Colloques du Groupement des Anthropologistes de Langue Française (GALF)

Hami, H., Soulaymani, A., Mokhtari, A., 2009, Les Déterminants des Mariages Consanguins dans la Région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer (Maroc). Antropo, 18, 27-35. www.didac.ehu.es/antropo


 

Les Déterminants des Mariages Consanguins dans la Région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer (Maroc)

 

The Determinants of Consanguineous Marriages in the Region of Rabat-Salé-Zemmour-Zaer (Morocco)

 

Hinde Hami, Abdelmajid Soulaymani, Abdelrhani Mokhtari

 

Laboratoire de Génétique et Biométrie, Département de Biologie, Faculté des Sciences, Université Ibn Tofail, B.P. 133, Kénitra 14 000, Maroc. E-mail: hind212@yahoo.fr

 

Mots-clés: Mariage; Choix du conjoint; Déterminants; Consanguinité; Maroc.

Keywords: Marriage; choice of spouse; Determinants; Consanguinity; Morocco.

 

Résumé

            La présente étude a pour but d’analyser les facteurs déterminant les pratiques des mariages consanguins dans la région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer au Maroc, et à préciser dans quelle mesure les variables étudiées sont associées à la pratique de cette forme de mariage pouvant prédire la probabilité de ce phénomène.

            Ainsi, à travers les résultats d’une enquête prospective menée auprès de 270 familles échantillonnées au hasard dans la maternité de l’Hôpital Souissi de Rabat, plusieurs facteurs économiques, socio-culturels et démographiques apparaissent associés au choix de ce type de mariage, dont deux paramètres sont discriminants, à savoir le degré d’urbanisation du milieu de socialisation, et l’âge précoce au premier mariage.

           

Abstract

            The present study aims to analyze the factors that determine practices of consanguineous marriages in the region of Rabat-Salé-Zemmour-Zaer in Morocco.

            Thus, according to the results of a prospective survey conducted among 270 randomly selected families in maternity of the Souissi Hospital of Rabat, several economic, socio-cultural and demographic factors appear associated with the choice of this type of marriage, two parameters of which are discriminants, namely type of childhood residence (rural or urban) and age at first marriage

 

Introduction

            Au Maroc, comme dans d’autres pays arabes, la pratique des mariages consanguins constitue encore aujourd’hui un phénomène social particulièrement préoccupant. Près d’un tiers de la population marocaine pratique cette forme de mariage (ENPS-I, 1987; ENPS-II, 1992; ENF, 1995; ENSME, 1997). En effet, c’est une tradition arabe et musulmane, au nom d’une sécurité financière et affective, mais au prix de la santé des enfants, qui courent le risque de maladies génétiques plus que d’autres.

            En fait, les chercheurs qui se sont intéressés à la problématique des mariages consanguins dans de nombreux pays ont pu mettre en évidence que ce type de mariage augmente les risques de malformations congénitales, et de maladies héréditaires rares chez le nouveau né (Zlotogora, 1997; Mokhtar et al., 1998; Temtamy et al., 1998; Al-Gazali et al., 1999 ; Zakzouk, 2002).

            En outre, d’après plusieurs études, la consanguinité est considérée comme l’une des principaux facteurs déterminants de la mortalité périnatale, néonatale, infantile voire la mortinatalité (Guz et al., 1989; Baki et al., 1992; Bittles, 1994; Banerjee, Roy, 2002).

            Des études multiples ont cherché à expliquer ce choix matrimonial dans certains pays, et en conséquence, elles ont avancé qu'un grand nombre de facteurs liés aux caractéristiques des femmes, pourraient être des déterminants de choix de ce type de mariage, à savoir le niveau d’instruction (Al Husain, Al Bunyan, 1997; Hussain, 1998; Alper et al., 2004), le milieu de socialisation (Hussain, Bittles, 1998), la profession (Khlat, 1988; Jurdi, Saxena, 2003), et l'âge d’entrée en première union (Afzal et al., 1994; Hussain, Bittles, 1999; Gunaid et al., 2004). Cependant, dans les interprétations, la plupart de ces études ne tiennent pas compte, de l’effet simultané de ces différentes variables en ne permettant qu’une description limitée du phénomène.

