Colloques du Groupement des
Anthropologistes de Langue Française (GALF)
Burri, E., 2009, La Région des
Trois-Lacs (Suisse) au Néolithique moyen II: culture matérielle et histoire des
peuplements. Antropo, 18, 47-62. www.didac.ehu.es/antropo
La Région des Trois-Lacs (Suisse) au Néolithique moyen II: culture matérielle et histoire des peuplements
The “Région des Trois-lacs” (Switzerland) in the Middle Neolithic: material culture and populations history
Elena Burri
Département des infrastructures, Section
archéologie cantonale, 10 pl. de la Riponne, 1014 Lausanne.
Département d’anthropologie et d’écologie,
12 rue Gustave Révilliod, case postale, 1211 Genève 4.
E-mail : Elena.burri@vd.ch
Mots- clés: Néolithique moyen, histoire des
peuplements, céramique, silex, Plateau suisse
Keywords: Middle Neolithic,
firestone, populations history,
pottery, Swiss Plateau
Résumé
Le Néolithique
moyen de la Région des Trois-Lacs est particulièrement riche en sites
lacustres, très précisément datés par la dendrochronologie et au matériel
abondant. L’étude de la céramique du site de Concise (VD, CH) a montré la
possibilité d’établir un scénario d’histoire des peuplements à partir de la
culture matérielle. La maîtrise de la chronologie et l’analyse spatiale des
occupations permet de clarifier la relation entre producteur et consommateur et
de reconstituer l’histoire des potières venues à plusieurs reprises à Concise
depuis l’autre versant du Jura. Nous étendons notre analyse à l’ensemble de la
Région des Trois-Lacs. Puis, nous mettons en parallèle à l’histoire des
potières l’histoire du silex, ce qui nous permet de proposer un scénario des
peuplements pour toute la Région et de tenter une quantification des mouvements
de population.
Abstract
The Middle Neolithic of the
“Région des Trois-Lacs” is rich with very precisely dendrochronologically dated
laked-side dwellings with abundant artefacts. The study of the pottery from
Concise (VD, CH) have allowed to propose an historic scenario for the potters.
With the help of spatial analysis and ethnoarcheological models, we have
conclude that the ceramic production was domestic and that potters, who were
women, have come at several occasions to the Swiss Plateau from the other side
of Jura mountain. We extend this analysis to all the “Région des Trois-Lacs”
and we include the analysis of variations in firestone sets. This takes us to
propose an history of the populations movements during the regional Middle
Neolithic.
Lors de l’étude de la céramique du
Néolithique moyen de la station lacustre de Concise (Burri 2006, 2007), nous
avions constaté dans plusieurs villages la coexistence très exceptionnelle de
deux styles céramiques habituellement géographiquement séparés. Ceci nous avait
permis, à l’aide de modèles ethnoarchéologiques et d’une étude spatiale et
typologique minutieuse, de déterminer que le mode de production de la céramique
est domestique et de proposer une histoire des peuplements du site basée sur
l’histoire des potières. Les indices allaient dans le sens de sociétés
segmentées dont les membres pouvaient se déplacer de manière autonome, avec des
changements graduels qui n’affectent que certains domaines de la culture
matérielle. Nous avons voulu vérifier la possibilité d’étendre ces résultats à
l’ensemble de la région, de percevoir la dynamique des changements et
d’observer d’autres indices de comportement polythéthiques des sociétés
néolithiques, avec l’espoir de reconstituer l’histoire des peuplements de
l’ensemble de la région et de comprendre la relation entre les différentes
composantes de la culture matérielle. Nous avons donc décidé d’examiner le
comportement de quelques éléments dans la Région des Trois-Lacs et ses
environs.
Figure 1. Illustration des conséquences sur la culture
matérielle de plusieurs scénarios d’histoire des peuplements. On voit que la
relation n’est pas univoque. La question qui nous occupe est le reconstitution
des scénarios à partir des changements de la culture matérielle. En rouge:
éléments observables archéologiquement après construction de chronotypologies
fiables, en bleu scénarios historiques possibles.
Figure 1. The possible consequences of several historic
scenarios (blue) on the material culture (red). We will try to restituate
historic scenatios on the basis of cultural changes.
Notre but était d’observer la dynamique des
industries et d’aboutir à un modèle interprétatif permettant la reconstitution
de scénarios historiques concernant l’histoire des peuplements. La restitution
de scénarios historiques à partir de la culture matérielle se heurte à de
nombreux obstacles et imprévus, notamment parce que des causes diverses peuvent
avoir des effets semblables ou des causes proches des effets divergents (Figure
1). Malgré ce fait et l’absence complète de sépultures, la Région des
Trois-Lacs semblait idéale pour des objectifs ambitieux. Cet article relate les
premiers résultats et les interrogations que nos recherches ont amenées.
Figure 2. La Région des Trois-Lacs (en pointillé) à l’ouest du
Plateau suisse, au pied du jura. Les voies de passage au travers de cette
chaîne sont la trouée de Vallorbe –Pontarlier (1), la trouée de Belfort (2),
des cols moins praticables comme la Givrine (3) ou la Vue des Alpes (4). A
l’est de Concise (étoile), le Mont-Aubert plonge directement dans le lac de
Neuchâtel (5). Fond de carte P. Moinat SACVD.
Figure 2. The « Région des Trois-Lacs » in yellow in
the bottom of the Jura mountain. The natural passages are designed by arrows
(1-4). The
Mont-Aubert (5) is falling directly in the lake of Neuchâtel.
La Région des Trois-Lacs se trouve au pied
du Jura, à l’ouest du Plateau suisse (Figure 2). Le Jura descend en pente
relativement abrupte du haut de la chaîne jusqu’aux rives nord des lacs de
Neuchâtel et de Bienne, ne laissant qu’une bande de quelques kilomètres
vraiment exploitable pour les agriculteurs. Le Jura lui-même est constitué de
plis parallèles interrompus par des affaissements transversaux qui permettent
le passage au travers de la chaîne. Pour la Région des Trois-Lacs, on retiendra
surtout la troués de Vallorbe Pontarlier qui permet le passage le plus aisé,
par la Cluse de Montjoux. La trouée de Belfort, au nord-est, offre également
une voie très praticable. D’autres passages plus difficiles permettent de
passer des bords du Léman à la Franche-Comté au sud-ouest (par exemple les cols
de la Faucille, de la Givrine). Des voies moins praticables que la trouée de
Vallorbe permettent de traverser le Jura à l’est du lac de Neuchâtel: la vue
des Alpes ou le Val de Travers. Sur la rive nord du lac de Neuchâtel, le Mont
Aubert, dont les pans se jettent abruptement dans le lac, forme une barrière
naturelle qui pouvait être infranchissable à pied en période de hautes eaux
entre Concise et l’est du lac de Neuchâtel. Néanmoins, le passage aquatique
était toujours possible. Sur les rives sud et le lac de Morat, le paysage est
beaucoup plus ouvert et se dégage sur l’est du Plateau suisse, tandis qu’à
l’ouest le passage vers le Léman et le Bassin du Rhône est aisé. La circulation
entre les Trois-lacs, l’est du Plateau et le Léman est ouverte. La Région des
Trois-Lacs se trouve donc au centre d’un réseau de circulation englobant le
Plateau suisse, la Franche-Comté et le Bassin du Rhône, avec le meilleur
passage connu liant Franche-Comté et Plateau au niveau de l’extrémité ouest du
lac de Neuchâtel.
