Latifi, M., Sbii, L., Hami, H., Hmimou, R., Soulaymani, A. & Mokhtari, A., 2010, Le Choix du conjoint dans la région de Fritissa  (Est du Maroc). Antropo, 23, 99-107. www.didac.ehu.es/antropo 


 

Le Choix du conjoint dans la région de Fritissa  

(Est du Maroc)

 

The choice of spouse in the Region of Fritissa (Est of Morocco)

 

M. Latifi, L. Sbii, H. Hami, R. Hmimou, A. Soulaymani, A. Mokhtari

 

Laboratoire de Génétique & Biométrie, Faculté des Sciences, Université Ibn Tofaïl.

 

Correspondance: Dr.Mohamed Latifi. Laboratoire de Génétique et Biométrie, Département de Biologie. Faculté des Sciences, Université Ibn Tofaïl. B.P. 133, 14000 Kenitra, Maroc. latifi_mohamedl@yahoo.fr


Mots-clés: Choix du conjoint, Homogamie, Niveau d’instruction et Appartenance ethnique.

 

Keywords: Spouse choice, Homogamy, Education and Ethnicity.

 

Résumé 

L’étude des modalités de choix de conjoint  permet de distinguer le type de société. En effet, la fréquence de chaque type de mariage, homogame ou hétérogame, est un indicateur important du comportement matrimonial dans une société.

Dans le but d’évaluer le comportement homogame au sein de la population de Fritissa, on a enquêté auprès de 500 couples de cette commune en l’an 2000.

L’étude de l’homogamie a été faite par rapport à l’appartenance ethnique (homogamie ethnique) et par rapport au niveau d’éducation (homogamie éducationnelle).

Les résultats révèlent un comportement homogame très prononcés surtout pour l’homogamie ethnique mais ce comportement est moins intense au sein de la population instruite de cette commune.

 

Abstract

The study of the modalities of spouse's choice allows distinguishing the type of society.  Indeed,  the  frequency  of  each  type  of  marriage,  homogamous  or heterogamous, is an important indicator of marital behavior in a society.

With the aim of estimating the behavior homogamy within the population of Fritissa, we investigated with 500 couples of this municipality in the year 2000.

The  study  of  homogamy  has  been made in relation to ethnicity (ethnic homogamy) and the level of education (educational homogamy).

The results reveal a behavior homogamy very pronounced especially for the ethnic homogamy but this behavior is less intense within the population educated for this municipality.

 

Introduction

La famille constitue une unité fondamentale de la vie en société, elle comprend essentiellement un mari et son épouse.

La modalité de choix de conjoint reflète l’objectif que chaque société souhaite atteindre:

- Favoriser les échanges sociaux entre groupes, par le choix du conjoint à l'extérieur de son propre groupe social (village, famille, clan, tribu): c'est la règle d'hétérogamie.

- Ou bien renforcer la cohésion sociale d'un groupe, par le choix du conjoint à l'intérieur de son propre groupe social: c'est la règle d'homogamie.

L’intérêt porté à l’étude des modalités de choix de conjoint est justifié par le rôle que joue ce choix sur la structure génétique de la famille et sur l’évolution du patrimoine héréditaire de la population.

L’étude des modalités de choix du conjoint permet de distinguer le type de société selon Chalbi et Zakaria (1998), en effet, le choix du conjoint a des conséquences directes sur la répartition, la structure et l’hétérogénéité du bassin génétique d’une population (Tremblay et al., 2000).

L’homogamie est étudiée selon plusieurs critères qui renvoient à différents dimensions du statut social, lequel dépend de l’origine social, mais aussi du parcours individuel d’acquisition de capitaux sociaux, culturels ou économiques. L’homogamie a donc, comme le statut social, un caractère multidimensionnel que nous réduisons ici à deux composantes principales: L’assigné ou l’hérité et l’acquis.

L’étude des mariages peut permettre de savoir à laquelle de ces deux composantes les individus accordent, à un instant donné, le plus d’importance.  

Dans notre enquête  sur la population de Fritissa, nous avons étudié deux phénomènes essentiels dans le choix de conjoint. Il s’agit de l’homogamie ethnique (caractère assigné) et l’homogamie éducationnelle (caractère acquis).

Dans un premier temps, nous avons calculé l’indice d’homogamie ethnique pour estimer la fréquence des unions reliant deux personnes de même origine sociale par rapport à l’ensemble des unions contracté au sein de la population de Fritissa, et nous avons fait la même chose pour l’homogamie éducationnelle.

Ensuite, nous avons comparé les indices  calculés pour déterminer le comportement matrimonial de la population de Fritissa.