            À l’échelle du Maroc, très peu de données existent pour documenter la fréquence des mariages consanguins, et encore moins pour en identifier les déterminants. La seule étude à notre connaissance, qui a soulevé cette question est celle de Benhamadi, (1997), qui a essayé d’identifier les déterminants des mariages consanguins, en analysant les données des enquêtes nationales: ENPS-I, (1987) et ENPS-II, (1992).

     Cette étude a pour objectifs de déterminer le niveau des mariages consanguins dans la région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer au Maroc, et d’en cerner les principaux facteurs déterminants, permettant ainsi d’approfondir la connaissance et la compréhension de cette pratique matrimoniale.

 

Données et Méthodes

            Sources des Données

            Les données utilisées dans ce travail proviennent d’une enquête prospective qui a été réalisée dans la maternité de l’hôpital Souissi de Rabat entre novembre 2004 et juin 2005. Cette enquête a été menée sur un échantillon de 270 familles et procure un grand nombre d'informations sur leurs caractéristiques socio-économiques, culturelles et démographiques. En effet, ces données sont recueillies à partir de la femme enquêtée, sur le couple, les parents, et les beaux-parents par entretien en face-à-face.

 

Etude des Déterminants des Mariages Consanguins

            Pour mettre en évidence les variables associées au choix des mariages consanguins dans la région étudiée, on a eu recours à un modèle de régression logistique, la variable à prédire ‘‘Type de mariage’’ est considérée comme la variable dépendante ayant la modalité 1, si le mariage est consanguin et la modalité 0, si le mariage est non consanguin. Les variables explicatives sélectionnées et intégrées au modèle de départ sont les suivantes: le niveau d’instruction, l’âge au premier mariage, et le milieu de socialisation des deux conjoints (lieu de résidence durant l’enfance), ainsi que le milieu de résidence des couples étudiés. Signalons que l’interprétation de l’effet propre de chacune de ces variables explicatives se fait relativement à une modalité de référence.

            Il est à noter que pour chacune des variables introduites dans le modèle qui comportent des données manquantes, une modalité «catégorie manquante» a été ajoutée pour éviter de biaiser l’échantillon de la population étudiée.

Les modèles de régression logistique sont réalisés à l’aide du logiciel statistique Stata version 9.2.

 

Résultats

Unions Consanguines: Fréquence et Déterminants

            Niveau des Unions Consanguines

            Sur les 270 familles en examen dans cette étude, une fréquence de 20% des mariages consanguins est enregistrée chez la génération des couples étudiés (IC à 95% est de 12.3 à 28.0%) contre 21% chez la génération des parents (IC à 95% est de 12.9 à 28.8%), avec un coefficient moyen de consanguinité de l’ordre des unions entre cousins issus de germains, soit respectivement 10.28 10-3 et 12.17 10-3.

            La comparaison intergénérationnelle du niveau de consanguinité ne montre pas de différence significative entre la génération des parents et celle des enfants (génération des couples étudiés) (l’écart réduit est de 0.0154; p>0.05). Ces résultats s’accordent avec ceux qui avaient été préalablement obtenus par Al-Awadi et al., (1985) au Koweït, Khoury et Massad, (1992) en Jordanie, Bittles et al., (1993) en Inde, Hussain et Bittles, (1998) au Pakistan, et Saadat et al., (2004) en Iran.

 

Figure 1. Fréquence des Mariages Consanguins

Figure 1. Frequency of Consanguineous Marriages

 

            Déterminants de l’Union Consanguine: une Analyse Multivariée

            Pour discerner les variables explicatives pertinentes liées à la pratique des mariages consanguins dans la région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer, on a eu recours à un modèle de régression logistique qui fait intervenir divers facteurs économiques, socio-culturels et démographiques comme variables indépendantes.

            Les résultats ainsi obtenus sont présentés dans le tableau 1. La variable dépendante est la probabilité de pratique des mariages consanguins.