Figure 3. Carte des sites publiés qui vont être utilisés. Les
numéros correspondent à ceux de la liste de sites de la Table 1. Fond de carte
P. Moinat SACVD.
Figure 3. Map of the reference settings.
The number correspond to wich of the Table 1.
Au Néolithique moyen II, la région est l’une des mieux connues de la Préhistoire, malgré l’absence de sépultures connues, grâce à une abondance de stations lacustres implantées sur les rives des lacs. Celles-ci ont livré d’impressionnantes quantités de matériel dans des niveaux précisément datés par dendrochronologie (Table 1, Figure 3). Les conditions de sédimentation et de conservation sont souvent idéales avec des villages occupés chacun durant environ une génération et une sédimentation rapide qui a scellé les niveaux en place (Figure 4). La périodisation intrasite est souvent très fine, tandis que les synthèses régionales et les publications de sites permettent de suivre l’évolution de la culture matérielle avec une périodisation de l’ordre du siècle pour le Plateau suisse, avec une chronologie basée sur les datations dendrochronologiques et l’évolution de la céramique qui permet d’intégrer des sites non datés en chronologie absolue (Burri 2007, Table 1). Les groupes culturels reconnus et séparés essentiellement sur la base des styles céramique ne sont pas monolithiques et leurs composantes se comportent parfois de manière indépendante, segmentant les entités culturelles (Jeunesse et al. 1998). En comparant les distributions diachroniques et synchroniques des artefacts et des matières premières entre les sites et en intégrant le contexte régional, on obtient une histoire de la culture matérielle, puis des groupes culturels. C’est elle que nous espérons interpréter en termes d’histoire des peuplements. Nous nous sommes concentrés sur deux matériaux qui ont l’avantage d’être largement publiés, d’avoir fait l’objet de synthèses récentes ou de recherches en cours et de présenter des caractéristiques assez contrastées pour permettre une étude bibliographique. Elle devra être complétée par la suite par des analyses typologiques plus détaillées, en tout cas pour le silex, et par l’étude d’autres matériaux. Nous avons choisi dans un premier temps la céramique, différenciée par son style en plusieurs groupes évoluant en chronologie, et l’industrie lithique avec deux paramètres: la provenance des matières premières et les supports des outils (lame ou éclat). Nous avons dû renoncer à intégrer la pierre verte, dont seule une des origines de la matière première, la pélite-quartz des Vosges, était abordable au niveau bibliographique, ce qui restreignait par trop la discussion. Nous avons choisi de considérer les fréquences relatives des différents éléments pour pouvoir intégrer des gisements aux effectifs très dissemblables.
No |
Site |
Couche |
Culture |
|
Av. J.-C. |
BC call |
Phase |
7 |
Lattrigen-Riedstation |
|
Cortaillod |
palafitte |
3393-3388 |
|
Cortaillod |
5 |
Twann |
UH |
Cortaillod |
palafitte |
3405-3391 |
|
Port-Conty |
6 |
Nidau-BKW |
5 |
Cortaillod |
palafitte |
3410-3398 |
|
3500-3380 av. J.-C. |
2 |
Auvernier Tranchée Tram |
|
Cortaillod |
palafitte |
|
|
|
12 |
Clairvaux II |
|
Cortaillod |
palafitte |
|
|
|
21 |
Arbon-Bleiche 3 |
|
Pfyn/Horgen |
palafitte |
3384-3370 |
|
|
1 |
Concise |
E6 |
Cortaillod |
palafitte |
3570-3516 |
|
|
1 |
Concise |
E5 |
Cortaillod |
palafitte |
3570-3516 |
|
|
5 |
Twann |
OS |
Cortaillod |
palafitte |
3596-3532 |
|
Cortaillod tardif/ |
2 |
Auvernier-Port |
III |
Cortaillod |
palafitte |
3627-3621 |
|
NMB récent/ |
5 |
Twann |
MS1 |
Cortaillod |
palafitte |
3649-3607 |
|
Pfyn |
1 |
Concise |
E4 |
Cortaillod |
palafitte |
3645-3635 |
|
3650-3500 av.
J.-C. |
8 |
Muntelier-Strandweg |
4 |
Cortaillod |
palafitte |
|
|
|
9 |
Yverdon-Garage-Martin |
14-15 |
Cortaillod |
palafitte |
|
|
|
12 |
Clairvaux XIV |
3_6 |
NMB récent |
palafitte |
|
|
|
19 |
Zurich-Mozartrasse |
|
Pfyn |
palafitte |
3670-3600 |
|
|
1 |
Concise |
E3 |
Cortaillod |
palafitte |
3666-3655 |
|
|
5 |
Twann |
MS |
Cortaillod |
palafitte |
3702-3662 |
|
Cortaillod moyen/ |
4 |
Thielle-Mottaz |
|
Cortaillod |
palafitte |
3719-3699 |
4222-3819 |
NMB moyen/ |
16 |
Burgäschisee-südwest |
|
Cortaillod |
palafitte |
3760-3748 |
|
Pfyn |
9 |
Yverdon-Garage
Martin |
18-19 |
Cortaillod |
palafitte |
|
|
3760-3660 av. J.-C. |
12 |
Motte-aux-Magnins |
V |
NMB |
palafitte |
3659-3525 |
|
|
12 |
Clairvaux XIV |
1_2 |
NMB |
palafitte |
|
|
|
1 |
Concise |
E2 |
Cortaillod |
palafitte |
3713-3675 |
|
|
14 |
Gardon |
40/42 |
NMB |
grotte |
|
3795-3662 |
|
19 |
Zurich
Kanalisationssanierung |
|
Pfyn |
palafitte |
3728-3681 |
|
|
20 |
Feldmeilen
Forderfeld |
|
Pfyn |
palafitte |
|
|
|
18 |
Hitzkirch-Seematt |
OS |
Cortaillod |
palafitte |
3758 |
|
Cortaillod classique/ |
2 |
Auvernier-Port |
Va-c |
Cortaillod |
palafitte |
3791-3679 |
3940-3698 |
NMB ancien/ |
17 |
Egolzwil 4 |
|
Cortaillod |
palafitte |
|
3958-3798 |
Cortaillod ancien |
5 |
Twann |
US |
Cortaillod |
palafitte |
3838-3768 |
|
zurichois |
1 |
Concise |
E1 |
Cortaillod |
palafitte |
3868-3793 |
|
3900-3760 av.