A la fin de cette partie, nous avons comparé le comportement homogame (homogamie ethnique) entre la population instruite et la population non instruite.

L’étude de l’homogamie se ramène à l’analyse d’un tableau de mariage. Les couples que l’on étudie y sont classés suivant les catégories auxquelles appartiennent l’un et l’autre des conjoints.

 

Sujets et méthodes

Cadre de l’étude

Cette étude s’intègre dans la continuité des travaux antérieurs, réalisés par le laboratoire de génétique et biométrie de la faculté des sciences de Kenitra, sur la consanguinité et les modalités de choix de conjoint au sein de la population marocaine.

 

La commune rurale de Fritissa

Cette commune fait partie de la région du Fès-Boulemane. La figure suivante présente sa situation géographique. 

 

Sujets

On a enquêté auprès de 500 familles échantillonnées au hasard au sein da la population de Fritissa en l’an 2000.

Le questionnaire porte sur les aspects relatifs à la reproduction, à la situation socio-économique, culturelle et démographique des deux conjoints.

 

Figure 1. La situation géographique de la commune de Fritissa au sein du Maroc

Figure 1. The geographical situation of the municipality of Fritissa within Morocco

 

Méthodes de calcul

Les calculs auxquels nous avons fait appel lors de cette étude ont été effectués selon les paramètres étudiés comme suit:

 

Matrice de mariage 

Une matrice  de mariage est une matrice carrée puisque le nombre de colonnes est égal au nombre de lignes (le même nombre de catégories pour les femmes que pour les hommes). L’élément de cette matrice correspond au nombre de mariages contracté entre un homme de catégorie  avec une femme de catégorie.

 et  sont les totaux marginaux. 

 

Taux d’endogamie

 C’est le rapport entre le nombre de mariages endogames et le nombre total de mariages, on a le choix entre les trois rapports suivants (Lathrop et Pison, 1982):

; ; 

Pour l’ensemble des catégories on a:

 

Index d’homogamie

Le régime matrimonial réel ou observé est encadré par deux modèles extrêmes,   panmictique d’une part, homogame d’autre part; ces modèles ne prétendent pas représenter une réalité quelconque, mais servent uniquement de référence. 

Le principe de cette méthode consiste à établir un tableau de mariage théorique, décrivant ce que seraient les mariages s’ils avaient été conclus selon un régime mixte comprenant des unions homogames et des unions exogames, et le comparer au tableau de mariage réel. Un mariage comportant une certaine homogamie peut être situé entre les deux modèles extrêmes de mariages (panmictique et homogame). Cette situation intermédiaire est, en effet, caractérisée par une valeur  dite « index d’homogamie » mesurant l’intensité d’homogamie (Segalen et Jaquard, 1971).

A partir des matrices de mariages, on peut établir des matrices correspondant au régime panmictique, dans lesquelles le nombre  correspond à la case homme de la catégorie i et  femme de la catégorie j; est calculé de la façon suivante (Segalen et Jaquard, 1971):

Pour les matrices homogames et en  raison des déséquilibres de sexes dans chaque catégorie, on cherche à définir une homogamie aussi totale que possible en mettant sur le diagonale, le nombre le plus élevé possible et en répartissant le surplus entre les catégories disponibles suivant un régime panmictique (Segalen et Jaquard, 1971). Le nombre représente la proportion des couples composés d’un homme de la catégorie i et d’une femme de la catégorie j sous l’hypothèse d’homogamie.

On peut s’efforcer alors de situer la réalité par rapport à ces deux modèles, en cherchant quelle pondération de ceux-ci permet de la mieux représenter. 

Autrement dit, supposons que lors de la constitution de chaque couple, les conjoints se choisissent avec une probabilité, selon un régime d’homogamie, et avec une probabilité, selon un régime panmictique. L’espérance mathématique  du nombre de mariages comportant un conjoint de la catégorie i et une conjointe de la catégorie j est égale à (Segalen et Jaquard, 1971):

Pour que les nombres théoriques  se rapprochent suffisamment des nombres observés , il faut choisir une valeur du paramètre  qui ajuste aussi bien que possible ce modèle à la réalité; on applique la méthode des moindres carrés et on cherche la valeur de  qui rend minimale l’expression:

f () = S [nij -  hij - (1- ) pij]2

La formule de la dérivée est:

f' () = -2 S [  (hij - pij)2 +  (hij - pij) (nij - pij)]

La valeur de  est donc donnée par:

 est la proportion observée des couples composés d’un homme de la catégorie i et d’une femme de la catégorie j.