Il faut noter que les rapports de cotes supérieurs à 1 indiquent une augmentation des chances de faire partie du groupe des consanguins tandis que les rapports inférieurs à 1 diminuent les probabilités d’appartenance à ce groupe.

            Les résultats du modèle de régression logistique montrent que les deux variables explicatives qui sont réellement déterminantes dans le choix des mariages consanguins sont le milieu de socialisation et l’âge au premier mariage.

Ainsi, à partir des résultats du modèle, la probabilité d’entrer en union consanguine chez les femmes est significativement plus importante pour celles qui ont passé l’enfance à la campagne: elles ont pratiquement dix huit fois plus de chances que leurs consœurs du milieu urbain (OR=17.61; p<0.001).

Selon le même modèle, l’âge précoce des femmes à la première union est également associé à l’acceptation de cette forme d’union: les femmes qui se marient avant d’atteindre l’âge de 20 ans sont significativement plus susceptibles d’accepter cette forme de mariage que celles qui se marient à l’âge de 30 ans ou plus (OR=5.25; p<0.05).

Néanmoins, chez les hommes, ces deux variables ne suffissent pas à expliquer leur choix des unions consanguines dans la région.

D’ailleurs, d’après les résultats, le niveau d’instruction ainsi que le milieu de résidence ne semblent pas jouer un rôle pour l’explication de ce phénomène.

 

 

VARIABLES EXPLICATIVES 1

Odds-Ratio

Ajusté2

Erreur Standard

z

p>z

[IC 95%]3

Niveau d’Instruction Hommes

Sans instruction

0.78

0.49

-0.40

0.69

[0.23-2.66]

Primaire

0.85

0.43

-0.32

0.75

[0.31-2.31]

(Secondaire et plus)

1.00

 

 

 

 

Age au Mariage Hommes

Catégorie manquante

4.06

3.35

1.70

0.09

[0.81-20.42]

10-19 ans

1.31

1.85

0.19

0.85

[0.08-20.82]

20-29 ans

0.94

0.51

-0.11

0.91

[0.32-2.74]

(30-39 ans)

1.00

 

 

 

 

Lieu de Résidence durant l’Enfance Hommes

Rural

1.91

0.96

1.28

0.20

[0.71-5.14]

(Urbain)

1.00

 

 

 

 

Niveau d’Instruction Femmes

Sans instruction

0.77

0.44

-0.46

0.65

[0.25-2.34]

Primaire

0.58

0.35

-0.90

0.37

[0.18-1.90]

(Secondaire et plus)

1.00

 

 

 

 

Age au Mariage Femmes

Catégorie manquante

0.27

0.31

-1.13

0.26

[0.03-2.61]

10-19 ans

5.25*

4.47

1.95

0.05

[0.99-27.87]

20-29 ans

1.91

1.53

0.81

0.42

[0.40-9.18]

(30-39 ans)

1.00

 

 

 

 

Milieu de Résidence durant l’Enfance Femmes

Rural

17.61***

9.28

5.44

0.00

[6.27-49.47]

(Urbain)

1.00

 

 

 

 

Milieu de Résidence Couples

Catégorie manquante

4.98

4.72

1.70

0.09

[0.78-31.90]

Rural

1.36

0.82

0.52

0.61

[0.42-4.41]

(Urbain)

1.00

 

 

 

 

Tableau 1. Analyse de Régression Logistique des Facteurs Déterminants du Choix des Mariages Consanguins dans la Région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer. 1 Les données manquantes pour chacune de ces variables correspondent à la modalité «catégorie manquante». 2 L'estimation du modèle exige de nombreuses itérations comportant diverses combinaisons de variables explicatives possibles jusqu'à ce que le modèle d'ajustement maximal soit découvert.

3 Intervalle de Confiance à 95%. La modalité de référence se trouve entre parenthèses.

Niveau de signification: * p<0.05; ** p<0.01; *** p<0.001.