J.-C. |
19 |
Zürich-Mozartrasse |
5 |
Cortaillod |
palafitte |
3864-3834 |
|
|
15 |
Hautecombe |
|
NMB/Cortaillod |
palafitte |
3842-3835 |
3942-3793 |
|
13 |
Corsier |
3 |
Cortaillod |
palafitte |
3859-3856 |
|
|
8 |
Muntelier-Dorf |
|
Cortaillod |
palafitte |
3867-3854 |
|
|
8 |
Muntelier-Fischergässli |
1 à 4 |
Cortaillod |
palafitte |
3895-3820 |
|
|
8 |
Muntelier-Strandweg |
E1-3 |
Cortaillod |
palafitte |
|
|
|
19 |
Zürich-Mozartrasse |
6 |
Cortaillod |
palafitte |
3908-3872 |
|
|
19 |
Zürich-Kleiner
Hafner |
4E |
Cortaillod |
palafitte |
|
4040-3803 |
|
10 |
Onnens |
|
Cortaillod |
palafitte |
|
|
|
3 |
Hauterive-Champréveyres |
|
Cortaillod |
palafitte |
|
|
|
12 |
Clairvaux VII |
|
NMB |
palafitte |
|
|
|
Table 1. Liste des sites retenus par phase chronologique. Les
numéros sont ceux qui Figurent sur la carte (Figure 3), avec leur datations
dendrochronologiques (av. J.-C.) ou 14C calibrées à un sigma par couche.
Lorqu’il n’y a pas de datation, il s’agit d’une attribution typologique sur la
base de la céramique à une des phases du Néolithique moyen II.
Table 1. List of the reference settings. The numbers correspond
to those of the Figure 3. The datations are dendrochronological (av. J.-C.), BC
cal (1 sigma) or typological after the pottery.
Figure 4. Exemple d’une stratigraphie du site de Concise, on
voit bien la dilatation de la séquence du Néolithique moyen. Photo Ph. Müller, SACVD.
Figure 4. This stratigraphy from Concise shows the dilatation of
the Middle Neolithic sequency.
Les sources de matières premières
Pour la détermination de provenances de
silex, nous avons repris essentiellement les données de J. Affolter parues dans
sa thèse (2002), et en partie dans la thèse de M. Honnegger (2001) ou dans des
publications de sites du Plateau suisse (Bleuer éd 1993, De Capitani et al.
2002, Gross et al. 1987, Hafner et Suter 2000, Leuzinger 2000, Mauvilly et
Boisaubert 2005, Ramseyer éd. 2000, Suter 1987), ainsi que les données de J.-F.
Piningre et P. Pétrequin (Piningre 1989) pour la Combe d’Ain ou de Th. Perrin
pour le Bugey (2001). Nous avons regroupé ces différentes sources et nous avons
retenu 5 provenances principales qui permettaient d’obtenir des effectifs
significatifs (Figure 5). Les silex allochtones sont rares et proviennent d’une
distance de plus de 250 km des sites (p.ex. silex de l’Yonne, d’Italie). Les
autochtones, qui ne représentent qu’un faible pourcentage des industries, sont
ramassés dans les environs immédiats des sites et parfois débités dans les
habitats (Boisaubert, Mauvilly 2006, Perrin 2001, Honnegger 2001), ce qui n’est
pas le cas pour les silex régionaux importés (Honnegger 2001, Perrin 2001,
Affolter 2002). Les gisements de silex régionaux importés se trouvent localisés
dans trois zones: au nord-est du Plateau (silex du nord du Jura provenant de
calcaires du Malm ou de l’Eocène), au sud du Jura dans des niveaux du Crétacé
supérieur et sur l’autre versant du Jura, avec le Mont-Etrelles. Nous avons
intégré à cette liste les quelques importations de cristaux de roche alpins.
Le mode d’approvisionnement du silex n’est
pas assuré. Les ateliers de taille du Néolithique moyen n’ont pas encore été
découverts. On peut envisager des échanges de proche en proche gagnant
finalement le Plateau ou des expéditions sur les gisements pour se procurer la
matière première (Honnegger 2001, Affolter 2002). Un système du type
places centrales/redistribution est exclu (Affolter 2002) et l’éloignement des
gisements par rapport à la Région des Trois-Lacs rend l’approvisionnement
direct peu probable. La solution la plus plausible semble suivre le même modèle
que celui proposé par P. Pétrequin
pour la pierre polie (Pétrequin et Jeunesse 1995). Des communautés
villageoises exploitent les gisements et effectuent un premier débitage. Les
habitants d’un second cercle de villages, situés à environ 1-2 jours de marche
des mines, effectuent la majorité de la mise en forme en se procurant les
ébauches de manière massive lors d’échanges cérémoniels. Ensuite, par échanges
de proche en proche, dans le cadre d’échanges symboliques ou de dots par
exemple, les lames sont diffusées, avec un faible pourcentage de lames brutes.
Ce mode d’échanges implique un gradient de fréquence de la source jusqu’aux
communautés les plus éloignées, avec une décroissance brusque de la fréquence
au niveau du second cercle des villages qui effectuent la majorité du façonnage
(Pétrequin et Jeunesse 1995). En première approche, ce modèle peut convenir au
silex, en tout cas au niveau de la diffusion de proche en proche d’outils finis
depuis les environs des gisements de matières premières.
Nous avons choisi un second critère,
semble-t-il plus culturel. Il s’agit du choix du support des outils. Ceux-ci
sont façonnés sur deux types de support à choix: lames (ou lamelles) et éclats.
Les lames sont au moins deux fois plus longues que larges et présentent des crêtes
parallèles de débitage sur une face (Figure 5, en bas à droite). Ce critère a
été utilisé par tous les auteurs et est donc aisément accessible en
bibliographie. Nous adjoignons aux séries déjà publiées, les silex de Concise,
qui sont encore en cours d’étude par J. Bullinger, que nous tenons à remercier
pour ses remarques fructueuses.
Figure 5. Carte des principales sources de silex. Les silex
allochtones ne sont pas représentés, les points oranges représentent des
gisements de silex presque uniquement utilisés localement. Fond de carte P.
Moinat SACVD. En bas à droite se trouvent des photos de lames à gauche et d’un
éclat à droite en silex de Olten. Photos SACFR.
Figure 5. The principal firestone settlements. The autochtones
settlements are colouring in orange. Photos of firestone blades and burst (on
the right) are taken.
La céramique: les résultats du site de Concise
La céramique du Néolithique moyen de ce
site est exceptionnelle par le mélange des styles et des dégraissants qu’elle
montre dans certains niveaux (Burri 2006 ab, 2007). L’analyse spatiale de la
céramique, l’application du modèle ethnoarchéologique de A.-M. et P. Pétrequin
(1984) et l’analyse de la répartition des styles et des dégraissants permettent
d’affirmer que la production de la céramique est domestique et que des groupes
de potières de Franche-Comté sont venus au moins à trois reprises s’installer
au bord du lac de Neuchâtel, à Concise, dans des villages au moins en partie
occupés par des populations locales. Ce phénomène a lieu sur une longue durée
avec des emprunts techniques réciproques. On a donc une transformation de la
culture matérielle par immigration et acculturation. Des interrogations sur le
reste de la culture matérielle nous ont fait penser que les potières étaient parfois
venues seules, peut-être lors d’échanges matrimoniaux, lorsque seule la
céramique semblait concernée par des changements (Burri 2007). En tout état de
cause, le mode de production domestique implique qu’en première approximation
différents styles contemporains sont le fait de différentes populations de
potières et que les styles de céramiques reflètent immédiatement une partie du
peuplement: celui des potières. Des études plus fines permettent de déterminer
si les céramiques sont le reflet des styles originaux ou si ce sont des
imitations. On estime que les artisans sont des potières par référence aux
études ethnoarchéologiques qui montrent que dans le cas de production
domestiques, ce sont certainement des femmes qui oeuvrent (Testart 1982, 1986, Arnold
1985, Knopf 2002). Les changements de style correspondent à des migrations de
potières lorsque plusieurs styles contemporains régionaux sont en présence. Les
styles céramiques ne sont par contre pas forcément le reflet de la population
dans son intégralité et des phénomènes d’acculturation très rapide peuvent
rendre difficilement détectables ces migrations (Gelbert 2003, Gallay 2005,
Burri 2007).
