveau scolaire moyen des lutteurs se situe autour de la fin de l’école élémentaire et beaucoup sont déscolarisés très tôt.

[18] Gri-gris, potions, amulettes et autres protocoles magiques pour prendre possession de l’arène, investir le lieu selon des règles implicites et des gestes rituels.

[19] Propos recueilli lors d’un entretien avec S. mais que l’on retrouve dans le bel ouvrage iconographique d’Éric Breton et Laurent Gudin, 2011: 006.

[20]  Substances magiques, chimiques et «ceebu jën» ou «couscous de ma mère».