Table 1. Logistic Regression Analysis of Determinants of Consanguineous Marriages in the Region of Rabat-Salé-Zemmour-Zaer

 

Discussion

            Nombreux sont les marocains qui, pour des motivations culturelles ou encore économiques, optent pour un mariage avec un partenaire de la même famille. En effet, d’après les résultats de cette étude, la région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer présente une fréquence de mariage consanguin jugée importante, vu sa forte attraction des flux migratoires en provenance de plusieurs régions du Maroc, et par conséquent l’évolution progressive de sa population.

            Par ailleurs, un certain nombre d'études ont permis de souligner l’importance de cette pratique matrimoniale dans des régions géographiquement isolées au Maroc (Lamdouar Bouazzaoui, 1994; Latifi et al., 2004; Baali et al., 2005; Cherkaoui et al., 2005). En fait, d’après plusieurs études, la consanguinité est considérée comme une forme particulière de l’endogamie géographique (McCullough, O'Rourke, 1986; Fuster et al., 1996; Alfonso-Sánchez et al., 2001; Aresti et al., 2001; Wahab et al., 2006).

            Les raisons évoquées pour justifier ce choix sont nombreuses et variées, on peut citer: le maintien du patrimoine dans la famille, le renforcement des liens familiaux, la stabilité du mariage, et la préservation d’un rapport privilégié entre la jeune mariée et ses beaux parents (Khlat et al., 1986; Givens, Hirschman, 1994; Hakim 1994; Hussain, Bittles, 1998; Hussain, 1999; Alper et al., 2004; Gunaid et al., 2004). Alors que, les déterminants de pratique de cette forme de mariage sont relativement méconnus. Peu de recherches ont été faites pour évaluer les facteurs qui prédisent le mieux le choix de ce type de mariage.

Dans ce sens, à partir d’une analyse de régression logistique multivariée, nous avons cherché à identifier les principaux facteurs déterminants des mariages consanguins et à préciser dans quelle mesure les variables étudiées sont associées à la pratique de cette forme de mariage pouvant prédire la probabilité de ce phénomène.

            Les résultats de cette analyse indiquent que la probabilité de pratique des mariages consanguins est loin d’être aléatoire et dépend de plusieurs facteurs économiques, socio-culturels et démographiques.

            Ainsi, chez les femmes, le modèle amène à considérer le degré d’urbanisation du milieu de socialisation et l’âge précoce au premier mariage comme des déterminants importants. En fait, ces deux variables sont citées par Audinarayana et Krishnamoorthy, (2000), comme variables explicatives de ce comportement matrimonial au sud de l’Inde.

            Selon les résultats du modèle, les femmes qui ont passé l’enfance à la campagne présentent une plus forte probabilité de former une union consanguine que leurs consœurs du milieu urbain. En effet, près de 60% des citadines qui sont en unions consanguines dans la région étudiée ont déclaré avoir passé leur enfance à la campagne. C’est d’ailleurs ce que donnent les résultats des Enquêtes Démographiques et de Santé menées au Maroc (ENPS-I, 1987; ENPS-II, 1992), au Yémen (YDMCHS, 1991/1992; YDMCHS, 1997), en Egypte (EDHS, 1995; EDHS, 2000), et en Turquie (TDHS, 1998). Ces femmes, en contractant un tel mariage, se doivent de maintenir les normes et les valeurs liées à leur milieu d’enfance tout en tenant compte des exigences imposées par le nouvel environnement, ce qui peut expliquer en partie l’importance des unions consanguines en milieu rural qu’en milieu urbain.

            D’ailleurs, comme le suggèrent les résultats d’autres études, outre le milieu de socialisation, le contrôle qu’exercent les parents sur le choix du conjoint de leurs enfants semble également influencer le choix de ce type de mariage (Demirel et al., 1997; Hussain, Bittles, 1998; Audinarayana, Krishnamoorthy, 2000; Tfaily, 2005; Abbasi Shavazi et al., 2006).

D’après nos résultats, l’âge au premier mariage semble également discriminant: les femmes qui se marient à un âge jeune multiplient par 5.25 leur probabilité de se marier avec un parent par rapport à leurs homologues qui se marient tardivement.

Chez les hommes en revanche, les résultats indiquent que ces deux variables ne suffisent pas à expliquer leur choix des unions consanguines dans la région.