Figure 6. Carte des sites à céramique Cortaillod et
NMB et céramiques représentatives de chacune des culture. Fond de carte P.
Moinat SACVD.
Figure 6. The settings with Cortaillod (purple) or NMB (orange)
pottery and one typical pottery of each style.
La céramique et son histoire au cours du
Néolithique moyen
Les styles céramiques sont bien définis par la forme des récipients et en partie par leurs dégraissants (Figure 6). Dans la Région des Trois-Lacs, il s’agit essentiellement du Cortaillod et du Néolithique moyen bourguignon (NMB), et dans une moindre mesure du Pfyn. Le Cortaillod est la culture typique du Néolithique moyen de l’ouest du Plateau suisse avec ses jarres à profil en S et mamelons sur le bord. Le NMB est centré sur la Bourgogne et la Franche-Comté, avec des jarres segmentées à épaulement souligné de paires de mamelons. Le Pfyn est originaire de l’Est du Plateau et s’étend peu à peu vers l’Ouest au cours du Néolithique moyen. Ces trois styles se différencient à partir du début du Néolithique moyen à la confluence des courants de néolithisation danubien et méditerranéen. Les éléments caractéristiques sont abondants, la céramique bien connue et on suit site par site et période par période les fréquences relatives des différents styles (Table 2). Il existe des éléments Cortaillod en Franche-Comté dans la phase classique, entre 3850 et 3750 av. J.-C., à Clairvaux VII et Chalain 3, avec un dégraissant qui ne peut être local et qui indique que ce sont dans doute des importations du Plateau suisse (Pétrequin 1989, 2005). Au Cortaillod moyen, vers 3700 av. J.-C., un petit groupe de potières immigre au bord du lac de Neuchâtel à Yverdon et Concise depuis la Franche-Comté (Burri 2007). Il s’agit de quelques dizaines de potières au plus, au vu de la taille des villages. Parmi celles-ci, quelques-unes (sans doute moins d’une dizaine) ont suivi le pied du Jura pour arriver à Auvernier, Thielle et Twann. Ce scénario se répète encore au moins 2 fois au Cortaillod tardif, vers 3650 av. J.-C. et vers 3550 av. J.-C. Ensuite, au Port-Conty, vers 3400 av. J.-C., on remarque un changement notoire avec un retour sur la Franche-Comté où on assiste à un changement complet du style céramique à Clairvaux II. Il y a donc une immigration de potières du Plateau en Franche-Comté, le groupe est relativement important puisque la céramique est très largement Port-Conty, mais le remplacement des styles céramiques n‘implique pas forcément un changement global de population. Pendant ce temps, le Pfyn s’étend vers l’ouest et gagne petit à petit le Plateau suisse. A la fin de la séquence, au Néolithique final, vers 3200 av. J.-C., le Horgen qui découle du Pfyn va gagner l’ensemble du Plateau et parvenir en Combe d’Ain (Giligny 1994, 1997).
A partir de ce scénario (Figure 7), qui ne
concerne que la céramique, plusieurs questions se posent.
S’agit-il uniquement d’échanges
matrimoniaux de potières, de migrations de populations entières, de
remplacement de population, de mélange de populations et de cultures,
d’acculturation ?
Les échanges des autres biens sont-ils
parallèles ou non au déplacement des potières, a-t-on des échanges réciproques
de potières ?
Pourquoi les potières NMB se sont-elles
presque exclusivement fixées à Concise ?
On peut répondre immédiatement à cette
dernière question. En effet, il existe un blocage au niveau de Concise pour le
NMB et le phénomène est quasiment inconnu sur la rive sud. Il faut envisager de
petits groupes se scindant et partant d’un village pour s’installer dans un
autre. La circulation est sans doute terrestre et la navigation joue un rôle
négligeable puisque le Mont Aubert semble constituer un obstacle.
De plus, nous pouvons affirmer qu’il n’y a
pas d’échanges réciproques de potières entre la Franche-Comté et la Région des
Trois-Lacs par la trouée de Vallorbe-Pontarlier. En effet, les incursions de
style NMB sur le Plateau et Cortaillod en Franche-Comté ne sont pas
contemporaines. Si ces mouvements de potières correspondent à des échanges
matrimoniaux, ils ne se font que dans un sens, ce qui peut être un indice de
rapt de femmes, voire de "front pionnier" associé à un artisanat ou
un genre, dans les cas où seules des potières se déplacent.
Cortaillod classique /NMB ancien |
||||||||||
3900-3760 av. J.-C. |
céramique |
silex |
||||||||
|
NMB % |
Cortaillod % |
lame |
éclat |
alloch |
Etrelles |
NordJura |
autoch |
Sud Jura |
quartz |
Muntelier Dorf |
|
100 |
53 |
47 |
21 |
|
65 |
13 |
|
1 |
Muntelier Fischergässli |
|
100 |
46 |
54 |
19 |
|
80 |
1 |
|
|
Muntelier Strandweg |
|
100 |
|
|
21 |
|
69 |
10 |
|
|
Corsier |
|
100 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Twann US |
|
100 |
74 |
26 |
7 |
|
83 |
1 |
|
9 |
Egolzwil 4 |
|
100 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Hitzkirch |
|
100 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Hauterive-Champréveyres |
|
100 |
|
|
18 |
28 |
18 |
9 |
27 |
|
Auvernier-Port V |
1 |
99 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Clairvaux VII |
86 |
14 |
maj |
|
|
|
|
|
|
|
Hautecombe |
25 |
75 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Concise E1 |
|
100 |
78 |
22 |
oo |
|
ooo |
oo |
o |
|
Onnens |
|
100 |
59 |
41 |
12 |
6 |
81 |
1 |
|
|
Zurich Kleiner Hafner 4d-4f |
|
100 |
32 |
68 |
3 |
|
97 |
|
|
|
Zurich Mozartstrasse 5-6 |
|
100 |
36 |
64 |
2 |
|
93 |
3 |
|
1 |
Cortaillod moyen/NMB moyen |
||||||||||
3760-3660 av. J.-C. |
céramique |
silex |
||||||||
|
NMB % |
Cortaillod % |
lame |
éclat |
alloch |
Etrelles |
NordJura |
autoch |
Sud Jura |
quartz |
Garage-Martin 18-19 |
25 |
75 |
80 |
20 |
|
|
|
|
|
|
Gardon 40/42 |
100 |
1 |
10 |
90 |
|
|
|
77 |
23 |
|
Clairvaux XIV 1-2 |
100 |
1 |
33 |
66 |
|
|
|
70 |
30? |
|
Clairvaux Motte aux Magnins |
100 |
1 |
30 |
70 |
|
|
|
|
|
|
Twann MS |
8 |
92 |
97 |
3 |
22 |
|
65 |
4 |
|
9 |
Burgäschisee |
|
100 |
80 |
20 |
|
|
70 |
|
|
|
Thielle-Mottaz |
2 |
98 |
80 |
20 |
|