La valeur  est égale à 1 en cas d’homogamie parfaite et 0 en cas de panmixie.

 

Résultats 

Homogamie éducationnelle

On s’intéresse dans cette partie au niveau d’instruction des couples étudiés. Les matrices ci-après présentent la répartition des femmes enquêtées suivant leur niveau d’instruction, et celui de leurs maris (Tableau 1).

Le contenu de cette matrice montre que dans la majorité des cas, les mariages s’établissent entre personnes de même niveau culturel ou des niveaux culturels proches. L’indice d’homogamie éducationnelle dans la population de Fritissa vaut 0,562 ce qui peut s’interpréter comme suivant: 56,2 % des mariages réunissent des conjoints de même niveau d’éducation.

D’après Abdelrahman (1994) et Kalmijn (1998), l’inégalité des chances de s’instruire entre les hommes et les femmes, toujours en faveur des hommes, ouvre la voie à une certaine hétérogamie, de préférence entre catégories voisines.

 

 

 

Femmes

 

Maris

Sans instruction

primaire

secondaire

supérieur

Total

Mariages observées

Sans instruction

223

7

1

0

231

primaire

196

30

5

0

231

secondaire

21

4

2

0

27

supérieur

1

1

2

0

4

Total

441

42

10

0

493

Modèle panmictique

Sans instruction

206,635

19,680

4,686

0

231

primaire

206,635

19,680

4,686

0

231

secondaire

24,152

2,300

0,548

0

27

supérieur

3,578

0,341

0,081

0

4

Total

441

42

10

0

493

Modèle homogame

 

Sans instruction

231

0

0

0

231

primaire

189

42

0

0

231

secondaire

17

0

10

0

27

supérieur

4

0

0

0

4

Total

441

42

10

0

493

Modèle pondéré

Sans instruction

220,328

8,620

2,052

0

231

primaire

196,724

32,224

2,052

0

231

secondaire

20,133

1,007

5,860

0

27

supérieur

3,815

0,149

0,036

0

4

Total

441

42

10

0

493

Tableau 1. Répartition des mariages selon le niveau d’instruction des conjoints

Table 1.  Distribution of the marriages according to the education of spouses.

 

Homogamie ethnique

Dans ce paragraphe, nous avons considéré l’origine ethnique des deux conjoints:

  1. Arabe.

  2. Berbère.

  3. Chrif.

  4. Immigrant.

La structure des mariages peut alors être décrite au moyen de matrices carrées 4x4 dans lesquelles figurent les nombres de mariages dans lesquels le mari  appartient à la à la catégorie i et  la femme appartient à la catégorie j.

Le régime matrimonial réel est encadré par les deux modèles extrêmes: le modèle panmictique et le modèle homogame.

Le tableau 2 donne la distribution des mariages selon l’origine ethnique du mari et celui de la femme.

L’index d’homogamie ethnique pour la population total vaut 0,827. Cet indice reflète le comportement homogame de la population de Fritissa qui est très homogame.

Si nous détaillons le calcul pour chaque sous population, on trouve les indices suivants (voir tableau 3).

L’analyse de ces résultats montre à priori une très forte homogamie aussi bien dans la population générale que dans chaque sous population.

 On peut dire que les individus dans la commune de Fritissa, adoptent un comportement très homogame lors du choix du futur conjoint.

 

Homogamie ethnique et niveau d’instruction

Pour comparer le comportement homogame (l’homogamie ethnique) entre la sous population instruite et celle non instruite de Fritissa, nous avons calculé l’index d’homogamie pour chaque sous population.

 

 

 

Femmes

 

      Maris 

Arabe

Berbère

Chrif

Immigrant

Total

Mariages observées

Arabe

112

8

1

23

144

Berbère

17

197

7

19

240

Chrif

1

2

57

7

67

Immigrant

3

4

0

38

45

Total

133

211

65

87

496

Modèle panmictique

Arabe

38,613

61,258

18,871

25,258

144

Berbère

64,355

102,097

31,452

42,097

240

Chrif

17,966

28,502

8,780

11,752

67

Immigrant

12,067

19,143

5,897

7,893

45

Total

133

211

65

87

496

Modèle homogame

 

Arabe

133

0

0

11

144

Berbère

0

211

0

29

240

Chrif

0

0

65

2

67

Immigrant

0

0

0

45

45

Total

133

211

65

87

496

Modèle pondéré

Arabe

116,671

10,598

3,265

13,467

144

Berbère

11,133

192,160

5,441

31,266

240

Chrif

3,108

4,931

55,274

3,687

67

Immigrant

2,088

3,312

1,020

38,581

45

Total

133

211

65

87

496

Tableau 2. Répartition des mariages selon l’origine ethnique des conjoints

Table 2. Distribution of the marriages according to the ethnic origin of spouses.