D’ailleurs, contrairement à ce qu’on s’y attend, les résultats montrent que l’instruction des deux futurs conjoints n’a pas d’effet significatif sur le choix de cette forme d’union ainsi que le soulignent Abbasi Shavazi et al., (2006) chez les iraniens, Wahab et al., (2006) chez les afghans, et Kerkeni et al., (2006) chez les croates.

            Toutefois, les résultats rapportés par Benhamadi, (1997) montrent que l’instruction de la femme joue un rôle singulier dans le choix du modèle de mariage au Maroc: une femme sans instruction a au moins 16 fois plus de risque d'être en union consanguine qu'une femme ayant le niveau supérieur (OR=16.4; p<0.001) (ENPS-I, 1987).

Quant au milieu de résidence, d’après nos résultats, il ne semble pas avoir un effet, ce qui confirme des résultats obtenus par d’autres chercheurs, tel que Benhamadi, (1997) pour l’ensemble du Maroc, Hussain et Bittles, (2000) pour les Musulmans de l’Inde,  Jurdi et Saxena, (2003) pour le Yémen, contrairement à d’autres études qui indiquent son effet discriminant (Gomez Gomez, 1989; Givens, Hirschman, 1994; Wahab, Ahmad, 1996; Hussain, Bittles, 1998; Abbasi Shavazi et al., 2006).

Néanmoins, de tels résultats ne suffisent pas pour conclure à une résistance de ce comportement matrimonial à l’égard des forces socio-économiques. La population urbaine de la région étudiée est loin d’être homogène sur le plan socio-économique dont une partie non négligeable vit dans des conditions de pauvreté. En effet, d’après les résultats que nous avons obtenus, plus de 80% des couples consanguins sont partagés entre le milieu rural et le milieu urbain populaire.

            Au Maroc, d’après les résultats obtenus par Benhamadi, (1997), le choix des mariages consanguins est fortement associé aux ménages pauvres par comparaison au groupe de référence qui bénéficie de meilleures conditions de vie (OR=1.6; p<0.01). Le fait de vivre dans des conditions socio-économiques défavorables, selon Audinarayana et Krishnamoorthy, (2000), Jurdi et Saxena, (2003), augmente de manière significative la probabilité d’être en unions consanguines, ce qui contribue au maintien des pratiques traditionnelles en milieu urbain.

            En fait, nombre d’auteurs soulignent l’importance de ces mariages en milieu rural, parmi les individus les plus pauvres, de faible niveau d’instruction (Hussain, 1999; Bittles, 2001a et 2001b; Bittles, 2002).

De plus, Benhamadi, (1997) rapporte qu’au Maroc, la profession exercée par les hommes et le travail de la femme jouent un rôle explicatif. En effet, par rapport au groupe de référence constitué des professionnels, les artisans et vendeurs et à un moindre degré les agriculteurs présentent 20 à 30% plus de chances de se retrouver dans le groupe des consanguins. Cependant, l’introduction de la variable relative au travail de la femme dans le modèle de régression logistique réduit cet effet. Ainsi, d’après la même étude, une femme qui ne travaille pas augmente ses chances d’avoir un conjoint apparenté de 70% (OR=1.7; p<0.001) (ENPS-I, 1987). C’est d’ailleurs ce que donnent les résultats des Enquêtes Démographiques et de Santé menées au Yémen (YDMCHS, 1991/1992; YDMCHS, 1997), en Egypte (EDHS, 1995; EDHS, 2000), et en Turquie (TDHS, 1998).

            En résumé, les résultats de cette étude indiquent que les chances d’entrer en union consanguine dans la région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer sont plus importantes pour les jeunes femmes qui ont vécu leur enfance en milieu rural, ce qui laisse à penser que les femmes sont les plus concernées par le risque de pratique du mariage consanguin, vu qu’il s’agit dans la majorité des cas d’un mariage arrangé par les parents sans libre choix des futurs conjoints. De plus, comme dans toutes les sociétés patriarcales, les résultats obtenus dans cette région permettent de lever le voile, au sein de cette forme d’organisation, sur les différences de socialisation entre les filles et les garçons.

 

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