|
70 |
|
|
|
Concise E2-E3 |
38 |
62 |
69 |
31 |
ooo |
oo |
oo |
oo |
o |
|
Feldmeilen Vorderfeld |
|
|
27 |
63 |
|
|
99 |
|
|
1 |
Zurich Kanalisationssanierung |
|
|
17 |
83 |
|
|
99 |
1 |
|
|
Cortaillod tardif /NMB récent |
||||||||||
3650-3500 av. J.-C. |
céramique |
silex |
||||||||
|
NMB % |
Cortaillod % |
lame |
éclat |
alloch |
Etrelles |
NordJura |
autoch |
Sud Jura |
quartz |
Garage Martin 14-16 |
3 |
97 |
87 |
13 |
|
|
|
|
|
|
strandweg 4 |
|
100 |
|
|
7 |
|
49 |
22 |
3 |
19 |
Twann OS |
6 |
94 |
69 |
31 |
34 |
|
58 |
1 |
|
7 |
Auvernier-Port 3 |
2 |
98 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Twann MS1 |
3 |
97 |
97 |
3 |
25 |
|
74 |
4 |
|
10 |
Clairvaux XIV 3-6 |
99 |
1 |
30 |
70 |
|
|
|
70 |
|
|
Concise E4 |
53 |
47 |
41 |
59 |
ooo |
ooo |
oo |
oo |
o |
|
Concise E5-6 |
14 |
86 |
56 |
44 |
ooo |
ooo |
oo |
o |
o |
|
Zurich Mozartstrasse |
|
|
52 |
46 |
|
|
98 |
2 |
|
|
Cortaillod Port-Conty |
||||||||||
3500-3380 av. J.-C. |
céramique |
silex |
||||||||
|
NMB % |
Cortaillod % |
lame |
éclat |
alloch |
Etrelles |
NordJura |
autoch |
Sud Jura |
quartz |
Clairvaux II |
|
100 |
70 |
30 |
|
20 |
|
80 |
|
|
Auvernier Tranchée Tram |
|
100 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Lattrigen |
|
100 |
|
|
87 |
3 |
|
|
1 |
9 |
Twann UH |
|
100 |
84 |
16 |
9 |
|
91 |
|
|
|
Nidau BKW |
|
100 |
|
|
10 |
|
90 |
|
|
|
Arbon Bleiche 3 |
|
|
37.5 |
62.5 |
25 |
|
|
75 |
|
|
Table 2. Tableau des sites par phase du Néolithique moyen
avec les pourcentages relatifs de céramique de type NMB ou Cortaillod (les
sites qui n’ont ni céramique Cortaillod, ni NMB sont des sites de culture Pfyn)
et les pourcentages relatifs des provenances du silex quand ils sont connus et
des types de support.
Table 2. The relative percentages of Cortaillod and NMB pottery styles, of the different
origins and the two possible supports for the firestone.
Figure 7. Histoire des migrations de potières entre les deux
versants du Jura.
Figure 7. History of the potterwomen between the two side of the
Jura mountain.
L’industrie lithique et son histoire au cours du Néolithique moyen
Le silex est importé en très grande
majorité sur ces sites où il n’existe quasiment pas de débitage, si ce n’est du
silex local de qualité médiocre (Honnegger 2001, Mauvilly et Boisaubert 2005,
Affolter 2002). Les supports sont donc importés, soit sous forme d’outils
finis, soit de préformes (Affolter 2002, Honegger 2001). Le silex est sans
doute débité aux environs des gisements, seul le façonnage est rarement
effectué dans les sites. La Région des Trois-Lacs étant dépourvue de silex de
bonne qualité, on y trouve un approvisionnement diversifié bien corrélé en
fréquence avec l’éloignement géographique des gisements (Figure 5). Ceci plaide
en faveur d’échanges de proche en proche, sur le même mode que la pierre polie,
avec des gradients décroissants en fréquence depuis les sources
d’approvisionnement (Pétrequin et Jeunesse 1995). Comme les gisements de silex
de bonne qualité sont tous relativement éloignés, on assiste à une grande
disparité de provenance par rapport à la région de Zurich ou à la Combe d’Ain,
avec des variations qui peuvent être considérables entre sites. Malgré tout, le
silex du nord du Jura, le plus proche, est la plupart du temps le plus
fréquent. La situation change au Port-Conty, et même à la fin du Cortaillod
tardif, avec l’importation de grandes lames en silex d’origine lointaine, qui
augmente les pourcentages d’éléments allochtones (Table 2). D’une manière
générale, les types de support diffèrent entre l’ouest du Plateau suisse d’une
part et l’est du Plateau suisse et l’autre versant du Jura d’autre part. Dans
la Région des Trois-Lacs, ce sont les supports sur lames qui ont été
privilégiés, contrairement à l’est et à la Franche-Comté où ce sont les éclats
(Table 2).
Figure 8. Histoire du silex. En haut la proportion lames
(lames)/éclats (en blanc), en bas les proportions des différentes matières
premières.
Figure 8. Firestone history. Up: the proportion
between blade in black and burst
in white. Down: the proportions of the different origins of firestone in the
settings.
Au niveau diachronique (Table 2, Figure 8),
on voit qu’au Cortaillod classique, les provenances sont très diverses, avec
une majorité originaire du nord du Jura. Les lames dominent nettement, alors
qu’à l’est ce sont les éclats. A Clairvaux VII, il existe une dominance des
lames très étonnante en contexte NMB. Elle peut être mise en relation avec les
quelques céramiques Cortaillod qu’on y trouve (Jeunesse et al. 1998). P.
Pétrequin parle à ce sujet d’une immigration d’hommes venus du Plateau suisse
jusqu’à Clairvaux (Pétrequin et Pétrequin 2005). Par contre, dans ce village,
les provenances ne se démarquent pas de celles, locales ou du sud du Jura,
habituelles en Combe d’Ain. Ceci montre bien qu’il doit y avoir déplacement de
tailleurs ou tout le moins de savoir-faire et pas seulement une circulation de
lames. On remarque aussi que dans le Cortaillod ancien zurichois, ce sont les
éclats qui dominent, malgré une céramique Cortaillod, sur une matière première
très largement originaire du nord du Jura. Les silex du nord du Jura sont
débités tantôt en éclat et exportés dans la région de Zurich, tantôt en lames
et exportés vers la Région des Trois-Lacs. A contrario, des matières premières différentes
peuvent être débitées de la même façon (silex local et du Bugey pour la Combe
d’Ain, silex de Olten pour la Région des Trois-Lacs)
Au Cortaillod moyen, les provenances sont
plus homogènes, très majoritairement du nord du Jura, avec toujours une grande
majorité de lames, tandis que les éclats dominent dans le NMB et le Pfyn. Il
existe également une forme de dissociation entre matières premières et choix du
support. Les silex du nord du Jura
étant débités tantôt sur lame, tantôt sur éclat. A Concise, rien ne diffère du
reste du Plateau, malgré l’arrivée de potières NMB.