  

Sous population

Endogame

Exogame

Arabe

77,24%

22,76%

Berbère

82,15%

17,85%

Chourfas

85,07%

14,93%

Migrante

82,97%

17,03%

Tableau 3. L’indice d’endogamie pour chaque sous population.

Table 3. The index of endogamy for each subpopulation.

 

 

 

Femmes

 

 

          Maris 

Arabe

Berbère

Chrif

Immigrant

Total

Mariages observées

Arabe

60

4

1

17

82

Berbère

10

97

4

11

122

Chrif

1

2

22

4

29

Immigrant

3

3

0

25

31

Total

74

106

27

57

264

Modèle panmictique

Arabe

22,985

32,924

8,386

17,705

82

Berbère

34,197

48,985

12,477

26,341

122

Chrif

8,129

11,644

2,966

6,261

29

Immigrant

8,689

12,447

3,170

6,693

31

Total

74

106

27

57

264

Modèle homogame

 

Arabe

74

0

0

8

82

Berbère

0

106

0

16

122

Chrif

0

0

27

2

29

Immigrant

0

0

0

31

31

Total

74

106

27

57

264

Modèle pondéré

Arabe

63,134

7,013

1,786

10,067

82

Berbère

7,284

93,856

2,658

18,203

122

Chrif

1,731

2,480

21,881

2,908

29

Immigrant

1,851

2,651

0,675

25,823

31

Total

74

106

27

57

264

Tableau 4: Répartition des mariages selon l’origine ethnique des conjoints au sein des couples dont le mari est instruit

Table 4: Distribution of the marriages according to the ethnic origin of spouses within the couples for which the husband is educated

 

Homogamie ethnique au sein des couples dont le mari est instruit

Le tableau 4 résume le calcul de l’index d’homogamie au sein de la population instruite.

L’étude des couples dont le mari est instruit, montre un index d’homogamie ethnique de: 0,787. 

 

Homogamie ethnique au sein des couples ou le mari est non instruit

De la même façon qu’avant, on va procéder pour le calcul de l’index d’homogamie ethnique au sein des couples dont le mari est non instruit (Tableau 5).

Dans ce cas, l’index d’homogamie vaut 0,871.

Nous avons donc fractionné notre population en deux groupes: le premier c’est l’ensemble des couples dont les maris sont instruits, alors que le deuxième groupe contient les couples dont les maris ne sont pas instruits.

 

Comparaison du comportement homogame entre la population instruite et non instruite

Pour comparer le comportement homogame de ces deux groupes, nous allons utiliser le test . Le tableau des valeurs observées est le tableau 6. Le tableau des valeurs théoriques est le tableau 7. Statistique: = 6.52; ddl = 1; P = 0,01. L’intensité du phénomène d’homogamie ethnique dépend du niveau d’instruction des maris: lorsque les maris sont instruits, ils sont moins homogames.

 

 

 

Femmes

 

       Maris 

Arabe

Berbère

Chrif

Immigrant

Total

Mariages observées

Arabe

52

4

0

6

62

Berbère

7

100

3

8

118

Chrif

0

0

35

3

38

Immigrant

0

1

0

13

14

Total

59

105

38

30

232

Modèle panmictique

Arabe

15,767

28,060

10,155

8,017

62,000

Berbère

30,009

53,405

19,328

15,259

118,000

Chrif

9,664

17,198

6,224

4,914

38,000

Immigrant

3,560

6,336

2,293

1,810

14,000

Total

59,000

105,000

38,000

30,000

264

Modèle homogame

 

Arabe

59

0

0

3

62

Berbère

0

105

0

13

118

Chrif

0

0

38

0

38

Immigrant

0

0

0

14

14

Total

59

105

38

30

232

Modèle pondéré

Arabe

53,855

3,339

1,208

3,597

62

Berbère

3,571

98,860

2,300

13,269

118

Chrif

1,150

2,047

34,219

0,585

38

Immigrant

0,424

0,754

0,273

12,549

14

Total

59

105

38

30

232

Tableau 5. Répartition des mariages selon l’origine ethnique des conjoints au sein des couples dont le mari est non instruit

Table 5. Distribution of the marriages according to the ethnic origin of spouses within the couples for which the husband is not educated

 

 

Couples homogames

Couples hétérogames

Total

Groupe 1:

Hommes instruits

204

60

264

Groupe 2:

Hommes non instruits

200

32

232

Total

404

92

496

Tableau 6. Répartition observée des mariages selon l’origine ethnique et le niveau d’instruction des maris