Au
Cortaillod tardif, le silex de Olten domine toujours, avec des supports sur
éclats dans le Pfyn et sur lames
dans la Région des Trois-Lacs, ainsi que des supports sur éclats en silex local
ou du Bugey dans le NMB. Mais il
existe une nette augmentation de la fréquence des éclats à Twann et surtout à
Concise, sans doute à mettre en relation avec une nouvelle arrivée de potières,
qui seraient ici accompagnées par des utilisateurs de silex. De nouveau, il y a
dissociation entre matières premières et supports puisque la matière première à
Twann est la même qu’au Cortaillod moyen, sans augmentation des provenances du
sud du Jura qui correspondrait à un apport venu de la Combe d’Ain. Le même
problème se pose concernant le lieu de débitage des silex et l’identité des
tailleurs.
L’absence de
débitage dans les sites interdit de parler immédiatement d’immigration de
tailleurs de silex-On peut parler d’hommes pour la taille du silex en référence
au modèle ethnoarchéologique de Testart (1982, 1986). Celui-ci met en relation
le tabou universel lié au sang pour la femme avec une différentiation sexuelle
du travail qui interdit la fabrication ou l’utilisation de certains outils aux
femmes. Néanmoins, le fait que les supports, contrairement aux matières
premières, ne suivent pas un simple gradient de fréquence depuis les gisements,
qu’ils sont en partie au moins indépendants de la matière première et sont
choisis selon des territoires culturels, semble montrer qu’on n’est pas en
situation d’échanges de proche en proche, mais qu’à un niveau ou un autre, les
tailleurs de silex aux choix culturels ou aux savoirs-faire différents
interviennent.
Au Port-conty, les matières premières
proviennent toujours en majorité du nord du Jura, avec une augmentation de la
fréquence des silex allochtones par le transfert de belles lames non retouchées
provenant du midi. Ces importations représentent un nouveau phénomène qui
émerge dès le Cortaillod tardif à Concise et qui annonce les importations
massives du Néolithique final. Au niveau local, les supports sur lames ont
tendance à diminuer dans la Région des Trois-Lacs (Honnegger 2001). Par contre,
ils augmentent nettement à Clairvaux, avec à côté de ces lames non retouchées,
un débitage d’outils sur lames en silex local (Piningre 1989). Ce changement
dans le mode de débitage du silex accompagne l’arrivée des potières Cortaillod.
Il semble que toute une population a migré depuis la Région des Trois-Lacs
jusqu’en Combe d’Ain. Les domaines culturels ou de savoirs-faire semblent
disjoints du support matériel, comme P. Pétrequin et Ch. Jeunesse (1995) l’ont
remarqué pour la pierre polie où il existe un changement culturel complet au
Vème millénaire, mais une grande stabilité des réseaux d’échange de matière
première.
Il faut répéter
que pour le silex, le support sur lame ou éclat semble avoir une valeur culturelle,
qui ne peut être uniquement liée à la circulation de proche en proche des
biens. Il semble que le choix du support se fasse très en amont du lieu
d’utilisation, ce qui pose problème sur le mode de fonctionnement des échanges
et de la taille. La Franche-Comté et l’est du Plateau préfèrent nettement les
supports sur éclat, tandis que dans la Région des Trois-Lacs, ce sont les lames
qui dominent. A Concise, l’arrivée massive des supports sur éclat survient dans
un deuxième temps par rapport à la céramique venue de Franche-Comté. Dans les
deux cas, il n’existe pas ou peu de diffusion dans le reste de la région. Au
Port-Conty, la céramique et le support laminaire suivent une migration parallèle depuis le Plateau suisse
vers la Combe d’Ain, mais pas la matière première, puisqu’il n’y a pas
importation massive de silex de Olten.
Des résultats
encore non définitifs de J. Affolter sur la matière première du silex de
Concise indique une forte particularité du site. Si l’ensemble E1 ne se
démarque pas, il existe dès l’ensemble E2 une apparition non négligeable du
silex du Mont-Etrelles ainsi que des silex allochtones de l’Yonne les deux
provenances devenant majoritaires dès l’ensemble E4 du Cortaillod tardif. Il y
a donc un décalage entre l’apparition précoce des silex du nord-ouest, alors
que les supports ne changent que dans l’ensemble E4. Surtout, J. Affolter note
une abondance tout-à-fait exceptionnelle de silex originaires d’Italie et
normalement absents des séries de la Région des Trois-Lacs.
Synthèse
Nous pouvons proposer un scénario qui
demande à être confirmé par d’autres éléments de la culture matérielle et une
meilleure compréhension de la relation entre producteurs et consommateurs, au
moins pour le silex. Les estimations quantitatives demandent également à être
confirmées. Elles proviennent de l’analyse spatiale du site de Concise (Burri
2006, 2007), dont les différents villages comprennent moins de vingt maisons
avec une cohabitation entre potières Cortaillod et NMB.
Au Cortaillod classique, vers 3800 av.
J.-C., quelques tailleurs de silex traversent le Jura depuis la Région des
Trois-Lacs, sans doute accompagnés d’un faible nombre de potières. Ils
s’installent en Combe d’Ain. Vers 3700 av. J.-C., au Cortaillod moyen, une
vingtaine de potières au plus font le chemin inverse pour s’installer à
Concise, quelques-unes continuant sur Yverdon, d’autres sur la rive nord du lac
de Neuchâtel. Au Cortaillod tardif, vers 3640 av. J.-C., puis vers 3600 av.
J.-C. et vers 3550 av. J.-C.,
quelques potières, cette fois accompagnées de tailleurs de silex, représentant
une population restreinte de quelques dizaines d’individus, émigrent depuis la
Franche-Comté vers Concise, Yverdon et le long de la rive nord du lac de
Neuchâtel jusqu’à Twann. Au Port-Conty, vers 3400 av. J.-C., c’est toute une
population qui part du Plateau suisse pour envahir la Combe d’Ain où
l’intégralité de la culture matérielle change. Cette situation se reproduira au
début du Néolithique final, où la culture de Horgen, venue de l’est du Plateau
arrive jusqu’en Combe d’Ain.
On remarque que les sociétés sont nettement
polythétiques, avec une partition en sous-groupes de la culture matérielle et
parfois la coexistence de populations venues de régions différentes dans un
même village. Les éléments de la culture matérielle semblent être le reflet de
la population, au moins des segments liés à des spécialités artisanales, sans
doute dépendantes du genre. Des migrants en nombre très restreint peuvent avoir
localement un impact considérable sur la culture matérielle. Il semble que les
sociétés sont encore très labiles. En effet, les segments des différents
groupes de population sont relativement indépendants. A partir du Cortaillod
Port-Conty et surtout du début du Néolithique final, avec le Horgen, l’homogénéité
est plus grande. Les populations sont moins segmentées, avec des déplacements
de populations entières et des territoires mieux marqués. Ceci est peut-être
lié à une plus grande pression démographique et/ou à une structuration sociale
plus importante avec l’émergence de chefferies (Gallay 1995).
En tout cas, des microchronologies
régionales et des études spatiales intrasites devraient permettre de mieux
comprendre et assurer le comportement des matières premières et des composantes
stylistiques dans le but d’affiner notre connaissance de la relation entre
producteur et consommateur. L’histoire des peuplements que nous proposons doit
être confirmée par d’autres sources. Nous pensons notamment à la possibilité
d’étudier le comportement de la culture matérielle au niveau
microchronologique, avec des périodisations plus fines, de l’ordre de la
génération. Surtout, il faut préciser quels sont les éléments caractéristiques
des sous-groupes qui partitionnent les populations en observant quels groupes
de matériaux se comportent de manière semblable pour les interpréter en termes
sociaux. L’interprétation demandera l’utilisation de modèles
ethnoarchéologiques portant sur le partage du travail, la structure des
sociétés… La constitution de ces sous-groupes demande d’une part d’affiner les
typologies et de considérer l’ensemble des sites régionaux dans des
chronologies brèves, d’autre part d’examiner les comportements intrasites. Dans
ce contexte, et comme l’a déjà montré l’étude de la céramique, le site de Concise
jouera sans aucun doute un rôle pivot. Les études en cours et la confrontation
des différents matériaux semblent extrêmement prometteurs. D’une part, on a
l’assurance de pouvoir effectuer des analyses spatiales sur de larges surfaces,
représentant de bonnes proportions de chacun des villages et ce sur plusieurs
siècles (Winiger 2003, 2006). Ceci permettra d’assurer le comportement
diachronique et synchronique des éléments et de restituer une éventail
représentatif des objets d’une maisonnée. D’autre part, on sait déjà que pour
au moins deux types d’artefacts, la céramique et l’industrie lithique sur
silex, il existe pour plusieurs villages une cohabitation entre styles
appartenant en principe à des populations différentes et la preuve, dans le cas
des potières, d’un mélange de populations. De plus, P. Chiquet (2005, 2007) a
mis en évidence des changements dans le cortège faunistique, sans doute liés à
un apport de population. Le comportement des sous-groupes déterminés à
l’échelle régionale devrait amener à une véritable histoire des peuplements
régionaux, avec, dans le meilleur des cas, une quantification des mouvements de
population, ainsi qu’une meilleure connaissance générale des sociétés
néolithiques et de la manière dont elles se comportent. Ces modèles doivent
permettre de comprendre de manière plus globale la mise en place des
peuplements néolithiques.
Bibliographie
Affolter, J., Honegger, M.,
Sedlmeier, J., 1995. Technologie: l'outillage en silex. In: Stöckli, W.E.,
Niffeler, U., Gross-Klee, E., ed. Néolithique. Bâle: Soc. suisse de préhist. et d'archéol. SPM: La Suisse
du Paléolithique à l'aube du Moyen-Age; 2, 122-135.
Affolter, J., 1995.
Rohmaterial = Matière première. In: Stöckli, W.E., Niffeler, U., Gross-Klee, E., ed. Néolithique: Silexgeräte = L'outillage en
silex. Bâle: Soc. suisse de préhist. et d'archéol. SPM: La Suisse du
Paléolithique à l'aube du Moyen-Age; 2, 122-124.
Affolter, J., 1997. Industrie
lithique de Chalain 3: l'origine des matières premières. In: Pétrequin, P.,
ed. Les sites littoraux
néolithiques de Clairvaux-les-Lacs et de Chalain, Jura, 3: Chalain station 3
(3200 - 2900 av. J.-C.), vol. 2. Paris: Eds
de la Maison des sci. de l'homme. Archéol. et culture matérielle, 401-406.
Affolter, J., 2000. Origine
des matières premières en silex. In: Ramseyer, D., ed. Muntelier / Fischergässli: un habitat néolithique au
bord du lac de Morat (3895 à 3820 avant J.-C.). Fribourg: Eds univ. Archéol.
fribourgeoise; 15, 72-77.
Affolter,
J., 2000. Silexartefakte aus der Zeit um 3400 v. Chr.: Untersuchungen zur
Rohmaterialversorgung. In: Hafner, A., Suter, P.J., - 3400: die Entwicklung der
Bauerngesellschaften im 4. Jahrtausend v.Chr. am Bielersee aufgrund der
Rettungsgrabungen von Nidau und Sutz-Lattrigen. Bern: Berner Lehrmittel- und
Medienverl. Ufersiedlungen am Bielersee; 6, 77-81.
Affolter, J., 2002. Provenance des silex
préhistoriques du Jura et des régions limitrophes. Neuchâtel: Mus. cantonal
d'archéol. Archéol. neuchâteloise; 28, Thèse.
Arnold,
B., Hafner, A., Maute-Wolf, M., Mauvilly, M., Winiger, A., Wolf, C., 2004. La région des Trois-Lacs entre Suisse
romande et Suisse alémanique. In: Sur les traces des palafittes. Archéol.
suisse, 27, 2, 42-52.
Bailly, M., 2005. L'industrie
lithique taillée: inventaire et observations préliminaires. In: Pétrequin, P.,
Pétrequin, A.-M., ed. Clairvaux-les-Lacs (Jura): site néolithique de CL XIV:
fouille programmée 2003-2004: rapport de synthèse. Besançon: Univ. de
Franche-Comté, Lab. de chronoécologie. Rapp. non publ., 199-218.
Buret, C., 1983. L'industrie
de la pierre polie du Néolithique moyen et récent à Auvernier, canton de
Neuchâtel (Suisse). Paris: Univ. Paris X, ethnographie et préhist. Thèse de
doctorat.
Burri, E., 2006. Les stations
du Néolithique moyen de Concise (Vaud, Suisse): céramique, analyses spatiales
et interprétations en termes d'histoire des peuplements. Genève: Dép.
d'anthrop. et d'écologie de l'Univ. Thèse de doctorat: Fac. des sci. Section de
biol.; Archéol. préhist.; Sc. 3797.
Burri, E., 2006. Structures
en creux, structures en tas: essai de reconstitution de plans de villages à
partir des dépotoirs: le cas de Concise (Vaud, Suisse). In: Frère-Sautot,
M.-C., ed. Des trous: structures en creux pré- et protohistoriques. Colloque
(24-26 mars 2006; Dijon et Baume-les-Messieurs). Montagnac: Ed. Monique
Mergoil. Préhistoires; 12, 141-150.
Burri, E. 2007. La céramique
du Néolithique moyen: analyse spatiale et histoire des peuplements. Lausanne:
cahiers d’archéologie romande CAR 109, la station lacustre de Concise, 2
Gross,
E., Bleuer, E., Hardmeyer, B., Rast-Eicher, A., Ritzmann, C., Ruckstuhl, B.,
Ruoff, U., Schibler, J., 1992. Zürich Mozartstrasse: neolithische und
bronzezeitliche Ufersiedlungen, 2: Tafeln. Zürich: Orell Füssli. Ber. der
Zürcher Denkmalpflege: archäol. Monogrn; 17.
Gross,
E., Brombacher, C., Dick, M., Diggelmann, K., Hardmeyer, B., Jagher, R.,
Ritzmann, C., Ruckstuhl, B., Ruoff, U., Schibler, J., Vaughan, P.C.,
Wyprächtiger, K., 1987. Zürich Mozartstrasse: neolithische und bronzezeitliche
Ufersiedlungen, 1. Zürich: Orell Füssli. Ber. der Zürcher Denkmalpflege:
archäol. Monogrn; 4.
Gross,
E., 1987.
Die Keramik der Horgener Schichten. In: Gross, E., Brombacher, C., Dick, M., et
al. Zürich Mozartstrasse: neolithische und bronzezeitliche Ufersiedlungen, 1.
Zürich: Orell Füssli. (Ber. der Zürcher Denkmalpflege: archäol. Monogrn; 4),
125-133.