Table 6. Distribution observed of the marriages according to the ethnic origin and the education of husbands

 

 

Couples homogames

Couples hétérogames

Total

Groupe 1:

Hommes instruits

215,032

48,968

264

Groupe 2:

Hommes non instruits

188,968

43,032

232

Total

404

92

496

Tableau 7. Répartition théorique des mariages selon l’origine ethnique et le niveau d’instruction  des maris

Table 7. Theoretical distribution of the marriages according to the ethnic origin and the education of husbands

 

Discussion

Les individus de caractéristiques semblables ont tendance à se marier. Ce processus de choix matrimonial est appelé Homogamie (Debra et Blackwell, 1998). Des corrélations positives entre les futurs conjoints ont été constatées pour la race, la religion, le statut socio-économique, l’âge, le niveau d’instruction, l’apparence physique, l’intérêt professionnel, etc. (Abdelrahman, 1994; Sanchez-Andres et Mesa, 1994; Jaffe et Chacon-Puignau, 1995; Bereczkei et al., 1997; Debra et Blackwell, 1998; Kalmijn, 1998; Bereczkei et al., 2002), ce qui garantit une stabilité de vie conjugale (Weisfeld et al., 1992; Joshua et al., 2001; Bereczkei et al., 2002).

Au niveau de la population de Fritissa, nous avons étudié deux critères déterminants dans le choix du futur conjoint:

-L’homogamie éducationnelle, c'est-à-dire la tendance au mariage entre hommes et femmes de même niveau d’études.

- L’homogamie ethnique, c'est-à-dire la tendance au mariage entre hommes et femmes de même origine ethnique.

Nous avons choisi ces deux critères  qui correspondent  à deux composantes principales du statut social: l’hérité et l’acquis, pour savoir à laquelle de ces deux composantes les individus accordent, à un instant donné, le plus d’importance.  

L’étude du système matrimonial de notre région, indique une homogamie éducationnelle et ethnique.

Les couples qui ont le même niveau d’étude, représentent 50,41% de l’ensemble des couples rencontrés dans la région de Fritissa.

Hami et al., (2005) ont trouvé en l’an 2004, chez la population du Gharb au Maroc que 54,29 % des mariages s’établissent entre conjoints de même niveau d’études.

Au canada, 54 % des couples avaient le même niveau d’études   en 2001; alors qu’aux États-Unis, environ 55 % des couples mariés étaient composés de personnes de même niveau d’études en 2000 (Hou et Myles, 2007).

En France, 56 % des couples français sont constitués de deux conjoints de même niveau d’études (Vanderschelden, 2006).

Le niveau d’instruction a toujours été un facteur dans le choix de conjoint. Les établissements scolaires fournissent les contextes dans lesquels les jeunes se rencontrent. 

La population de Fritissa est une population isolée, divisée en quatre groupes socio-ethniques différents: Arabe, Berbère, Chourfa et migrants. Les trois premiers groupes se sont installés dans la région depuis longtemps, alors que le groupe des migrants est plus récent.

L’index d’homogamie  ethnique au sein de la population de Fritissa vaut  0.8270. C’est-à-dire que 82,7 % des mariages établis dans la région sont homogames. L’appartenance ethnique est un critère dominant dans le choix du conjoint.

Lors du choix du futur conjoint, les individus dans la population de Fritissa accorde plus d’importance à l’appartenance ethnique qu’au niveau d’instruction.

L’homogamie éducationnelle tend à prévaloir, dans les pays industriels, sur l’homogamie sociale et économique (Vanderschelden, 2006).

En France, l’analyse d’une enquête-emploi de 1989 a montré que le choix du conjoint se fait d’avantage en fonction du niveau d’instruction qu’en fonction de l’origine sociale (Forsé et Chauvel, 1995).

Nous avons comparé le comportement homogame au sens ethnique entre la population instruite et celle non instruite. Nous avons trouvé que l’index d’homogamie au sein de la population instruite vaut 0.787 alors qu’au sein de la population non instruite est égal à 0.871.  L’utilisation du  test statistique: Khi 2 nous a permis de conclure qu’il y’a une différence significative au seuil de 0.01 entre la population instruite et non instruite. En effet,  L’intensité du phénomène d’homogame ethnique dépend du niveau d’instruction des maris: lorsque les maris sont instruits, ils sont moins homogames.

 

Références bibliographiques

Abdelrahman A. I., 1994, Education and Assortative Marriage in Northern and Urban Sudan: 1945-1979. Journal of Biosocial Science, 26 (3), 341-348.

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