Hafner,
A., Suter, P.J., 2000. - 3400: die Entwicklung der Bauerngesellschaften im 4.
Jahrtausend v.Chr. am Bielersee aufgrund der Rettungsgrabungen von Nidau und
Sutz-Lattrigen. Bern: Berner Lehrmittel- und Medienverl. Ufersiedlungen am
Bielersee; 6, Schriftenreihe der Erziehungsdirektion des Kantons Bern.
Honegger, M., 2001.
L'industrie lithique taillée du Néolithique moyen et final en Suisse. Paris:
Eds du CNRS. Monogr. du CRA / Centre de rech. archéol.; 24.
Jaccottey, L., Milleville,
A., Pétrequin, P., (A paraître). Des meules et des villages fortifiés:
exploitation des matières premières dans le Jura et organisation territoriale.
In: Besse, M., Honegger, M., ed. Sociétés néolithiques: des faits
archéologiques aux fonctionnements socio-économiques. Colloque interrégional
sur le Néolithique (27; Neuchâtel; 1-2 oct. 2005).
Jeunesse, C., Pétrequin, P.,
Piningre, J.-F., 1998. L'est de la France. In: Guilaine J., ed. Atlas du Néolithique européen, 2A: l'Europe
occidentale. Liège: Service de préhist. de l'Univ. Etudes et rech. archéol. de
l'Univ. de Liège: ERAUL; 46, 501-584.
Kaenel, G., 1976. La fouille
du Garage-Martin-1973: précisions sur le site de Clendy à Yverdon (Néolithique
et Age du Bronze). Lausanne: Bibl. hist. vaudoise. Cahs d'archéol. romande; 8.
Knopf,
Th., 2002. Kontinuität und Diskontinuität in der Archäologie:
Quellenkritisch-vergleichende Studien. Münster, New York, München, Berlin:
Waxmann. Tübinger Schriften zur Ur-und Frühgeschichtlichen Archäologie; 6.
Lambert, J., Lavier, C.,
Lundström-Baudais, K., Magny, M., Passard, F., Pétrequin, P., Pétrequin, A.-M.,
Richard, H., Voruz, J.-L., 1989. Résumé de synthèse de la troisième partie. In: Pétrequin, P.,
ed. Les sites littoraux
néolithiques de Clairvaux-les-Lacs (Jura): 2. Le Néolithique moyen. Paris: Eds
de la Maison des sciences de l'homme.(Archéol. et culture matérielle, 441-443.
Mauvilly, M., Boisaubert,
J.-L., &, Carnes, J., Gassmann, P., Jacquat, C., Magny, M., Médard, F.,
Mouthon, J., Pillonel, D., Reynaud Savioz, N., Richoz, I., Tegel, W., 2005.
Montilier/Dorf, fouille Strandweg 1992/1993: nouvelles données sur la culture
Cortaillod au bord du lac de Morat. Cahs d'archéol. fribourgeoise, 7, 4-73.
Pétrequin, A.-M., Pétrequin,
P., 1989. La céramique du niveau V et le Néolithique Moyen Bourguignon. In: Pétrequin, P.,
ed. Les sites littoraux
néolithiques de Clairvaux-les-Lacs (Jura), 2: le Néolithique moyen. Paris: Eds
de la Maison des sci. de l'homme. Archéol. et culture matérielle, 265-284.
Pétrequin, A.-M., 1989. La
céramique des stations II. In: Pétrequin, P., ed. Les sites littoraux néolithiques de Clairvaux-les-Lacs
(Jura), 2: le Néolithique moyen. Paris: Eds de la Maison des sci. de l'homme.
Archéol. et culture matérielle, 171-172.
Pétrequin, P., ed. 1989. Les
sites littoraux néolithiques de Clairvaux-les-Lacs (Jura), 2: le Néolithique
moyen. Paris: Eds de la Maison des sci. de l'homme. Archéol. et culture
matérielle.
Pétrequin,
P., Gallay, A., ed. 1984. Le
Néolithique moyen bourguignon (N.M.B.). Colloque (4-5 juin 1983; Beffia, Jura,
France). Archs suisses d'anthrop. générale (Genève), 48, 2.
Pétrequin, P., Jeunesse, C.,
ed., &, Jeudy, F., Monnier, J.-L., Morre-Biot, N., Pelegrin, J., Pétrequin,
A.-M., Praud, I., Rossy, M., Rougeot, J.-C., collab. 1995. La hache de pierre:
carrières vosgiennes et échanges de lames polies pendant le Néolithique
(5400-2100 av. J.-C.). Paris: Eds Errance.
Piningre,
J.-F., 1984. Les industries
lithiques du Néolithique Moyen Bourguignon en Franche-Comté. In: Pétrequin, P.,
Gallay, A., ed. Le Néolithique
Moyen Bourguignon (N.M.B.). Colloque (4-5 juin 1983; Beffia, Jura, France).
Archs suisses d'anthrop. générale (Genève), 48, 2, 49-53.
Piningre,
J.-F., 1989. Les industries
lithiques du niveau V. In: Pétrequin, P., ed. Les sites littoraux néolithiques
de Clairvaux-les-Lacs (Jura), 2: le Néolithique moyen. Paris: Eds de la Maison
des sci. de l'homme. Archéol. et culture matérielle, 295-308.
Ramseyer, D., ed., &,
Affolter, J., Augereau, A., Billaud, Y., Hurni, J.-P., Morel, P., Orcel, C.,
Reinhard, J., Richard, H., Sidéra, I., Tercier, J., collab. 2000. Muntelier /
Fischergässli: un habitat néolithique au bord du lac de Morat (3895 à 3820
avant J.-C.). Fribourg: Eds univ. Archéol. fribourgeoise; 15.
Schwab, H., 2002. Archéologie
de la 2e correction des eaux du Jura, 3: Les artisans de l'âge du Bronze sur la
Broye et la Thielle. Fribourg: Eds Univ. et Service archéol. cantonal. Archéol. fribourgeoise;
16.
Winiger,
A., Burri, E., Quinn, D.S., 2004.
Le village. In: Kaenel, G., Crotti, P., ed. Les lacustres: 150 ans
d'archéologie entre Vaud et Fribourg. Cat. d'exposition (sept. 2004-janv. 2005,
mars-mai 2005; Lausanne, Fribourg). Lausanne: Mus. cantonal d'archéol. et
d'hist. Docum. du Mus. cantonal d'archéol. et d'hist. de Lausanne, 35-48.
Winiger, A., 2003. Concise
(Vaud): une stratigraphie complexe en milieu humide. In: Besse, M., Stahl
Gretsch, L.-I., Curdy, P., ed. ConstellaSion: hommage à Alain Gallay. Lausanne:
Cahs d'archéol. romande. Cahs d'archéol. romande; 95, 207-228.
Zwahlen,
H., &, Affolter, J., Brombacher, Ch., Francuz, J., Hafner, A.,
Hüster-Plogmann, H., Jacomet, S., Rast-Eicher, A., Schibler, J., Stampfli, H.
R., Suter, P. J., collab. 2003. Die jungneolitische Siedlung Port-Stüdeli.
Bern: Archäol. Dienst des Kanton, Rub Media AG. Ufersiedlungen am Bielersee; 7,
Schriftenreihe der Erziehungsdirektion des Kantons Bern.